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Le journal du Médecin : La Linéa, série animée italienne qui faisait d'une simple ligne blanche un personnage, vous a-t-elle inspirés pour la bédé ou plutôt au niveau de l'animation ? Vincent Patar : Arrivant à l'école d la Cambre, nous avons découvert l'animation : naïfs, nous ignorions la somme de travail que cela représentait. Assez naturellement, nous avons commencé à dépouiller nos dessins. Avec le recul, il est évident que ce dessin animé nous a nourrit. Je me souviens avoir découvert La Linéa gamin, dans les années 70. Stéphane Aubier : Il y a quelques dessins animés de ce type, un peu minimalistes et très chouettes : La Linéa c'était l'extrême, mais les dessins des Barbapapa par exemple étaient également très simples. Un autre aspect fascinant de La Linéa, c'était la voix du personnage : impossible de comprendre son langage incongru et, pourtant, nous saisissions toutes ses intentions. Inconsciemment cela nous a sans doute servi pour le travail de sons de nos personnages. L'on comprend ce que ce personnage veut dire, car le dessin est très... parlant. Sa voix n'est finalement qu'un instrument de musique : ce qui compte, c'est la partition. Le cochon Pic Pic s'inspire-t-il du personnage d'Elmer dans Bugs Bunny ? S.A. : Non, pas vraiment. La référence c'est plutôt Casper le fantôme pour le dessin. V.P. : Pic Pic devenait magique pour faire ses actions. Du coup, il prenait la forme d'un petit cuberdon retourné : au niveau animation, cela permettait de le faire voler, ne pas rester coincer dans des mouvements réalistes. Au départ, André, le cheval, sautait comme une grenouille, pour justement échapper à ce réalisme. S.A. : Pic Pic est d'ailleurs né sans jambes. Et comme le précisait Vincent, l'animation est tellement chronophage que nous voulions trouver des solutions simples afin de raconter une histoire. Au niveau du gag en trois ou quatre cases maximum, Hägar Dünor vous a-t-il inspirés ? S.A. : Plutôt La tribu terrible de Gordon Bess, avec notamment l'Indien Plume d'oeuf. André, dans sa série "Bibliothèque" présente Schopenhauer. C'était osé de parler d'un philosophe auteur de l'art d'avoir toujours raison... S.A. : Si André s'intéresse à la philo, autant lui donner le plus difficile... Mais en fait, je suis comme André, je n'ai jamais lu Schopenhauer (rires) Dans la discothèque de Pic Pic, on trouve ZZTop, Iggy Pop, Sid Vicious... un côté un peu radical comme le dessin, une agressivité positive... V.P. : C'est certes pointu, et l'on sent de qui ça vient, nous en l'occurrence, mais, en même temps, c'est assez éclectique puisqu'il y aussi les Bee Gees, De La Soul, des histoires racontées comme Les lettres de mon moulin lues par... Sid Vicious. S.A. : Pic Pic et André dérivent beaucoup. On sent bien qu'ils ont bien aimé la pochette qu'ils ont écouté quelques morceaux et puis ils ont pris le Larousse... enfin, les trois premières lignes. (rires) La question Sanglier fait penser aux Rubrique-à-brac de Gotlib ? S.A. : Oui, mais je pensais plutôt au Fureteur dans Spirou à l'époque : des lecteurs posaient des questions et un petit professeur y répondait : elles étaient du genre, comment fait-on du verre ? Du C'est pas sorcier avant l'heure. Les dossiers inexpliqués évoquent eux les Dingodossiers de Goscinny et du même Gotlib ? S.A. : Peut-être. C'est surtout la revue Inexpliqué qui existait au début des années 80 : les extraterrestres, l'Atlantide, le monstre du Loch Ness...Évidemment, ils revenaient toujours avec les mêmes sujets qu'ils ont vite épuisés et la revue n'a pas tenu (rires) Pourquoi vos personnages ne possèdent-ils pas de pupilles ? V.P. : Les personnages étaient conçus de la sorte en animation, et donc, les transposant en bande dessinée, nous avons voulu les garder intacts Cela procure une vivacité dans le dessin ? V.P : Le but était au départ d'enlever un maximum de détails qui pourraient surcharger le propos et de ne pas le rendre trop compliqué : avoir un maximum d'effets avec un minimum de moyens. Vous avez réalisé trois dessins animés avec ces personnages, puis ces bédés : désormais, où sont-ils et que font-ils ? S.A. : Ils n'ont plus vraiment de vie.Pic Pic et André sont toujours avec nous, car nous continuons à les dessiner pour le plaisir, mais il n'y plus vraiment de dessins avec eux depuis notre arrêt des strips en 2008. V.P. : Il y a une envie de développer une mini série, mais cela reste flou. Pour l'instant, nous sommes plutôt sur Panique au village.Ces personnages vous manquent-ils ? V.P. : Nous allons certainement les réanimer un jour... en animation. S.A. : Nous avons travaillé sur un scénario de long métrage avec Pic Pic André pendant presqu'un an, mais qui n'a pas abouti. C'est en ayant développé les strips que l'idée du long métrage s'est fait jour. Mais pour l'instant, cela n'a pas abouti. Y aurait-il une agressivité positive à la Tex Avery dans ce dessin V.P. : Je parlerais plutôt d'énergie S.A. : Nous adorions les histoires de Gaston en six cases, avec cet art de la chute de Franquin dans la dernière image et cette folie visuelle mise en place Vous assumez le côté potache de Pic Pic André dans les strips ? V.P. : Complètement. Ce sont des personnages un peu crétins, mais attachants à la fois S.A. : Nous sommes fans de Bob et Bobette, de Cowboy Henk de Kamagurka, de cet humour un peu idiot.