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L'artiste belge, disparue beaucoup trop tôt, a réussi à se faire une place timide parmi les grands noms du pop art. Evelyne Axell (1935-1972), actrice, comédienne et présentatrice sur la chaîne RTB, s'est lancée, dans les années 1960, dans le monde merveilleux du pop art. Au même moment, son époux Jean Antoine réalisait des films sur les nouvelles formes d'art à Paris, Londres ou encore New York. Axell fut élève de René Magritte qui lui apprit les secrets de la peinture. Elle a finalement choisi un tout autre chemin en préconisant les collages, le plastique et d'autres matériaux artistiques.L'exposition qui se tient au Delta est une véritable révélation. Grâce à de nombreuses oeuvres provenant de la collection de son fils Philippe Axell, jamais encore montrées au public, c'est une rétrospective sur l'ensemble de sa carrière tumultueuse qui nous est proposée, alors que celle-ci a duré à peine huit ans.Pour la première fois, une vingtaine de collages, qui correspondent à ses tout débuts, seront exposés. On reconnaît déjà les caractéristiques de son oeuvre : la femme en tant qu'être intellectuel et sexuel qui se cherche une place dans un monde dominé par l'homme. De magnifiques documents d'époque datent d'une période de liberté au cours de laquelle a éclaté la révolution sexuelle.Tout va alors très vite, particulièrement vite pour Evelyne Axell. S'ensuivent ses peintures à l'huile, comme le fameux Ice-Cream qui a plutôt fait sensation en raison de la forme explicite du cornet de glace. Parlons également de la série de toiles - Axell-Eration, Erotomobile... - qui établit un lien entre la vitesse des voitures et l'érotisme. Ironie du sort : c'est un accident de voiture qui lui coûta la vie en 1972 à Zwijnaerde.À partir de 1967, Axell commence à expérimenter de nouveaux matériaux : le Clartex, l'aluminium, le Formica, le polyester, le plexiglas, le plastique. Elle développe sa propre identité dans le monde fascinant du pop art. La femme occupe une place centrale dans son travail. À partir de photographies d'elle-même (parfois nue), elle crée une femme qui se positionne dans le monde, sûre d'elle et révélant toute sa féminité. Elle réalise le portrait d'autres femmes : la première cosmonaute, Valentina Teresjkova ; la professeure Angela Davis, militante pour le féminisme et contre le racisme ; son âme soeur Pauline Boty, l'une des fondatrices du pop art à Londres.Dans les années 1970, Evelyne Axell élargit sa réflexion et la concentre davantage sur la société et moins sur l'individu : le flower power et la protestation étudiante apparaissent dans son oeuvre Le Joli Mois de Mai (1970).Aspirant à une vision globale, elle conçoit les plans pour un Projet pour un Musée Archéologique du XXe Siècle destiné à la galerie Apollinaire à Milan. Ce résultat imaginaire est issu de fouilles de plusieurs millénaires entreprises dans le tumulus dit 'd'Axell', situé au nord-ouest du continent Eurasie, anciennement appelé Europe. Son environnement ne sera jamais réalisé, mais sur base des esquisses préalables, une reconstruction a été prévue pour l'exposition au Delta, permettant au visiteur de se rendre compte du projet de l'artiste. Par analogie avec l'Âge de bronze et l'Âge de fer, Axell a mis au point une rétrospective du futur portant sur l'Âge du Plastique. Le projet est un exemple précoce d'installation artistique, au sein de laquelle une place était réservée à une momie plastifiée de l'artiste elle-même.En 1972, Evelyne Axell crée La Pelouse. Celle-ci ressemble à une vraie pelouse, réalisée à partir de fausse fourrure verte sur laquelle sont déposés quelques fleurs roses et un petit panneau en bois, comme on en voit dans les cimetières en attente de pierre tombale, avec les mots Ne marchez pas sur un Axell, 1972. Comme si l'artiste avait prédit sa propre mort...Ne manquez pas cette exposition, agrémentée d'oeuvres de Niki de Saint-Phalle, Jane Graverol, Martial Raysse, Pauline Boty, Andy Warhol et de bien d'autres artistes. Evelyne Axell est l'une de nos artistes les plus importantes des années 1960-70, bien qu'on ne le sache pas encore. Contrairement à Marcel Broodthaers par exemple, elle n'a pas encore bénéficié de la renommée et de la reconnaissance internationale qu'elle mérite.