...

En cinq conférences, le Pr Marc Claeys (cardiologue interventionnel, UZA, et ancien président de la Société belge de cardiologie) aborde les principales anomalies des valves cardiaques. En outre, il s'attarde également sur l'endocardite, une affection qui survient souvent dans un contexte de maladie valvulaire. Il commence par la sténose de la valve aortique. "Une valve aortique normale est une structure à trois feuillets", explique le Pr Claeys. "Sa surface est d'environ 2,5 cm2. On parle de sténose sévère de la valve aortique si la surface est inférieure à 1 cm2. La cause la plus fréquente est la dégénérescence valvulaire, c'est-à-dire l'usure de la valve liée à l'âge: il se produit une calcification des feuillets de la valve, qui deviennent rigides et s'ouvrent donc moins facilement." Des causes moins fréquentes sont les suivantes: · Un rhumatisme articulaire aigu ; · Une valvulopathie bicuspide: une malformation congénitale relativement fréquente où deux feuillets de la valve fusionnent, créant une valve bicuspide plutôt qu'une valve tricuspide. Une valve bicuspide est beaucoup plus sujette à l'usure qu'une valve tricuspide. Par conséquent, la sténose peut apparaître déjà entre 30 et 50 ans. En raison de la sténose de la valve aortique, le ventricule gauche doit générer des pressions beaucoup plus élevées pour éjecter le sang dans l'aorte. Par conséquent, la pression dans le ventricule gauche est souvent beaucoup plus élevée que dans l'aorte. Alors que le gradient de pression entre le ventricule gauche et l'aorte n'est normalement que de quelques mm Hg, un gradient de pression de plusieurs dizaines de mm Hg se développe en cas de sténose de la valve aortique, qui peut être mesuré directement lors d'un cathétérisme cardiaque. Ce gradient résulte non seulement d'une augmentation de la pression dans le ventricule, mais aussi d'une diminution de la pression dans l'aorte. En raison de l'augmentation des pressions dans le ventricule gauche, des turbulences se produisent dans l'éjection du sang pendant la systole, ce qui donne lieu au souffle systolique typique à l'auscultation cardiaque. En cas de sténose de la valve aortique de plus longue durée, le coeur gauche s'hypertrophiera parce qu'il devra continuellement créer des pressions accrues. Par conséquent, au fil du temps, les patients développent des symptômes évoquant un début d'insuffisance cardiaque gauche, c'est-à-dire un essoufflement lors d'efforts de plus en plus légers. La dyspnée est due à une régression de la fonction diastolique. Le patient peut également souffrir d'une sensation d'oppression thoracique (angor), même en l'absence de maladie coronarienne. Le mécanisme sous-jacent est un besoin accru d'oxygène de la part du ventricule gauche hypertrophié, tandis que la diminution de la pression dans l'aorte entraîne une légère baisse de la perfusion coronarienne. En cas de sténose aortique sévère, les patients peuvent présenter une syncope durant un effort parce que la pression artérielle n'augmente pas suffisamment en raison de l'éjection laborieuse du sang depuis le coeur gauche. "Les patients peuvent parfois rester asymptomatiques pendant très longtemps, même s'ils souffrent d'une sténose sévère de la valve aortique", relève Marc Claeys. "D'un certain point de vue, cela est bénéfique pour le patient car tant qu'il n'y a pas de symptômes, il n'est pas nécessaire de procéder à des interventions majeures. Mais il est important de se rendre compte que si le patient présente des symptômes à un moment donné, la situation peut rapidement s'aggraver. Il faut alors décider d'intervenir sans délai sur la valve aortique. Pour les soins au niveau de la première ligne, cela signifie qu'il est important d'ausculter régulièrement le coeur des patients pour vérifier qu'ils ne développent pas de souffle systolique, précisément parce que cela n'est pas nécessairement associé à des symptômes dans une phase initiale." La sténose de la valve aortique peut être diagnostiquée assez facilement à l'échocardiographie. Cet examen permet d'évaluer le degré de calcification de la valve, la surface de la valve et le débit à travers la valve. Avec le débit, il est possible de calculer le gradient de pression entre le ventricule gauche et l'aorte. Il n'existe actuellement aucun médicament pour traiter la sténose de la valve aortique. Le seul traitement possible est l'ablation de la valve aortique. L'implantation d'une valve mécanique dans l'aorte, par le biais d'une opération à coeur ouvert, constitue donc une première option. La mise en place d'une valve mécanique nécessite une anticoagulation stricte. Et le Pr Claeys de commenter: "Seule l'anticoagulation 'classique' avec des antagonistes de la vitamine K peut être utilisée ici. Les nouveaux anticoagulants n'entrent pas en ligne de compte car les études ont montré qu'ils provoquaient trop de thromboses." Le grand avantage d'une valve mécanique est qu'elle dure toute la vie. C'est pourquoi elle est posée chez des patients relativement jeunes, de moins de 65 ans. L'implantation d'une valve biologique (matériel bovin ou porcin) est également possible, toujours par le biais d'une opération à coeur ouvert. Une expérience de plusieurs années a été acquise avec cette technique. L'anticoagulation n'est pas nécessaire si le rythme cardiaque est sinusal. Toutefois, les anticoagulants sont classiquement administrés pendant les trois premiers mois suivant l'intervention, puis remplacés par de l'aspirine. L'inconvénient est que la durée de vie d'une valve biologique est plus courte que celle d'une valve mécanique: l'usure survient après 10 à 15 ans, ce qui peut entraîner une sténose ou une fuite. La population cible est constituée de patients âgés de plus de 65 ans. La troisième option a fait l'objet de beaucoup d'attention ces dernières années: la pose percutanée d'une valve cardiaque ou TAVI (transcatheter aortic valve implantation). Il s'agit là encore d'une valve biologique, ce qui implique que l'anticoagulation peut être abandonnée et que l'aspirine - parfois associée temporairement au clopidogrel - suffit. Par l'aine, un cathéter est introduit à partir de l'artère fémorale jusque dans l'aorte. De là, un fil est passé à travers la valve aortique. Un ballonnet est poussé sur ce fil et gonflé afin d'ouvrir légèrement la sténose et de faire de la place pour un stent contenant la nouvelle valve. L'ancienne valve est plaquée contre la paroi de l'aorte par le stent. La nouvelle valve fonctionne à l'intérieur de ce stent. Cette technique était autrefois pratiquée sous anesthésie générale, mais se fait depuis peu sous sédation. Cela améliore le confort du patient et réduit la durée de l'intervention, ce qui rend le traitement de moins en moins invasif. "Ici aussi, nous devons tenir compte de l'usure de la valve", explique le Pr Claeys. "Nous n'avons qu'une dizaine d'années d'expérience avec cette technique, mais l'usure ne semble pas trop importante. L'implantation percutanée est principalement utilisée pour les patients chez qui le risque opératoire associé à la chirurgie à coeur ouvert est jugé trop élevé. Ces dernières années, le seuil de risque opératoire à partir duquel l'implantation percutanée est privilégiée a été abaissé: les patients présentant un risque modérément accru sont désormais également éligibles parce que les résultats sont très bons." Chez environ 10% des patients traités par la technique percutanée, la mise en place d'un pacemaker s'avère nécessaire et ce, parce que la valve et le stent exercent parfois une pression sur le tissu de conduction du coeur. Chez les patients présentant des anomalies préexistantes du tissu de conduction, une bradycardie prononcée peut en résulter. Une autre complication est liée à la calcification prononcée de la valve aortique d'origine, qui empêche la nouvelle valve de se déployer parfaitement et provoque une petite fuite. Des solutions à ce problème sont en cours de développement. Dans l'ensemble, l'implantation percutanée donne des résultats aussi bons que le traitement chirurgical, voire meilleurs dans certains groupes de patients. Actuellement, le remboursement est prévu pour les patients qui présentent un risque chirurgical fortement accru.