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Ce qui frappe très vite dans l'ouvrage c'est cette position, géographiquement et politiquement parlant, du comté de Flandre, coincé entre l'Angleterre d'un point de vue commercial et la France au niveau politique. C'est encore le cas de la Belgique aujourd'hui en fait? Il est vrai qu'il existe des parallèles avec aujourd'hui. Et le Comté de Flandre se révèle primordial à l'époque, au point que certains l'interprètent à leur manière aujourd'hui: d'un côté en Flandre, cela semble convenir à certains flamingants, d'autres me disent que c'est un livre belgicain. Mais on peut aimer l'histoire de Flandre sans être flamingant. Je suis belge, flamand, européen, moitié français, moitié belge. Mais il est vrai que l'histoire de Flandre est passionnante, et sans elle, je n'aurais pu écrire ce livre sur la Bourgogne C'est cette alliance flamando-bourguignonne qui va mettre à jour un nouvel état. C'est important et assez peu mis en valeur: bien sûr, le côté Game of thrones est passionnant, mais il y a surtout cette évolution géopolitique extrêmement importante, tout cela conjugué à une révolution artistique: ce triumvirat m'a permis d'écrire ce livre. Le creuset de la Belgique est déjà présent, puisqu'à la fin du livre vous citez "le territoire belge" que l'on nomme ainsi à l'époque. Dire que la Belgique est une invention serait exagéré... Tout ce que l'on peut affirmer, c'est que les ducs ont créé cet état dont faisaient partie également les Pays-Bas qui, un siècle plus tard, vont s'en détacher. Pour notre part, nous nous retrouvons ensuite écrasés par l'Espagne puis l'Autriche: mais nous n'existons que grâce aux ducs de Bourgogne. La Belgique n'est pas une invention bourguignonne, mais sans eux il n'y aurait pas eu de Belgique. Les Plats Pays, comme je les appelle, sont leur véritable invention ; sans eux, la Flandre serait restée possession française. Lorsque le duc de Bourgogne se marie avec Marguerite de Flandre, ce n'est pas pour ses beaux yeux, même si cela deviendra un beau mariage. Mais c'est que tout le monde voulait se marier avec la plus riche héritière d'Europe vu le boom que connaît son comté à l'époque. Si la Flandre est une invention belge, les plats pays sont une invention bourguignonne Comme aujourd'hui, la "vache à lait" flamande du Duché de Bourgogne souhaite que l'on s'adresse à elle dans sa langue de l'époque à savoir le thiois, l'ancêtre du flamand? Un élément en parfaite adéquation avec l'actualité. Mathieu Michel, secrétaire d'État, ne parle pas un mot de néerlandais, ce qui amène de l'eau au moulin des flamingants... A l'époque, Jean Sans Peur se réfugie en Flandre, qui l'accueille, l'aide et lui demande de parler sa langue. Et d'ailleurs son père, Philippe le Hardi, l'avait déjà pressenti et bien compris en donnant un précepteur flamand à son fils: Baudouin de la Nieppe On ne connaîtra jamais le niveau de néerlandais de Jean Sans Peur: peut-être semblable à celui du roi des Belges pendant quelques générations. J'espère que c'était mieux! (il sourit) Au moins, les Ducs essayaient-ils de parler:il le fallait, car à l'époque la Flandre était trop riche et puissante. Il convenait de la caresser dans le sens du poil ; parler la langue était une bonne manière. Chaque homme politique belge devrait aujourd'hui pouvoir parler au moins un peu la langue de l'autre.