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En 35 épisodes, Olivier Nakache et Eric Toledano (les réalisateurs de Les Intouchables) ont conçu, en adaptant une production au départ israélienne, une série formidable qui met en scène un psy et ses patients dans les jours et les semaines qui suivent les attentats du Bataclan, au cours de séances réparties du lundi au jeudi: un flic présent lors des attentats, une jeune médecin qui fit face à l'afflux des victimes, un couple en crise, une adolescente sportive défilent chez Philippe Dayan, psychanalyste sur lequel la caméra s'attarde en début et fin de séance, le patient pas encore arrivé ou déjà parti. Des épisodes de 25 minutes à prescrire par deux (ce qui fait une séance plus ou moins normale) pour ne pas en perdre une miette. Car évidemment, imaginées en face à face, les scènes se résument à un jeu de ping-pong verbal avec plans plutôt américains et quelques autres plus larges du cabinet, histoire de reprendre sa respiration (les réalisateurs successifs en sont Éric Toledano, Olivier Nakache, mais aussi Pierre Salvadori, Nicolas Pariser et Mathieu Vadepied. Ces séances (comme au cinéma...), chacune d'elle constituant un épisode portant le nom du ou des patients - Camille, Léonora et Damien... - commence souvent d'une façon qui peut paraître anodine: le discours du patient faisant écran ou plutôt paravent, puisque l'on voit la silhouette du vrai sujet se dessiner au travers. Puis vient la phase où le masque tombe, la résistance cède, et sous les mains expertes, enfin le discours, du thérapeute l'analysé se déshabille se met à nu et le traumatisme se déploie: souvent, l'événement terriblement tragique et post-traumatique du 13 novembre sert d'élément déclencheur à la mise au jour de traumatismes personnels enfouis bien plus profondément encore. Ceci non sans quelques retournements et coups de théâtre dans une joute fascinante où le non-verbal, la gestuelle et l'expression des visages prend une place importante (notamment dans le cas d'Ariane, la jeune chirurgienne, évidemment tombée amoureuse de son psy). Les interprétations sont remarquables, notamment Ariane justement interprétée par Mélanie Thierry, Reda Kateb (Adel, le policier au départ dur à cuire) et bien sûr Frédéric Pierrot, un psychanalyste à l'air un peu lunaire et dont le visage offre en effet une sorte de miroir à ses patients. Lequel psy s'en va à son tour voir une autre le vendredi, campée par une Carole Bouquet impériale: ses yeux de chat, son air félin énigmatique semblent soudain réduire le thérapeute tout-puissant à l'état de petite souris avec laquelle Esther s'amuserait. Certainement, les séances les plus jouissives de la série, qui tourne au film de capes et d'épées verbal entre ses deux fines lames de la thérapie. Séances qui mettent en lumière les qualités de comédienne que l'on connaissait de Carole Bouquet, de comédien de Frédéric Pierrot, acteur d'âge mûr. Il est à l'image de la psychanalyse en son temps: une véritable découverte!