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Les IPP sont des traitements fréquemment prescrits contre les problèmes de reflux, mais qui se prêtent surtout à un usage chronique parce qu'ils n'atteignent leur efficacité maximale qu'après trois à quatre jours. Certains patients ne souffrent toutefois que de plaintes intermittentes - par exemple une fois par semaine - et sont donc plutôt candidats à un traitement à la demande, qui pourra reposer p.ex. sur les antiacides classiques (à la durée d'action très limitée) ou sur des médicaments qui forment une couche de mousse sur le contenu de l'estomac pour l'empêcher de refluer dans l'oesophage. Ces traitements ne permettent cependant pas d'offrir une protection directe à la muqueuse oesophagienne. Il existe par ailleurs un important groupe de patients victimes de problèmes de reflux fréquents qui ne répondent pas suffisamment aux IPP et souffrent de symptômes persistants.Les éventuels effets secondaires néfastes des IPP en cas d'usage chronique suscitent aussi de plus en plus d'inquiétudes. " Largement sans raison, à mon avis ", commente le Pr Jan Tack (service de gastroentérologie, UZ Leuven). " Correctement utilisés, ces produits peuvent être administrés en toute sécurité... mais certains patients sont malgré tout demandeurs d'une alternative. "Il existe actuellement dans le commerce deux produits en vente libre distincts mais relativement similaires pour le traitement du reflux intermittent, qui exercent une action locale directement dans l'oesophage. Ils contiennent un conglomérat d'acide hyaluronique, de sulfate de chondroïtine et d'hy-droxyde d'aluminium - les deux premiers pour assurer l'adhésion à la paroi de l'oesophage et protéger la muqueuse, le troisième pour neutraliser l'acidité gastrique - et se prennent en trois à quatre doses quotidiennes. Le Pr Tack et son équipe ont décidé d'investiguer quels résultats il est possible d'obtenir avec ce type de préparations." Nous voulons voir non seulement dans quelle mesure elles sont efficaces, mais aussi et surtout où exactement se concentre leur action ", explique l'expert louvaniste. " L'action neutralisante de l'hydroxyde d'aluminium est bien documentée, mais nous voudrions savoir si la combinaison des trois molécules a un effet protecteur et curatif. Améliore-t-elle par exemple la résistance de la muqueuse ? "Chez les personnes qui souffrent de reflux, la muqueuse oesophagienne présente en effet une perméabilité accrue à cause d'une dilatation anormale des espaces intercellulaires (c'est le concept des dilated intercellular spaces ou DIC, qui a pu être mis en relation avec le reflux dans les années '90). De ce fait, l'acidité pénètre plus facilement dans la paroi au départ de la lumière de l'oesophage pour y provoquer une stimulation des nerfs. S'il s'avère que la préparation investiguée est capable de rétablir l'état normal des espaces intercellulaires, on pourrait obtenir en sus de l'effet symptomatique aigu une action cicatrisante à plus long terme, le résultat espéré étant que les (brefs) épisodes de reflux deviennent progressivement moins fréquents. " C'est un principe important d'un point de vue scientifique, mais aussi très attrayant sur le plan clinique ", souligne le Pr Tack. " Lorsque les IPP ont fait leur apparition sur le marché, il y a une vingtaine d'années, on croyait qu'ils allaient être efficaces chez tous les patients souffrant de reflux... mais certains n'y répondent pas bien. Et puis il y a ce groupe que je mentionnais plus haut, qui a idéalement besoin d'un traitement à la demande. Je suis certain que la triple préparation peut se faire une place dans la pratique clinique ; nos travaux devront établir quels patients sont les meilleurs candidats et quelle est l'ampleur de l'effet. " Les personnes participant à son étude en double aveugle recevront le traitement actif pendant un mois et un placebo pendant un mois, et seront donc leurs propres contrôles.