En RDC, ainsi que dans la plupart des pays en conditions de ressources limitées, la césarienne est de loin l'intervention chirurgicale la plus pratiquée, explique le Dr Christian de Clippele. Entre 5 et 15% des grossesses se terminent par une césarienne. Celle-ci est donc largement banalisée, mais ce n'est malheureusement pas pour autant qu'elle est correctement réalisée. Sur le continent africain, près d'une femme sur 200 décède après avoir accouché par césarienne, précise Louvain Coopération.

Plusieurs facteurs sont en cause dont notamment " une méconnaissance des indications à pratiquer une césarienne, une méconnaissance de la technique, ainsi qu'une certaine acceptation, voire résignation, de la part des soignants, face à l'important taux de décès ou de morbidité sur césarienne vus comme étant inévitables", témoigne le Dr de Clippele.

Les césariennes sont souvent mal pratiquées

En RDC, les généralistes et certaines infirmières pratiquent la césarienne, mais ne sont pas forcément aptes à la réaliser.

Une anecdote a d'ailleurs profondément choqué le chirurgien: "Là où je travaillais, il y avait deux salles d'opération, une première salle pour les grandes interventions et une deuxième pour les petites et moyennes interventions. Lors d'une de mes opérations en salle 1 alors qu'il y avait six personnes centrées sur mon travail, nous entendons qu'il y a une intervention de césarienne urgente à réaliser. La parturiente est mise en salle 2, aucun médecin ne quitte la salle 1 et ce sont des stagiaires qui vont réaliser la césarienne, seuls. Cette opération est si fréquente et banalisée qu'on en perd la notion qu'il y a une femme, un enfant et tout un ménage qui dépend souvent de cette dernière. C'est à ce moment-là que j'ai décidé de rédiger ce manuel."

De manière générale, les techniques d'accouchement se sont améliorées partout dans le monde. Il y a cependant, aujourd'hui encore, tant en RDC que dans de nombreux autres pays, une tendance à faire aussi trop de césariennes, affirme le chirurgien. " Je pense que dans ces régions, la césarienne est parfois trop vite pratiquée et par contre à d'autres endroits trop peu. En tout cas, elle est souvent mal réalisée."

De nombreux petits hôpitaux ont été construits dans la région du Kivu en RDC mais d'un point de vue santé publique ils sont en surnombre. Leur manque de ressources fait que les césariennes y sont souvent réalisées dans des conditions épouvantables . "Il est évident qu'aujourd'hui, si on ne dispose pas du minimum requis au niveau du matériel ou des ressources humaines, la césarienne n'est pas envisageable."

à ce sujet, le chirurgien se rappelle d'un épisode qui n'est selon lui plus acceptable aujourd'hui: " à 15 km de l'hôpital où je travaillais, le personnel soignant était en train de réaliser une césarienne sur une table d'examen qui ressemblait à une grande table de cuisine, avec une stérilisation catastrophique." "Pour sauver une ou deux femmes nécessitant une césarienne urgente, on va provoquer par manque de moyens une surmortalité ou surmorbidité chez des dizaines de personnes qui développeront par exemple une infection grave que ça soit une hépatite, le HIV, ou une autre infection", poursuit-il. "Dans ce cas, il est préférable d'envoyer la parturiente dans un autre centre, même si les routes sont mauvaises, quitte à accepter qu'il y ait un décès, pour en éviter de nombreux autres, et ceci dans une optique de santé publique."

Les grandes causes de césariennes urgentes

Une des plus grandes causes d'intervention de césarienne, selon le Dr Mukwege qui a signé la préface , est la dystocie foeto-pelvienne . "Beaucoup de femmes en RDC qui ont souffert de dénutrition au cours de leur enfance, développent cette malformation", poursuit le Dr de Clippele. "Le bassin, trop petit par rapport à la tête du bébé entraîne une impossibilité d'accouchement par voies basse, avec risque de graves lésions tant pour le foetus que pour la mère."

Mais Il y a d'autres raisons qui expliquent le recours à la césarienne. De nombreuses femmes n'ont pas été suivies pendant leur grossesse et souffrent par exemple d'hypertension gravidique. Il y a aussi celles qui travaillent durement de nombreuses heures dans les champs jusqu'à terme. Et certaines arrivent avec des contractions prématurées sources parfois de césariennes urgentes. " Il y a énormément de pathologies obstétricales de toutes sortes car il y a beaucoup de grossesses. Même ce qui est rare chez nous en Europe, devient courant là-bas", ajoute le chirurgien .

L'acceptation culturelle

En général, en RDC, la mère et sa communauté vivent mal la césarienne nous confie le Dr de Clippele. Mais il y a un consensus tacite de la population pour l'accepter, car elle comprend souvent qu'il n'y a pas d'autres solutions pour sauver la mère et le bébé. Pourtant, la femme césarisée fera tout pour ne pas subir une nouvelle césarienne. "C'est une raison de plus pour avoir une très bonne technique chirurgicale, afin de lutter contre les complications post césariennes telles que la rupture utérine lors d'une prochaine grossesse", précise-t-il.

Et l'importance du respect de l'avis du couple est primordiale. L'ancien expert santé a toujours été à l'écoute: "Il m'est arrivé en tant que jeune chirurgien d'opérer une parturiente qui risquait une rupture utérine à la prochaine grossesse si je ne procédais pas à une ligature des trompes. Mais le médecin directeur de l'hôpital, m'a gentiment dit que si je pratiquais cette stérilisation, j'allais au-devant de gros ennuis. J'ai compris à ce moment que pour une jeune femme, se savoir stérile était pire qu' une complication grave, même une rupture utérine, au risque de la vie", raconte-t-il. "Auparavant le personnel médical était très paternaliste et décidait de ce qu'il pensait le mieux pour ses patient(e)s. Il y a heureusement aujourd'hui un changement de mentalité, dans la bonne direction." Le désir profond du couple est systématiquement respecté après que la situation médicale lui ait clairement été expliquée.

https://www.louvaincooperation.org/sites/default/files/2020-10/Cesarienne_WEB_FR_2020_OK.pdf

En RDC, ainsi que dans la plupart des pays en conditions de ressources limitées, la césarienne est de loin l'intervention chirurgicale la plus pratiquée, explique le Dr Christian de Clippele. Entre 5 et 15% des grossesses se terminent par une césarienne. Celle-ci est donc largement banalisée, mais ce n'est malheureusement pas pour autant qu'elle est correctement réalisée. Sur le continent africain, près d'une femme sur 200 décède après avoir accouché par césarienne, précise Louvain Coopération. Plusieurs facteurs sont en cause dont notamment " une méconnaissance des indications à pratiquer une césarienne, une méconnaissance de la technique, ainsi qu'une certaine acceptation, voire résignation, de la part des soignants, face à l'important taux de décès ou de morbidité sur césarienne vus comme étant inévitables", témoigne le Dr de Clippele. En RDC, les généralistes et certaines infirmières pratiquent la césarienne, mais ne sont pas forcément aptes à la réaliser. Une anecdote a d'ailleurs profondément choqué le chirurgien: "Là où je travaillais, il y avait deux salles d'opération, une première salle pour les grandes interventions et une deuxième pour les petites et moyennes interventions. Lors d'une de mes opérations en salle 1 alors qu'il y avait six personnes centrées sur mon travail, nous entendons qu'il y a une intervention de césarienne urgente à réaliser. La parturiente est mise en salle 2, aucun médecin ne quitte la salle 1 et ce sont des stagiaires qui vont réaliser la césarienne, seuls. Cette opération est si fréquente et banalisée qu'on en perd la notion qu'il y a une femme, un enfant et tout un ménage qui dépend souvent de cette dernière. C'est à ce moment-là que j'ai décidé de rédiger ce manuel."De manière générale, les techniques d'accouchement se sont améliorées partout dans le monde. Il y a cependant, aujourd'hui encore, tant en RDC que dans de nombreux autres pays, une tendance à faire aussi trop de césariennes, affirme le chirurgien. " Je pense que dans ces régions, la césarienne est parfois trop vite pratiquée et par contre à d'autres endroits trop peu. En tout cas, elle est souvent mal réalisée." De nombreux petits hôpitaux ont été construits dans la région du Kivu en RDC mais d'un point de vue santé publique ils sont en surnombre. Leur manque de ressources fait que les césariennes y sont souvent réalisées dans des conditions épouvantables . "Il est évident qu'aujourd'hui, si on ne dispose pas du minimum requis au niveau du matériel ou des ressources humaines, la césarienne n'est pas envisageable." à ce sujet, le chirurgien se rappelle d'un épisode qui n'est selon lui plus acceptable aujourd'hui: " à 15 km de l'hôpital où je travaillais, le personnel soignant était en train de réaliser une césarienne sur une table d'examen qui ressemblait à une grande table de cuisine, avec une stérilisation catastrophique." "Pour sauver une ou deux femmes nécessitant une césarienne urgente, on va provoquer par manque de moyens une surmortalité ou surmorbidité chez des dizaines de personnes qui développeront par exemple une infection grave que ça soit une hépatite, le HIV, ou une autre infection", poursuit-il. "Dans ce cas, il est préférable d'envoyer la parturiente dans un autre centre, même si les routes sont mauvaises, quitte à accepter qu'il y ait un décès, pour en éviter de nombreux autres, et ceci dans une optique de santé publique."