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Le comité de concertation a acté le principe, discuté depuis des mois maintenant, de la vaccination obligatoire du personnel médical et soignant. Le projet de loi de Frank Vandenbroucke arrive donc à point nommé même s'il ne fera pas l'unanimité parmi le personnel de soins. La conséquence est grave puisque ce personnel perdrait son agrément soit le droit d'exercer son métier. Il s'agit d'une longue liste dans laquelle on retrouve les médecins, infirmiers, ambulanciers, secouristes, pharmaciens... Pour le ministre Vandenbroucke, ceci constituerait un "signal fort" qu'il reste peu de temps aux professionnels de soins pour exercer leur profession. Le ministre espère ainsi encourager les soignants au sens large à aller se faire vacciner volontairement. "Une grande partie de ces personnes est déjà vaccinée. Mais c'est important que tout le monde le fasse, pour se protéger soi-même et protéger les patients."Les Régions seront chargées de régler le sort du personnel non-soignant qui travaillent dans les hôpitaux et maisons de repos. "Nous espérons que ce soit voté juste avant Noël ou tout début 2022. Ensuite il y aurait bien sur une période transitoire", précise le cabinet Vandenbroucke. "L'idée c'est donc bien qu'il n'y ait plus aucun soignant en contact avec des patients qui ne soit pas vacciné."Qu'en pense-t-on dans les hôpitaux? Les Cliniques universitaires Saint-Luc - un des plus grand hôpital francophone - vont dans ce sens. Le Directeur médical, le Pr Jean-Louis Vanoverschelde souligne en effet que "la situation actuelle dans les hôpitaux le démontre encore: nous devons tout faire pour limiter au maximum le risque de propagation du virus au sein de l'hôpital". "Cela passe par la vaccination obligatoire des soignants que nous appelons de nos voeux, nous l'avons déjà dit. Nous ne pouvons pas nous permettre de bloquer indéfiniment des lits Covid au détriment d'autres pathologies. Nous sommes bien conscients des conséquences que cela pourrait avoir sur les pénuries actuelles - la rétention et le recrutement de personnel sont de vrais challenges - mais nous sommes également confiants: le taux de vaccination à Saint-Luc est très élevé. L'effet des pertes d'agrément éventuelles ne se fera sentir qu'à la marge."Jonathan Brauner (Le Monde des spécialistes-Cartel) précise que son syndicat de médecins "est favorable à la vaccination des professionnels de soins contre le Covid-19, à l'instar d'autres vaccins comme celui de l'hépatite B par exemple". La démarche du ministre lui paraît rationnelle. "Le bénéfice individuel et collectif de la vaccination est évident, il faut protéger les patients à risque à tout prix. Cependant, le Modes-Cartel préfère toujours la pédagogie à la menace." Les sanctions doivent donc être discutées car le secteur des soins est fragilisé, souligne le Dr Brauner. "Il nous paraît fondamental de ne pas faire des soignants un bouc émissaire alors que ces derniers sont au front et paient déjà un lourd tribut à cause de cette pandémie." Compte tenu, ajoute-t-il, du contexte sanitaire avec cette quatrième vague, et aussi "du risque majoré d'avoir des clusters dans des unités d'hospitalisation, des ressources médicales et paramédicales de plus en plus fatiguées et lassées par ces prises en charge lourde, d'une pénurie de médecins et infirmiers dans les unités Covid middle care et intensifs, d'une continuité des soins hors-covid fortement perturbée avec des unités de soins fermées, et l'efficacité prouvée des vaccins notamment en termes de transmission, il nous paraît indispensable que le personnel en contact avec des patients se fasse vacciner. En tant que patient, il va de soi qu'on se sent plus confortable si on est pris en charge par du personnel vacciné. La démarche du ministre nous paraît dès lors justifiée." Jonathan Brauner peut cependant aisément comprendre les arguments en faveur de valeurs comme la liberté individuelle. "Mais il s'agit ici d'un cadre collectif de santé publique, où rendre les institutions de soins le plus sécure possible est une priorité pour la société. Il en va de même pour la première ligne de soins en ambulatoire, toute profession confondue." Enfin, il faut également revoir la communication des experts, pouvant amener parfois de la confusion quant à la situation sur le terrain, et du politique. "On retrouve un manque de cohérence dans les décisions politiques, par exemple en ce qui concerne l'utilisation du Covid Safe Ticket. Plus de cohérence améliorera la confiance dans ces acteurs, tant les experts que le politique." Le Modes est donc favorable au projet de loi, "mais avec des politiques cohérentes et une pédagogie renforcée".