Cette semaine, le G7 se réunit pour la première fois en présentiel depuis le début de la pandémie. L'occasion d'insister, entre autres, sur le partage du surplus des vaccins des pays industrialisés via le dispositif international Covax.

Il y a du pain sur la planche. La coopération mondiale visait à distribuer deux milliards de doses d'ici la fin 2021, et un milliard de seringues dans 190 pays. Mais au 31 mai, Covax n'avait livré que 77 millions de doses dans 127 pays. Bien moins que prévu. À la fin juin, il lui en manquera 190 millions, et ce malgré les promesses de dons de vaccins. "Pour arriver à vacciner 30 à 40% de la population mondiale cette année, il faudra immuniser au moins 250 millions de personnes d'ici fin septembre, soit un besoin de centaines de millions de doses, bon nombre de vaccins anti-Covid nécessitant deux doses", précise le Dr Bruce Aylward, chargé du dossier Covax à l'OMS. "Nous ne sommes pas encore dans les clous. Nous n'avons pas assez de doses."

La cause de ce démarrage difficile? Covax est non seulement en concurrence avec les pays riches qui, sous la pression de leur opinion publique, ont fait fi de leurs promesses de solidarité et tentent de vacciner le maximum de monde au détriment des pays moins riches, mais il fait aussi face à des retards de livraison. 2,4 milliards de dollars supplémentaires viennent d'être récoltés par la coopération pour pallier la situation, mais il en faudrait 50 milliards, estimaient récemment les ministres des Finances des pays du G7.

L'enjeu est pourtant de taille. En Afrique, seulement 2% de la population ont reçu au moins une dose de vaccin, alors que 24% de la population mondiale est aujourd'hui vaccinée. Six pays ne vaccinent pas encore, quatre sont en Afrique: la Tanzanie, le Burundi, le Tchad et l'Erythrée.

Plusieurs organisations internationales

Les intentions de Covax sont louables, mais qui se cache derrière cette initiative? Le programme est codirigé par l'OMS, la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (Cepi) et l'Alliance du vaccin (Gavi), en partenariat avec l'Unicef pour la logistique. Si l'OMS et l'Unicef sont connus de tous, ce n'est pas le cas de la Cepi et de la Gavi.

La Cepi se définit comme "un partenariat mondial innovant entre des organisations publiques, privées, philanthropiques et de la société civile." Un consortium assez vague dont l'objectif est d'accélérer le développement de vaccins contre les maladies infectieuses émergentes et permettre un accès équitable à ces vaccins.

La Gavi est née, quant à elle, à la réunion annuelle du Forum économique mondial de Davos en 2000. Derrière elle, c'est la Fondation Bill et Melinda Gates et "un groupe de partenaires fondateurs" que l'on retrouve. L'objectif, philanthropique lui aussi, est de "de protéger les enfants les plus vulnérables dans le monde, contre les maladies infectieuses évitables par la vaccination".

Au-delà de la philanthropie

On ne peut s'empêcher de penser que d'autres composantes s'invitent dans ce débat philanthropique. Il y a effectivement des raisons purement pragmatiques qui poussent à vacciner la population mondiale: "Personne n'est en sécurité, à moins que tout le monde ne soit en sécurité", selon le slogan de Covax. La Gavi défend en outre que "pour les pays à faible revenu, qui seraient autrement incapables de se payer ces vaccins, ainsi qu'un certain nombre de pays à revenu élevé qui n'ont pas d'accords bilatéraux avec les fabricants, Covax est littéralement une bouée de sauvetage et le seul moyen viable d'avoir un accès aux vaccins Covid-19. Pour les pays les plus riches, dont certains peuvent également négocier des accords bilatéraux avec les fabricants de vaccins, il s'agit d'une police d'assurance pour protéger leurs citoyens, à la fois directement et indirectement."

Ensuite, il y a les raisons géopolitiques: il s'agit de lister les bons et les mauvais élèves de la coopération internationale. L'Europe est ainsi le principal contributeur du programme Covax, avec environ un tiers de l'ensemble des doses livrées financées par l'UE. Les États-Unis, qui ont récemment promis 80 millions de doses, mais aussi le Japon, se positionnent également comme de bons élèves de la coopération internationale. La Chine, enfin, a récemment promis dix millions de doses.

N'oublions pas, enfin, l'intérêt financier. L'OMS estime que l'introduction d'un vaccin efficace empêchera la perte de 375 milliards de dollars pour l'économie mondiale chaque mois.

AstraZeneca privilégié

Quels sont les vaccins envoyés par Covax? Il s'agit essentiellement de doses indésirables chez nous, diront les mauvaises langues, à savoir celles d'AstraZeneca. Certes, mais d'autres argumenteront, à raison, que ce sont le coût et la logistique qui font pencher la balance, et non la qualité du vaccin: le sérum d'AstraZeneca est effectivement moins coûteux et plus facile à conserver que ses concurrents Pfizer/BioNTech et Moderna, principalement utilisés dans les pays riches.

Il n'est donc pas étonnant de constater que plus d'un demi-milliard de doses du vaccin AstraZeneca ont été livrées dans le monde, en majorité aux pays pauvres, par le biais du programme Covax. Mais l'essentiel des vaccins distribués est le Covishield produit par Verity Pharmaceuticals et le Serum Institute of India (produit en Inde, donc) et non le Vaxzevria produit par AstraZeneca (produit en Europe). Ce qui explique en partie les retards rencontrés par Covax: l'Inde ayant subi une vague de contaminations sans précédent a bloqué ses exportations pour vacciner sa population en priorité.

En Afrique, plus grand destinataire du programme Covax, l'écrasante majorité des doses reçue pour l'heure est le Covishield. Seul le Rwanda a reçu des doses Pfizer (102.960). En République démocratique du Congo, où 5,928 millions de doses sont attendues via le programme Covax, 1,7 millions de doses Covishield ont été distribuées jusqu'à présent. L'Europe est également concernée par le programme Covax. Il s'agit évidemment des pays en dehors de l'Union, comme les pays des Balkans (Kosovo, Montenegro et Macédoine du Nord).

Cette semaine, le G7 se réunit pour la première fois en présentiel depuis le début de la pandémie. L'occasion d'insister, entre autres, sur le partage du surplus des vaccins des pays industrialisés via le dispositif international Covax. Il y a du pain sur la planche. La coopération mondiale visait à distribuer deux milliards de doses d'ici la fin 2021, et un milliard de seringues dans 190 pays. Mais au 31 mai, Covax n'avait livré que 77 millions de doses dans 127 pays. Bien moins que prévu. À la fin juin, il lui en manquera 190 millions, et ce malgré les promesses de dons de vaccins. "Pour arriver à vacciner 30 à 40% de la population mondiale cette année, il faudra immuniser au moins 250 millions de personnes d'ici fin septembre, soit un besoin de centaines de millions de doses, bon nombre de vaccins anti-Covid nécessitant deux doses", précise le Dr Bruce Aylward, chargé du dossier Covax à l'OMS. "Nous ne sommes pas encore dans les clous. Nous n'avons pas assez de doses."La cause de ce démarrage difficile? Covax est non seulement en concurrence avec les pays riches qui, sous la pression de leur opinion publique, ont fait fi de leurs promesses de solidarité et tentent de vacciner le maximum de monde au détriment des pays moins riches, mais il fait aussi face à des retards de livraison. 2,4 milliards de dollars supplémentaires viennent d'être récoltés par la coopération pour pallier la situation, mais il en faudrait 50 milliards, estimaient récemment les ministres des Finances des pays du G7. L'enjeu est pourtant de taille. En Afrique, seulement 2% de la population ont reçu au moins une dose de vaccin, alors que 24% de la population mondiale est aujourd'hui vaccinée. Six pays ne vaccinent pas encore, quatre sont en Afrique: la Tanzanie, le Burundi, le Tchad et l'Erythrée. Les intentions de Covax sont louables, mais qui se cache derrière cette initiative? Le programme est codirigé par l'OMS, la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (Cepi) et l'Alliance du vaccin (Gavi), en partenariat avec l'Unicef pour la logistique. Si l'OMS et l'Unicef sont connus de tous, ce n'est pas le cas de la Cepi et de la Gavi. La Cepi se définit comme "un partenariat mondial innovant entre des organisations publiques, privées, philanthropiques et de la société civile." Un consortium assez vague dont l'objectif est d'accélérer le développement de vaccins contre les maladies infectieuses émergentes et permettre un accès équitable à ces vaccins. La Gavi est née, quant à elle, à la réunion annuelle du Forum économique mondial de Davos en 2000. Derrière elle, c'est la Fondation Bill et Melinda Gates et "un groupe de partenaires fondateurs" que l'on retrouve. L'objectif, philanthropique lui aussi, est de "de protéger les enfants les plus vulnérables dans le monde, contre les maladies infectieuses évitables par la vaccination". On ne peut s'empêcher de penser que d'autres composantes s'invitent dans ce débat philanthropique. Il y a effectivement des raisons purement pragmatiques qui poussent à vacciner la population mondiale: "Personne n'est en sécurité, à moins que tout le monde ne soit en sécurité", selon le slogan de Covax. La Gavi défend en outre que "pour les pays à faible revenu, qui seraient autrement incapables de se payer ces vaccins, ainsi qu'un certain nombre de pays à revenu élevé qui n'ont pas d'accords bilatéraux avec les fabricants, Covax est littéralement une bouée de sauvetage et le seul moyen viable d'avoir un accès aux vaccins Covid-19. Pour les pays les plus riches, dont certains peuvent également négocier des accords bilatéraux avec les fabricants de vaccins, il s'agit d'une police d'assurance pour protéger leurs citoyens, à la fois directement et indirectement."Ensuite, il y a les raisons géopolitiques: il s'agit de lister les bons et les mauvais élèves de la coopération internationale. L'Europe est ainsi le principal contributeur du programme Covax, avec environ un tiers de l'ensemble des doses livrées financées par l'UE. Les États-Unis, qui ont récemment promis 80 millions de doses, mais aussi le Japon, se positionnent également comme de bons élèves de la coopération internationale. La Chine, enfin, a récemment promis dix millions de doses. N'oublions pas, enfin, l'intérêt financier. L'OMS estime que l'introduction d'un vaccin efficace empêchera la perte de 375 milliards de dollars pour l'économie mondiale chaque mois. Quels sont les vaccins envoyés par Covax? Il s'agit essentiellement de doses indésirables chez nous, diront les mauvaises langues, à savoir celles d'AstraZeneca. Certes, mais d'autres argumenteront, à raison, que ce sont le coût et la logistique qui font pencher la balance, et non la qualité du vaccin: le sérum d'AstraZeneca est effectivement moins coûteux et plus facile à conserver que ses concurrents Pfizer/BioNTech et Moderna, principalement utilisés dans les pays riches. Il n'est donc pas étonnant de constater que plus d'un demi-milliard de doses du vaccin AstraZeneca ont été livrées dans le monde, en majorité aux pays pauvres, par le biais du programme Covax. Mais l'essentiel des vaccins distribués est le Covishield produit par Verity Pharmaceuticals et le Serum Institute of India (produit en Inde, donc) et non le Vaxzevria produit par AstraZeneca (produit en Europe). Ce qui explique en partie les retards rencontrés par Covax: l'Inde ayant subi une vague de contaminations sans précédent a bloqué ses exportations pour vacciner sa population en priorité. En Afrique, plus grand destinataire du programme Covax, l'écrasante majorité des doses reçue pour l'heure est le Covishield. Seul le Rwanda a reçu des doses Pfizer (102.960). En République démocratique du Congo, où 5,928 millions de doses sont attendues via le programme Covax, 1,7 millions de doses Covishield ont été distribuées jusqu'à présent. L'Europe est également concernée par le programme Covax. Il s'agit évidemment des pays en dehors de l'Union, comme les pays des Balkans (Kosovo, Montenegro et Macédoine du Nord).