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Faire de sa vie sexuelle une oeuvre d'art, tel est l'objectif que s'est donné l'AFPSS, une nouvelle association de sexologie. "Nous voulons mener des actions pour aider ceux qui le souhaitent à améliorer leur santé sexuelle", précise le Pr Marco Schetgen, un des membres fondateurs de l'AFPSS. "En partant d'un principe de base, à savoir que la santé c'est quelque chose de global qui n'englobe pas seulement le physique, mais aussi le psychologique, le social et, comme l'indique l'OMS depuis 1974, la santé sexuelle."L'idée n'est pas simplement d'organiser des congrès pour professionnels, il s'agit aussi d'aller vers le public pour l'informer via des conférences, les médias... et ouvrir le champ de réflexion autour de la santé sexuelle. Le tout dans une approche interdisciplinaire intégrant biologie, médecine, psychologie, sociologie, déontologie, anthropologie... L'Association, certes francophone, a une composante internationale et rassemble des sexologues exerçant au Canada, en Suisse, en France, au Luxembourg et en Belgique. Les spécialistes à l'origine de l'AFPSS sont dans l'esprit de la sexologie positive, une approche humaniste ouverte et positive de la sexualité comme expérience humaine épanouissante à explorer, à cultiver et à entretenir pour toute personne qui le souhaite, peu importe le type de sexualité. "Cette ouverture vers toute forme de sexualité est essentielle, qu'il s'agisse d'une sexualité en couple, individuelle...", estime-t-il. L'objectif de l'Association est de "favoriser la connaissance et l'application d'une sexualité positive en développant ses grands axes: oser parler de certaines normes en matière de santé sexuelle et en fonction de celles-ci, donner des recommandations spécifiques aux personnes désirant entretenir une bonne santé sexuelle ; prendre en compte la fréquence et la qualité des différents types d'activités sexuelles (avec des partenaires, avec soi-même, activité fantasmatique) ; entretenir une bonne image corporelle associée à une bonne estime de soi générale ; et créer ou maintenir l'harmonie conjugale si l'on vit sa sexualité en couple". "On part plutôt des éléments positifs", souligne Marco Schetgen. " La pathologien'est pas basique dans notre réflexion, même si elle intervient, nous parlerons des problèmes de vaginisme, d'érection... Nous voulons faire passer le messagequ'avoir une sexualité épanouie, régulière, peut apporter quelque chose à la santé au sens global du terme. En sexologie, ce qui est très important c'est la satisfaction de chaque individu et des couples. En général, les gens qui vont vers un sexologue sentent qu'il y a un problème, qu'ils pourraient améliorer leur sexualité... Cependant, pour d'autres personnes, la sexualité n'est pas quelque chose d'important dans leur vie et cela ne pose évidemment aucun problème."Le nom de l'association parle de 'promotion de la santé sexuelle'. N'est-ce pas paradoxal dans une société qu'on dit très érotisée? "Non", répond-il, "c'est d'autant plus nécessaire qu'elle est de plus en plus érotisée. Prenons l'exemple de la pornographie qui est extrêmement présente chez les jeunes parce qu'ils ont la possibilité d'entrer dans n'importe quel site porno en deux clics et pour qui c'est parfois ça l'image de la sexualité. Dans ce contexte, les gens doivent pouvoir en parler, exprimer ce qu'ils ressentent et avoir des conseils s'ils le souhaitent. C'est vraiment ça la positivé."De même, le débat genré-non genré, binaire-non binaire, rentre dans la réflexion des membres de l'Association: "Aujourd'hui, on ne peut pas l'éviter, on est dans un moment-clé. Quand vous interrogez des jeunes, vous vous rendez compte à quel point les choses ont changé: beaucoup d'ados, de jeunes adultes se disent non binaires, pour eux, les choses ne sont pas aussi simples, il y a de la féminité dans la masculinité et inversement..."A côté du grand public, l'AFPSS s'adresse aux professionnels de santé, notamment aux médecins. "Il y a 20-30 ans, on parlait relativement peu de sexualité en médecine générale. Il y a eu une forme de révolution avec le Viagra où tout à coup les gens sont venus avec des demandes. Nous étions assez démunis parce que nous n'avions pas vraiment de formation, c'est pour ça qu'avec une de mes consoeurs, nous avons créé un module de formation à la sexologie pour les médecins généralistes, donné en dernière année de Master à l'ULB à l'époque oùles études se faisaient en sept ans. C'était très apprécié par les étudiants parce que cela leur permettait au minimumde savoir où orienter, de faire un premier bilan... Notre idée est de donner plus d'outils aux médecins qui sont abordés en première ligne par leurs patients", explique-t-il. L'AFPSS propose une formation certifiante en thérapie conjugale et en sexualité positive pour les professionnels du secteur médical, médico-social, paramédical... "Au niveau du contenu, cette formation est très proche de ce qui se fait dans les universités, mais avec un côté plus pratico-pratique, avec beaucoup de séances de supervision (20h)." Le fait de former des professionnels qui répondent à des critères de qualité permet également de dresser un annuaire des thérapeutes reconnus et validés par l'Association afin que le grand public puisse s'y référer. Quant à la reconnaissance officielle de cette formation, Marco Schetgen indique que cela fait des années que l'on discute du métier de sexologue clinicien: "Une commission sous l'égide du ministre de la Santé essaie de trouver comment le faire reconnaître 'par l'Etat' de manière plus claire, dans l'idée de ce qui s'est fait pour les psychologues. Pour le moment, les idées diffèrent entre sexologues flamands et francophones: au Nord, on voudrait plutôt un titre adjoint de médecin-sexologue, psychologue-sexologue, alors qu'au Sud, on penche pour une reconnaissance du vrai titre de 'sexologue clinicien'. S'il y a deux visions, tout le monde s'accorde pour dire qu'il faut une formation sérieuse de minimum deux ans (intra ou extra-universitaire), des stages et une supervision.""Nous venons de faire reconnaître l'AFPSS en tant qu'asbl", se réjouit le Pr Schetgen, "à présent, nous devons la faire connaître au niveau international et établir un programme d'activités."