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Jusqu'à la rentrée 2022-2023, la Belgique francophone restera sous le régime du numerus clausus. Cette méthode permet à tous les étudiants ayant réussi l'examen d'admission de poursuivre leurs études. Le côté positif est que cela permet de mettre tous les étudiants sur un pied d'égalité. Il y a cependant deux bémols. D'abord, cette méthode est peu compatible avec un régime de contingentement strict, comme le nôtre, puisque cela donne régulièrement lieu à des dépassements de quotas. Subséquemment, les étudiants ayant réussi ne sont pas assurés de tous obtenir un numéro Inami permettant d'exercer. Le premier numerus clausus, qui désigne la limite fixée chaque année du nombre d'étudiants ou de professionnels admis dans la profession, date de 1997. L'objectif des gouvernements successifs, depuis lors, est de contingenter l'offre médicale afin de maintenir une offre médicale stable, mais surtout de maîtriser les coûts liés à la santé. L'idée est qu'un surplus de médecins entraînerait trop de prescriptions et donc induirait une compensation financière trop lourde pour le système de sécurité sociale. En 25 ans, aucune étude n'est venue étayer cette thèse. Depuis 2018, la Flandre est passée au numerus fixus. La Fédération Wallonie-Bruxelles lui emboîtera le pas à partir de l'année académique 2023-2024. Ce numerus fixus permettra qu'un nombre limité d'étudiants soit admis aux études de médecine, suite à la réussite d'un concours d'admission. Les avantages? Tous les étudiants qui réussiront le concours d'entrée se verront garantir l'accès à un titre professionnel particulier et à un numéro Inami, levant l'insécurité vécue par les étudiants jusque-là dans le système du numerus clausus. Les inconvénients? Aucun surplus n'est théoriquement possible. Le calcul des quotas est rigide et ne permet pas de s'adapter rapidement à tous les besoins en termes de ressources humaines exprimés par la population et le terrain. L'accord signé entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et le Fédéral montre que le monde politique a conscience de ses lacunes puisqu'il propose que des instruments soient développés par les entités fédérées pour prévenir ces problèmes. Ces instruments veilleront "à une répartition suffisante des médecins (généralistes/dentistes) sur l'ensemble du territoire afin d'éviter ou de réduire les régions qui comptent trop peu de médecins (généralistes/dentistes)". Il revient, en outre, aux entités régionales de développer les incitants nécessaires à l'installation dans les zones en pénurie. "La FWB veillera de son côté à orienter un pourcentage de ses diplômés vers l'accès aux formations conduisant au TPP de médecin généraliste de manière suffisante pour répondre à ses besoins", ajoute la note. Pour être pleinement opérant, le numerus fixus aura donc besoin de s'appuyer sur une méthode de calcul et des instruments les plus efficaces possible, le risque étant que le numerus fixus n'aggrave la situation de pénurie actuelle. Outre la fin pure et simple du contingentement, une autre solution existe: celle du numerus apertus. Prônée en France sous l'impulsion d'Emmanuel Macron, ce mécanisme est entré en vigueur en 2021 (avec un an de retard sur le planning prévu), mettant fin à 50 ans de numerus clausus - et de controverses - dans l'Hexagone. La rentrée 2021-2022 a donc entériné le passage au numerus apertus qui fixe un nombre minimum d'étudiants au lieu d'en limiter le nombre. Ce chiffre est notamment décidé par les universités, en collaboration avec les Agences régionales de santé (ARS), qui connaissent les réalités du terrain (installations de soignants, départs à la retraite, dynamique démographique). Il reste toujours un moyen sélectif à l'entrée des études de médecine. Concrètement, ce changement du numerus clausus vers le numerus apertus permettra à la France de former 13.050 médecins en plus de 2021 à 2025 par rapport à la période 2016-2020 sous numerus clausus. Le numerus apertus a tout pour plaire, mais présente au moins trois défauts. Le premier est inhérent au temps de formation des médecins: il faut en moyenne dix ans pour voir les effets d'une telle mesure sur le terrain. Le deuxième, c'est la qualité de la formation qui doit rester au moins équivalente avec un nombre supérieur d'étudiants dans les universités. Le troisième, enfin, est la qualité des stages. Un maître de stage ne peut voir son contingent d'internes passer du simple au double sans répercussion sur la qualité de l'enseignement. Il s'agit donc d'une mesure ambitieuse pour pallier une pénurie, mais qui doit être financée intelligemment.