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Depuis 2018, l'hémoglobine glyquée (HbA1c) n'est plus la seule cible de la stratégie thérapeutique proposée aux personnes atteintes de diabète de type 2. Désormais, il faut également tenir compte de leurs comorbidités cardiovasculaires et rénales. Et pour cause: ces dernières années, deux classes de médicaments ont démontré une protection à ces niveaux. "Outre leur efficacité sur la glycémie, les gliflozines (inhibiteurs SGLT-2) sont néphroprotectrices et diminuent les taux d'hospitalisation et de mortalité liés à une insuffisance cardiaque", explique le Pr Jean-Christophe Philips, chef de clinique dans le service de diabétologie du CHU Liège. "Quant aux agonistes du récepteur du glucagon-like peptide 1 ( GLP-1), ils ont un effet cardiovasculaire positif. Et ces deux classes de médicaments font perdre du poids."Par conséquent, il est recommandé de prescrire des agonistes du GLP-1 et/ou des gliflozines aux patients diabétiques - y compris en première intention - ayant un mauvais profil arthérosclérotique: antécédents d'AVC, d'incident ischémique transitoire, d'infarctus du myocarde, etc. "Face à une atteinte rénale ou de l'insuffisance cardiaque(1),les gliflozinessont à privilégier", commente le Pr Philips. "Mais sur le plan médical, l'association des deux types de molécules produit une synergie très intéressante puisqu'elle combine les trois types de protection. Malheureusement, l'Inami ne rembourse qu'un traitement à la fois..." Quant aux patients ne présentant aucune des trois comorbidités évoquées, la metformine, les sulfamidés, les gliptines et autres antidiabétiques oraux et, bien sûr, les mesures hygiénodiététiques restent des options thérapeutiques valables. Aussi bien les agonistes du GLP-1 que les gliflozines peuvent être associés à la metformine et/ou l'insuline. "Cela dit, il peut être utile d'essayer d'abord les agonistes du GLP-1 avant de passer à un traitement insulinique", estime le diabétologue. "Outre une perte de poids, une protection cardiovasculaire et la prévention des hypoglycémies, ce traitement sous forme injectable présente l'avantage d'une administration hebdomadaire (plutôt que quotidienne pour l'insuline). Pour certains patients, cela permet de retarder d'autant le passage à l'insuline qui n'est pas toujours bien vécu." Il y a toutefois des conditions de remboursement à respecter, dont une HbA1c supérieure à 7,5% et un IMC égal ou supérieur à 30 kg/m2 au moment de la première initiation. Concernant l'insulinothérapie, deux nouvelles molécules sont désormais disponibles: les insulines ultrarapides et les insulines ultralentes. Les premières se rapprochent de l'insuline humaine. En effet, leur action au bout de 15 à 60 minutes est plus significative qu'avec les autres insulines rapides. Leur demi-vie est également plus courte. L'un dans l'autre, les insulines ultrarapides permettent donc de mieux gérer les pics d'après-repas. À ce titre, elles sont indiquées pour les patients qui souffrent souvent d'hypoglycémies à distance des prises alimentaires. Quant aux insulines ultralentes, elles sont intéressantes pour prévenir les hypoglycémies nocturnes. "Elles permettent d'obtenir un plateau du taux d'insuline stable pendant au moins 24 heures, sans pic ni chute", explique le Pr Philips. "De plus, il y a une vraie souplesse dans l'horaire de l'injection ; les patients ne sont pas à une heure près." Notons que, pour le moment, ni les insulines ultrarapides ni les ultralentes n'ont pu démontrer une nette amélioration de l'HbA1c. Cela dit, en prévenant les hypoglycémies, elles améliorent la qualité de vie de certains patients, ce qui n'est pas négligeable! "Dans tous les cas, quel que soit le traitement insulinique prescrit, il est essentiel de veiller à sa titration", souligne le diabétologue. "Pour ce faire, il faut vérifier les glycémies durant les premières semaines d'une nouvelle insulinothérapie et, le cas échéant, adapter le nombre d'unités d'insuline injectées." Le passage à une (nouvelle) insuline doit toujours faire l'objet d'un point d'éducation thérapeutique. C'est l'un des grands avantages d'inscrire le patient dans un Trajet de Soins (2). Pour le médecin généraliste, ce programme présente plusieurs intérêts. D'abord, le praticien gagne du temps en confiant le gros du volet "éducation thérapeutique" à un infirmier ou une infirmière spécialisée. Ensuite, s'il garde la main sur le suivi "quotidien" d'un diabète de type 2, le Trajet de Soins lui permet d'échanger, une ou deux fois par an, avec un ou une spécialiste du diabète au sujet de la stratégie thérapeutique. "L'un des rôles du généraliste est d'ailleurs de s'assurer que le patient va à sa consultation annuelle avec ce ou cette spécialiste", rappelle le Pr Philips. "Il n'est pas question de leur "voler" leurs patients! De toute façon, avec le nombre croissant de diabétiques dans la population, nous avons besoin de la première ligne pour la gestion au long cours de cette maladie. Enfin, le bénéfice principal va aux patients puisqu'ils ont la possibilité de bénéficier de consultations chez d'autres spécialistes (para)médicaux: diététiciennes, podologues, ophtalmologues, néphrologues, etc. Ce qui permet de prévenir plus efficacement les complications du diabète."