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Les soins de santé sont en effet responsables de 7,7% du total des émissions de CO2 de notre pays, et c'est surtout l'industrie pharmaceutique qui s'y taille la part du lion. Les médicaments ont en effet déjà un long parcours derrière eux au moment où ils aboutissent dans nos officines, puisque leurs divers constituants proviennent souvent de pays voire de continents différents. Leur production consomme aussi beaucoup d'énergie, e.a. en raison de la nécessité de maintenir à une basse température constante les structures où sont fabriqués des principes actifs. Tous ces processus sont encore trop peu considérés sous l'angle de leur impact environnemental. Serait-il possible d'évoluer vers une production plus locale? De regrouper davantage de processus au même endroit? De réduire l'impact du transport? Et ne pourrions-nous pas aussi nous contenter de moins? Bien souvent, le produit final voit trop grand: de nombreux médicaments sont dosés en fonction d'un patient lambda, le plus souvent un homme d'environ 70 kg. Les femmes ou les petits calibres n'ont généralement pas besoin d'une posologie aussi élevée, mais les recherches sur la quantité de principe actif nécessaire chez une personne dont le poids est plus faible restent malheureusement peu nombreuses, de telle sorte que personne ne sait finalement quelle est la dose suffisante. Évidemment, produire des doses standards destinées à des individus standards est infiniment plus simple. Reste que, s'agissant de leurs prescriptions de médicaments, les médecins disposent tout de même déjà d'un certain nombre d'options "durables". À effet curatif identique, certains produits disponibles sur le marché des produits ont en effet un impact environnemental plus faible que d'autres. Nous savons p.ex. que certains anticorps monoclonaux sont cultivés dans des boîtes de Petri avec des cellules animales, tandis que d'autres n'ont pas besoin de matériel animal pour leur production. Les traitements contre l'asthme aussi peuvent avoir un impact climatique plus ou moins marqué, puisque certains inhalateurs reposent sur des gaz et d'autres sur des poudres sèches. La question du bien-être animal et des effets pour l'environnement devrait être prise en compte dans la prise de décision. Un projet très intéressant est actuellement en cours à l'UGent autour de l'analyse du cycle de vie des médicaments, mais les chercheurs se heurtent encore trop souvent à un manque de transparence quant à l'origine de certains produits et constituants. Leur rêve est que les médecins puissent, lorsqu'ils consultent leur logiciel de prescription, jauger d'un seul coup d'oeil l'impact environnemental de chaque médicament et en tenir compte dans leurs choix. Des avancées sont aussi possibles non seulement au niveau macro, mais littéralement à nos portes. Le réseau britannique Greener Practice (https://www.greenerpractice.co.uk) propose une série de conseils pour des soins de première ligne plus verts et plus durables au travers non seulement de l'aménagement des cabinets médicaux, mais aussi et surtout de l'accompagnement des patients vers des choix bénéfiques pour leur santé et pour le climat. Un patient dont la glycémie est à la limite de la normale retirerait probablement le même bénéfice d'une alimentation plus saine et d'une vie plus active que d'un traitement médicamenteux... et la première piste aura aussi un impact beaucoup plus positif sur l'environnement de tous et sur le bien-être du premier concerné. Plus largement, la prévention livre souvent de meilleurs résultats pour le patient et pour l'environnement. Faire davantage de déplacements à pied ou à vélo, par exemple, signifie automatiquement aussi qu'on utilise moins sa voiture, et une alimentation plus saine est souvent aussi synonyme d'une plus faible consommation de viande. Ce qui est bon pour nous l'est aussi pour la planète. Malheureusement, cette approche préventive demande aussi plus de temps et d'efforts de la part du médecin et du patient, puisque prendre une pilule quotidienne est évidemment plus simple que d'adapter son mode de vie. Nous allons toutefois devoir nous habituer à vivre autrement, et ce à bien des égards. C'est une réalité dont nos concitoyens - en particulier ceux dont le thermostat est déjà réglé sur 19 °C - sont de plus en plus nombreux à prendre conscience.