Cela fait longtemps que les perturbateurs endocriniens sont connus, et pourtant: un Belge sur deux n'a jamais entendu parler de ces substances potentiellement nocives pour la santé. Des résultats inquiétants, selon une enquête menée par les Mutualités libres auprès de 1.000 personnes et présentée lors du symposium en ligne "Quel impact des perturbateurs endocriniens sur notre santé? ".
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Les perturbateurs endocriniens (PE) sont des substances chimiques (ou des mélanges de celles-ci) qui ne sont pas produites par le corps humain. Ces substances peuvent perturber le fonctionnement de notre système hormonal et endocrinien et être nocives pour notre santé. "Ces PE peuvent provoquer des cancers, impacter la fertilité, ou encore favoriser l'autisme, une déficience intellectuelle, de l'obésité, du diabète. Ce sont juste des exemples de nombreuses pathologies dérivées des PE", détaille Sandrine Jouan, experte toxicologie au SPF Santé publique. Mais la population belge connaît-elle la fréquence de ses contacts avec ces substances potentiellement dangereuses? 48% des 1.000 personnes sondées par les Mutualités libres n'ont jamais entendu parler des perturbateurs endocriniens. On note toutefois de grandes différences régionales: la méconnaissance est effectivement bien plus grande en Flandre (62%) qu'en Wallonie (32%) et à Bruxelles (23%). Près de 60% des personnes interrogées ne sont pas conscientes que les PE peuvent provoquer des problèmes de santé ou avoir un impact négatif sur le développement des bébés, des enfants et des adolescents, qui constituent les publics les plus fragiles face aux PE. Une personne interrogée sur trois (36%) est par contre au courant de la présence de substances nocives dans les pesticides. Le fait que les emballages en plastique, les produits de soins et les jouets peuvent également contenir des perturbateurs endocriniens est moins connu. Les résultats de l'enquête confirment que de nombreuses personnes ont des habitudes quotidiennes qui pourraient accroître leur exposition aux perturbateurs endocriniens. Par exemple, 61% des personnes interrogées réchauffent leurs aliments dans un récipient en plastique, 64% ne vérifient pas si leur produit contient des substances nocives lors de l'achat de cosmétiques et 50% ne pensent pas à d'abord laver leurs vêtements neufs avant de les mettre. Des résultats qui ne surprennent pas le Greet Schoeters, professeur au département des sciences biomédicales de l'Université d'Anvers. "Beaucoup de personnes ont déjà entendu parler de bisphénol, de parabène. Mais il existe des milliers de substances potentiellement nocives. Et elles sont difficilement identifiables faute à une absence de labélisation pour le consommateur. De plus, la Commission européenne a tardé à donner une définition claire des PE (2019)."Les répondants recherchent cependant des informations sur les substances nocives: 21% d'entre eux ont déjà vérifié des informations sur les perturbateurs endocriniens et 50% ont déjà recherché des infos détaillées sur l'étiquette d'un produit chimique. D'ailleurs, la majorité des sondés est prête à changer de comportement, pour autant que cela ne demande pas d'efforts incommensurables. Le passage à des alternatives biologiques (par exemple, pour les produits de nettoyage ou les fruits et légumes) est souvent mentionné. Par exemple, 59% épluchent déjà les fruits et légumes non biologiques et 31% sont prêts à faire cet effort à l'avenir. "Il est essentiel d'informer et de sensibiliser les Belges, car aujourd'hui, ils ne sont pas suffisamment conscients des risques que représentent les perturbateurs endocriniens pour leur santé. En tant que mutualité, nous devons informer nos affiliés à ce sujet", souligne Xavier Brenez, directeur général des Mutualités libres. "Il s'agit d'une matière complexe et il est dès lors primordial que ces messages soient formulés de manière claire et compréhensible. Les prestataires de soins ont également un rôle important à jouer. Trois personnes interrogées sur quatre attendent que leurs médecins, pharmaciens ou gynécologues les informent sur les perturbateurs endocriniens.""C'est au niveau européen que tout se joue. La Belgique a un rôle à jouer et est en train de se constituer un plan ambitieux", conclut Xavier Brenez.