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Une exposition qui surfe sur la vague féminine ou féministe qui secoue notre société actuellement, et prend pour thème depuis la préhistoire jusqu'à aujourd'hui la représentation de la femme dans l'art. Répartie dans les diverses pièces de la villa et principalement au premier étage, l'exposition se décline en cinq thématiques réparties en autant d'espaces. De l'origine à évidemment la question du genre en passant par celle du nu, de la femme d'intérieur ou des portraits puis autoportraits. Mélangeant artiste d'Occident et bien sûr d'Orient puisque nous sommes à la Fondation Boghossian qui promeut les échanges entre l'Europe et Le Levant, elle entame son véritable parcours avec des moulages préhistoriques, dont la fameuse Vénus de Willendorf. Où l'on constate que dès le début de l'humanité, les artistes aiment à représenter les attributs féminins qui ont valeur symbolique ou qui sait érotique. Dans la même pièce, un tissu copte représente un buste de femme, tandis qu'une toile éthiopienne illustre la rencontre de la reine de Saba et du roi Salomon. C'est James Ensor qui introduit la thématique de femmes dans un intérieur: L'antiquaire: elle présente le portrait de son ami Paul Bueso qui propose plusieurs toiles à la vente et autant de représentations de femmes. "Cet ensemble", selon la commissaire Louma Salamé, par ailleurs directrice de la Fondation, "illustre parfaitement le fait qu'à partir de l'Antiquité, l'histoire de l'art est pensée, faite, diffusée, par des hommes pour les hommes. Et que, par conséquent, l'image de la femme est essentiellement le fait d'un produit masculin, correspondant à des stéréotypes qui ont peu évolué à travers les siècles..." Aux côtés de cette oeuvre du génie ostandais, des figures de femmes isolées et méditatives représentées par Léon De Smedt, Edgard Tytgat et bien sûr Paul Delvaux. Plus étonnant, une Jeune femme dans son intérieur délicat de Constantin Meunier qui rappelle les oeuvres d'Alfred Stevens, absent de cette expo dont le musée d'Ixelles fermé pour travaux est grand pourvoyeur d'oeuvres, avec, notamment, une peinture impressionniste de Berthe Morisot, laquelle a bien sûr pour sujet sa fille, devenue grande (Intérieur Jersey), aux côtés d'un carreau persan avec favorite et servantes daté du 17e siècle (prêtée par le Cinquantenaire) qui évoque également la dimension domestique. Détour par la salle de bain de la villa Empain, où Jan Metsys, fils de Quentin, signe une Lucrèce Borgia qui évoque pourtant Cranach. Le nu est évidemment une thématique centrale, notamment dans la chambre d'amis, où les statues d'Oscar Jespers et Constant Permeke se répondent dans des styles différents: ils entourent un dessin d'une simplicité magnifique de Matisse, intitulé Monique assoupie ; dans cet espace où l'on croise notamment Picasso, le regard se pose sur une formidable La femme aux champs tableau naturaliste et impressionniste du peu connu Isidore Vereyden, aux antipodes des canons de beauté et de l'indolence des modèles, montrant la femme au travail. Se voulant un tant soit peu chronologique, l'exposition évoque ensuite les portraits notamment photographiques de femmes signés Seydou Keita dans un noir et blanc d'une grande densité, un portrait capturé William Klein, ou une Jeune fille à l'arrêt du plasticien belge Michel François. Valérie Belin qui signe un portrait couleur d'une jeune fille noire, toujours en photographie, annonce l'irruption définitive des femmes artistes dans l'art et l'exposition. D'ailleurs, au-dehors sur la terrasse trois énormes poupées russes (oups! ) sans visages signées Irina Rasquinet se présentent en spectatrices du visiteur. Lisetta Carmi notamment aborde la question du genre de manière photographique en immortalisant les travestis romains dans les années 70. Éva Verbeeck propose deux clichés tirés d'une série de photographies sur les Américaines: un ado black et une "marines" américaine. Deux photos qui entourent Mariam, femme arabe immortalisée par l'artiste libanaise Rania Matar devant le mur qui sépare Israël et le Liban. Trois oeuvres placées devant les chaussures à talon en bronze de Sylvie Fleury et celle recouverte de punaises de Hans-Peter Feldmann. Dans une diversité d'expressions bienvenues, cette pièce propose aussi une oeuvre peinte représentant deux femmes dans un style qui rappelle Michael Borremans autant que Luc Tuymans et signée Hideko Inoue (The Cotton Gauze Scarf), un diptyque vidéo très Bill Viola de Charles Sandison (Memento Mori) et une relecture critique en vidéo par Rosalind Nashashibi et Lucy Skaer du rapport aux femmes de Gauguin. L'autoportrait ne pouvait que présenter une photographie de Cindy Sherman, qui se met en scène dans des identités multiples au sein d'une oeuvre devenue légendaire. Très belle et diverse exposition sur les femmes et qui voit émerger, au fil de son déroulement, des artistes féminines et pas seulement des représentations signées par des hommes qui en ont trop souvent fait de simples fleurs... du mâle.