...

La France et l'Allemagne en compétition autour des vaccins Sanofi-Pfizer/BioNtech, Chypre qui achète des vaccins à Israël, l'Allemagne qui commande 30 millions de doses de vaccins Pfizer supplémentaires, des proratas qui ne sont pas respectés: la presse européenne est partie dans tous les sens depuis le début de la campagne de vaccination. Pour faire taire les rumeurs, et obtenir plus de clarté et de transparence, Sandra Gallina a passé un interrogatoire devant la Commission santé du Parlement européen. "Nous demandons la transparence sur des éléments clés: le prix, les quantités, le régime de responsabilité juridique, le coût, les lieux de production, les propriétés intellectuelles (notamment pour proposer des doses dans les pays en voie de développement à coût marginal) et le nombre de doses accessibles pays par pays, semaine après semaine", résume Pascal Canfin, président de la Commission santé. "Si la négociation des contrats permet de penser qu'il n'y a aucun risque de pénurie à moyen terme, rien ne permet de dire aujourd'hui qu'il n'y a pas de risque de pénurie à court terme, soit en janvier, février et mars.""L'Union européenne (UE) a à sa disposition un portefeuille de vaccins conséquent. 2,3 milliards de doses sont prévues. Dans le lot, il y a bien sûr des vaccins prometteurs qui n'obtiendront pas la mise sur le marché européen, mais il y aura bien de quoi vacciner les 500 millions d'habitants qui composent les 27 États-membre de l'UE", rassure la négociatrice en chef de l'UE pour les contrats de vaccins anti-Covid-19. "Nous avons pour l'heure autorisé deux vaccins. Il y aura un troisième vaccin autorisé (AstraZeneca), normalement d'ici le 29 janvier prochain."Concernant les livraisons, Sandra Gallina affirme que "les laboratoires pharmaceutiques ont fournis des tableaux présentant de façon mathématique la distribution dans les États-membres. Les contrats prévoient des calendriers plus chargés à partir du mois d'avril. Certains pensaient peut-être qu'il serait possible d'acheter davantage de vaccins. Nous avons acheté tout ce qui pouvait l'être. Concernant le suivi des livraisons de vaccins, par le biais de l'ECDC, nous avons mis en place en module qui permet aux États-membres de faire rapport de l'état des lieux du nombre de vaccins utilisés et de vaccinations réalisées. Au-delà du nombre de vaccins livrés, nous aurons donc le nombre de vaccins utilisés."L'essentiel du débat s'est porté sur d'éventuels contrats nationaux supplémentaires à la négociation européenne. Sandra Gallina a martelé qu'elle n'avait pas connaissance de tels contrats. "Notre coeur de métier, c'est l'unité. Si nous commençons à nous battre à coup de contrats parallèles, cela ne peut pas fonctionner. D'après-moi, ces contrats n'existent pas. Quoi qu'il advienne, il est évident que les quantités européennes sont prioritaires. Quand bien même ces contrats bilatéraux existeraient, ils ne devraient être livrés qu'en second lieu. Pour le moment, nous avons des quantités livrées par pays, au prorata de la population. Si certains ne souhaitent pas ces quantités, il est important que tout surplus soit divisé au prorata encore une fois, dans un esprit de solidarité et d'unité. Tout retard dans la vaccination a un impact sur le tissu socio-économique, il est donc important d'avoir un nombre suffisant de doses.""Nous cherchons à éviter la compétition entre les états-européens de façon à avoir le meilleur cadre possible sur le plan financier - nous avons les meilleurs prix au monde - et sur le plan juridique", ajoute Pascal Canfin. Avant d'enfoncer le clou. "Si nous savons cela, c'est parce que les prix ont été rendus publics par erreur par Eva De Bleeker, secrétaire d'État belge chargée du budget. Cela prouve encore une fois la nécessité de la transparence car sans cette fuite, je ne pourrais pas vous dire que l'on a les meilleurs prix au monde."Pour information, les prix varient entre 1,78 euros pour le vaccin AstraZeneca et 14,88 euros (18 dollars) pour le vaccin Moderna. Le vaccin de Pfizer/BioNTech plafonne lui à 12 euros, selon le tableau tweeté par la secrétaire d'État. De nombreux eurodéputés ont également parlé de l'importance d'avoir les informations pour éviter une poussée de nationalisme vaccinal. "Je salue la démarche commune pour éviter un nationalisme vaccinal. Mais il est difficile d'expliquer la situation aux citoyens, compte tenu de la rapidité de la campagne de vaccination en Israël, dans les États du Golfe, au Royaume-Uni", souligne notamment Alexandr Vondra, eurodéputé tchèque. Premier élément de réponse: le Royaume-Uni a activé une procédure d'urgence pour autoriser le vaccin Pfizer plus vite sur ses terres. Il s'agit toutefois d'une épée de Damoclès puisqu'en cas de problème, "100% de la responsabilité incombe sur le gouvernement du Royaume-Uni et non sur le laboratoire pharmaceutique. C'est un choix que tous les États-membres auraient pu faire mais qu'aucun n'a choisi", relate Pascal Canfin. Concernant l'équilibre politique entre les pays pour le choix des vaccins, Sandra Gallina coupe court. "Quand nous nous sommes lancés dans l'aventure, il y avait plus de 165 candidats au vaccin. Les candidats choisis par les États-membres l'ont été pour des raisons scientifiques et pas pour des questions de nationalité.""S'il n'y avait pas eu de négociation européenne, il y aurait eu 27 contrats par vaccin", résume Pascal Canfin. "On aurait du nationalisme vaccinal à tout crin. On aurait eu une absence totale de solidarité et donc des prix beaucoup plus élevé pour les pays les plus pauvres de l'UE, des dates de campagne de vaccination différentes, des choix de vaccins différents et des tensions constantes. Ce cadre européen unique, qui a été construit pendant la crise, est absolument fondamental. Avoir le même cadre juridique, le même prix, les mêmes périodes de vaccination permet d'avoir un débat serein et d'éviter de contourner les protocoles sanitaires à l'instar de ce qui se fait au Royaume-Uni contre l'avis de Pfizer lui-même. C'est de la démagogie vaccinale maximum pour des raisons uniquement politiques."