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Ce retard laisse planer le risque d'un dérapage des dépenses, ce que redoutent le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (Vooruit) et d'autres membres du gouvernement démissionnaire qui souhaitent un vote encore avant les fêtes de fin d'année. Or, le budget des soins de santé est une des grosses pierres d'achoppement pour la formation du gouvernement Arizona. Le 9 décembre, lors d'une soirée d'étude organisée par le Centre Jean Gol à l'ULB, le président du MR, Georges-Louis Bouchez, s'est à nouveau étonné du poids des soins de santé, mentionnant "42 milliards d'euros" (au sens très large), en progression constante. On sait que Vooruit et Les Engagés freinent quant à des économies qui mettraient en péril, selon eux, la santé des Belges. Le contexte est préoccupant. Les dépenses de l'Inami continuent de croître fortement: elles atteignent 34,5 milliards d'euros en 2023, marquant une hausse de 11,34%. Les coûts hospitaliers (8 milliards d'euros), pharmaceutiques (7,6 milliards) et les honoraires des prestataires (10 milliards) explosent, poussés par le retour des soins non urgents post-covid et l'inflation. La Cour des comptes a alerté voici quelques semaines sur une trajectoire budgétaire intenable, malgré un excédent de 940 millions d'euros en 2023. Elle critique les prévisions budgétaires imprécises et les mécanismes de contrôle insuffisants, notamment pour les médicaments sous conventions "article 81/111". Face à cette situation, la Fédération des entreprises de Belgique (FEB) avertit que le déficit de la sécurité sociale atteindra 7,6 milliards en 2025 et plus de 14 milliards en 2029 sans réforme. La FEB appelle à responsabiliser les partenaires sociaux et à stimuler l'emploi pour soutenir le système. Pour éviter une faillite de la sécurité sociale d'ici 2030, les négociateurs de l'Arizona "doivent agir de toute urgence". Les médecins, quant à eux, viennent d'obtenir des garanties quant à l'indexation des honoraires, ce qui a poussé l'Absym à ne pas dénoncer l'accord tout en laissant ses membres se déconventionner individuellement s'ils y voient un intérêt. Pour Élise Derroitte, vice-présidente de la Mutualité chrétienne, ne pas adopter le budget 2025 de l'Inami est "irresponsable". "Alors que les besoins en soins de santé augmentent, passant de 37,8 milliards en 2024 à 39,7 milliards en 2025, cette hausse est logique: indexation des prestations, vieillissement de la population et nouvelles pratiques médicales. Le Bureau du Plan estime une croissance annuelle de 3,5% nécessaire entre 2024 et 2028 pour répondre sérieusement à ces enjeux." La Mutualité chrétienne note par ailleurs que le projet intègre déjà 216 millions d'économies, notamment dans l'industrie pharmaceutique, souvent marquée par des dérapages budgétaires, ce qui semble déranger certains opposants. "Au-delà du budget, c'est le modèle même de sécurité sociale, basé sur la concertation entre mutuelles et prestataires, qui est attaqué. Certains visent à le détricoter dans une approche autoritaire." En réponse à la FEB, Élise Derroitte rappelle que "la sécurité sociale repose sur les cotisations sociales et que limiter les stratégies d'évitement fiscal permettrait de répondre aux besoins croissants. Le Bureau du Plan souligne que la forte hausse des prestations maladie-invalidité (+2,5% par an) s'explique par l'augmentation des incapacités, un domaine où la responsabilité des employeurs est engagée".