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Présenté ce 31 mars au Festival du documentaire Millenium qui se déroule du 26 mars au 6 avril, "Ithaka - A fight to free Julian Assange" évoque la détention du lanceur d'alerte au travers des yeux de ceux qui l'attendent: son épouse Stella (qui viendra présenter le film le 31 mars), ses deux enfants et son père, John. Frappant de voir à quel point John Shipton ressemble à un Julian Assange encore plus vieilli par les épreuves. Septuagénaire fringuant, celui qui a disparu de la vie de Julian lorsqu'il avait trois ans, avant de réapparaître une fois ce dernier adulte, se révèle un militant antiguerre, également supérieurement intelligent et souffrant du syndrome d'Asperger. Dans ce film, on le voit luttant au côté de Stella, l'épouse d'Assange, multipliant les voyages en Europe et aux États-Unis afin de plaider la cause de son fils, depuis sa capture dans l'ambassade d'Équateur de Londres en 2019, jusqu'à son premier procès en extradition en 2021, extradition refusée à l'époque, mais qui le maintenait dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, notamment destinée aux terroristes ("trois suicides et un meurtre en un mois", entendons-nous soupirer le père d'Assange, au sortir de l'institution pénitentiaire). Le film de Ben Lawrence, fluide, qui alterne interviews et reportages, illustre parfaitement la détérioration de l'état mental d'Assange, dont on entend la voix, le courage, la résolution et le découragement parfois du père et de l'épouse, soutenus notamment par l'artiste chinois Ai Weiwei (qui sera présent lors du festival Millénium qui débute le 26 mars), par Edward Snowden bien entendu, par Nils Melzer (lire ci-contre) qui décrit la "condamnation" d'Assange pour l'exemple, par des anciens employés de l'ambassade d'Équateur où il s'était réfugié, et même par un ancien ambassadeur de Grande-Bretagne, Graig Murray. L'on sait aujourd'hui que Julian Assange, récompensé de 17 prix internationaux de journalisme, devrait bientôt être extradé vers les États-Unis pour y être jugé en contradiction avec le sacro-saint premier amendement ("free of speech"), comme l'explique Daniel Ellsberg, premier lanceur d'alerte qui avait révélé les Pentagon Papers concernant le Vietnam au début des années 70. Car on peut être libertarien économiquement sans défendre politiquement la liberté de parole... Le plus simple est donc de le laisser dépérir (il a fait une crise cardiaque fin 2021) dans une prison d'un vassal de confiance, en attendant patiemment que "le problème" disparaisse de lui-même...