Rencontre avec Pierre Klels, médecin généraliste ardennais, fan de hard-rock et surtout des légendaires Uriah Heep.
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À l'aube du Graspop, le festival de heavy metal qui se déroule fin de la semaine prochaine à Dessel en Campine, rencontre avec un médecin headbanger, mais surtout fan absolu d'un groupe qu'il a vu à plus d'une cinquantaine de reprises et qui se produira au festival samedi prochain: Uriah Heep. Ce pacifique et sympathique généraliste de Libramont de 66 ans évoque son autre passion pour ce groupe de légende désormais vétéran, trop sous-estimé à son goût. Chez Pierre Klels, la passion pour ces précurseurs du hard-rock n'est pas près de s'effriter... Le journal du Médecin: Comment avez-vous découvert Uriah Heep et d'où vient cette passion pour ce groupe? Pierre Klels: Transmise par mon frère de six ans mon aîné, décédé aujourd'hui, et qui était également médecin. Il m'avait emmené au festival à Bilzen en 1977, j'avais 17 ans. Combien de concerts de Uriah Heep avez-vous vu au cours de votre existence? Une cinquantaine, principalement en Belgique et beaucoup en Allemagne, au Luxembourg, notamment dans un festival à Troisvierges à l'époque, et à Esch-sur-Alzette quelquefois. Je suis également allé les voir en France à l'Olympia en 2009, au moment où le groupe renaissait de ses cendres et avait ouvert pour les Américains de Blue Öyster Cult : ils s'étaient révélés bien meilleurs que ces derniers à l'époque, mais je ne suis pas très objectif... (il sourit) Je les ai également vus à Cologne, en première partie de Status Quo, qui fait toujours le même morceau pendant deux heures... un peu comme AC/DC. Quand je pense qu'ils ont vendu 140 millions d'albums! Comment définiriez-vous la musique de Uriah Heep? Ce groupe ne propose pas deux morceaux les mêmes dans son répertoire. Ce sont les créateurs de ce mélange entre hard-rock et musique progressive et ce, bien avant Queen. Il y avait bien Scorpions à la même époque, mais le groupe allemand faisait du métal avant l'heure. Le Heep, c'est tout de même plus sophistiqué. Par ailleurs, cette formation faisait partie à l'époque du quatuor des leaders du hard-rock en compagnie de Led Zeppelin, Black Sabbath et Deep Purple. Et ils vendaient autant d'albums! Le principal handicap de Uriah Heep fut d'avoir un nom de groupe qui commençait par la lettre U, comme Ufo, un autre groupe de hard anglais, ce qui les reléguait dans les derniers bacs chez les disquaires qui rangeaient les disques par ordre alphabétique. Raison pour laquelle je préfère les appeler le Heep! Cet élément a certainement dû jouer un rôle. Ils continuent à sortir des disques. Qui restent convaincants? Faisons la comparaison avec un groupe comme Deep Purple: si je me souviens de leurs morceaux des années 1970, je serais incapable de fredonner cinq morceaux de leurs albums depuis qu'ils se sont reformés dans les années '80... Il n'y a plus rien de marquant. Concernant le Heep, cela reste très bien, même si on n'est plus au niveau de leur album "Sweet Freedom", ou de leur live de 1973 ("Uriah Heep Live") qui était à tomber par terre, et tenait la dragée haute au "Made in Japan" de Deep Purple justement. Je le réécoute de temps à autre, et ce disque reste absolument fantastique. Reste-t-il des membres fondateurs actuellement au sein de Uriah Heep? Le seul et unique, c'est le guitariste Mick Box. Mais celui qui effectuait auparavant un travail de création incomparable dans le groupe, c'était Ken Hensley, mort en pleine période du covid. Mis à part quelques morceaux, tout passait par lui. Si l'on excepte le single "Easy leavin", le groupe n'a pas eu le succès qu'il espérait. David Byron était un vocaliste extraordinaire, même s'il était constamment saoul en concert, et Ken Hensley, un compositeur et claviériste virtuose. C'est d'ailleurs ce que tout le monde pense sur les forums de fans de ce groupe qui compte beaucoup d'admirateurs en Russie, car c'est le tout premier groupe à avoir franchi le Rideau de fer... Leur morceau "July Morning", tiré de "Look At Yourself" est d'ailleurs devenu un hymne en Bulgarie. Vous évoquez parfois votre passion pour Uriah Heep avec vos patients? Dans mon bureau, j'ai accroché l'affiche de l'album "Look at Yourself", qui date de 1971, et deux-trois posters dans ma salle d'attente. "Look at Your Self" est un de leurs meilleurs disques, dont j'ai la copie originale emballée dans la pochette mythique décorée du fameux miroir, dont j'ai hérité de mon frère. Trônent par ailleurs six DVD du groupe sur le bureau de mon cabinet. Je me balade également avec des t-shirts de Uriah Heep. Quant à mes quatre dernières voitures, elles arboraient toutes des autocollants Uriah Heep, voire des décorations que je transpose quand je change de véhicule (il rit). Je conduis actuellement une Jaguar qui arbore la pochette psychédélique de l'album "The Magician's Birthday". Je customise mes véhicules, en quelque sorte. J'avais une Range Rover, ce n'était plus une jeep, mais une Heep (rires). Parmi les patients, certains vous parlent de Uriah Heep et connaissent ce groupe? Quelques-uns de mon âge, mais ils se comptent sur les doigts d'une main. Et comment réagissent les patients aux posters de votre salle d'attente? Ils passent complètement à côté, je crois. Mon frère était également passé à autre chose que Uriah Heep. Moi pas, c'est bien ça mon problème! (il rit). J'avais pris mes places pour participer la croisière Rock Legends Cruise en 2016 dans les Caraïbes. Je voulais m'offrir cela pour mes 55 ans car le Heep faisait partie de l'affiche. Mais ce projet est tombé... à l'eau, justement. Allez-vous les voir au Graspop dans une semaine? Je ne sais pas encore: je dois gérer mes deux filles que j'ai emmenées voir Uriah Heep à 12 et 13 ans. Je leur avais promis de leur montrer de quoi il s'agissait. Nous nous sommes donc déplacés il y a deux ans au festival Suisse "Sion sous les étoiles": c'est la dernière fois que j'ai vu Uriah Heep. Et vos filles ont apprécié? Elles ont trouvé cela pas mal... Mais bon, elles étaient sous la coupe de leur père (il rit). Pour ma messe d'enterrement, outre "Lady in Black" et "A Year or A Day", j'ai préenregistré une dizaine de morceaux qui seront diffusés lorsque je quitterai cette Terre. Car ce groupe m'a marqué, et je ne serais sans doute pas le même sans lui.