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Avatar de la révolution sexuelle, la mise en lumière artistique et plus documentaire des corps notamment dans l'expression libérée du travestissement et de l'ambiguïté du genre: ceci souvent dans un noir et blanc expressionniste allemand dans le cas de Urs Lüthi, avec Tell me who stole your smile ou Jürgen Klauke et son Ziggy Stardust qui renvoie aux oeuvres de Beckmann ou d'Otto Dix. Une théâtralisation provocatrice plus glamour chez Nan Goldin récupérée par les féministes comme la pionnière Valie Export qui avec Genital Panic, violent dans ses contrastes noir et blanc montre une femme habillée mitraillette au poing et au point, mais sexe à l'air. Dans la section double-staged de l'expo il est question de méta-image du fait que l'image en cache une autre: Orlan s'offre un striptease en 17 volets passant de la Piéta à la femme nue et langoureuse, Sugimoto fait revivre la figure de cire et de sire du roi français Henry V en montrant malgré la cotte de mailles la transpiration du visage et les pores de la peau. Jan Vercruysse dans un double portrait couleurs (elles sont plutôt rares) montre une menine contemporaine sur son quand à soi d'un côté, puis cul par-dessus tête ensuite. Enfin, toujours en couleurs, Cindy Sherman dans sa série Centerfold, montre une jeune fille à peine nubile habillée dans un cadrage volontairement oblique sujette à la domination du regard du spectateur.. voyeur. Une expo riche d'une cinquantaine d'oeuvres (une vidéo montre la transformation corporelle de femme à homme d'Eleanor Antin dans The King) et qui s'intéresse notamment au corps... social: que ce soit via Martin Parr qui, dans Small World moque le tourisme de masse sur l'acropole, des photos tableaux de famille satirique de Les Krims, ou celles plus sombres à tout point de vue et en dégradé de noir de Patrick Faigenbaum qui statufie dans une sorte de morbidité, la famille Granato Pignatelli di Belmonte de Naples dans leur palais familial: une nature quasi morte. Dans un accrochage très sage, studieux et pas très "staged" pour le coup, Staged Bodies se termine sur une installation, celle de Victor Burgin intitulé The Bridge : récit (il y a du texte) qui parle d'eau, de femme, de naissance (liquide amniotique), et de mort, fait référence à Freud, que l'on voit derrière son bureau, à John Everett Millais (réinterprétation contemporaine de son Ophélie) à la sculpture de Rodin, à la mode des années 30, et au Vertigo d'Hitchcock, notamment via la Golden Gate Bridge d'où se jette le personnage de Kim Novak. Tout cela sous l'égide de Dante qui déclare " I vegno per Menarvi a l'altra riva" Alternant vidéo installation et bien sûr photographies, l'exposition tire un portrait assez exact quoique succinct d'une des formes de la photo artistique depuis 50 ans et ceci sans tomber dans les... clichés.