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Xavier Brenez, directeur général des Mutualités libres, ouvre le débat sans détour: la prévention est la clé pour une Belgique en meilleure santé. Pourtant, le constat est alarmant: 20% des Belges souffrent déjà d'une maladie chronique. Ces maladies, responsables de 86% des décès, engloutissent une part colossale des dépenses de santé. Pire, elles entraînent 50% des incapacités de travail et 37% des décès prématurés. En cause? Des comportements à risque bien connus: tabac, alcool, sédentarité et malbouffe. Le poids économique est insoutenable: 30% des dépenses de l'assurance obligatoire sont accaparées par 1% des patients les plus coûteux, dont 90% vivent avec au moins une maladie chronique. Face à cette dérive, Xavier Brenez réclame une approche globale, mêlant prévention primaire (éviter la maladie), secondaire (dépistage précoce) et tertiaire (réduire les complications). La prévention ne doit pas reposer uniquement sur le corps médical. Brenez plaide pour une mobilisation générale: pouvoirs publics, entreprises, écoles, citoyens. "Inspirons-nous des pays qui ont réduit le tabagisme ou l'alcoolisme par des campagnes ciblées, des taxes dissuasives et une régulation stricte."Les chiffres ne mentent pas: 6,5% des Belges boivent quotidiennement. 10,3% consomment plus de dix verres par semaine. 9% fument tous les jours et 5,1% occasionnellement. 73% tentent de manger plus sainement, mais la malbouffe résiste. 73,5% font de l'exercice, mais beaucoup restent sédentaires. Il y a une prise de conscience, mais elle reste insuffisante. Il faut des actions fermes pour transformer ces efforts en résultats durables. Sous l'impulsion de Brenez, les Mutualités libres militent pour une prévention fondée sur des preuves scientifiques et évaluée rigoureusement. L'objectif: économiser sur le long terme et améliorer l'espérance de vie. Pour y arriver, la collaboration avec les pouvoirs publics est cruciale. Impliquer chaque citoyen pour qu'il devienne acteur de sa santé est indispensable. Julianne Williams de l'OMS enfonce le clou: les maladies non transmissibles (MNT) - maladies cardiovasculaires, diabète, cancers - sont les grandes tueuses silencieuses. Elles doivent être combattues à l'échelle de la population. L'OMS vise une réduction d'un tiers des décès prématurés d'ici 2030. La Belgique doit, selon l'OMS, agir sur quatre fronts: 1/taxer le tabac, interdire de fumer dans tous les lieux publics et renforcer les campagnes anti-tabac. 2/L'alcool tue les 15-39 ans. Il faut des taxes, limiter les ventes tardives et imposer un prix minimum. 3/Le diabète de type 2 explose. Il faut reformuler les aliments, étiqueter clairement et sensibiliser. 4/Hypertension: 30% des Belges hypertendus risquent AVC et maladies cardiaques. Moins de sel, plus d'activité physique sont la clé. Pour Williams, les politiques de prévention doivent inclure: des "best buys" (comme taxer le sucre et l'alcool), un dépistage systématique dans les soins de première ligne. La création de villes saines (lire ci-dessous l'exemple de Cork, Irlande) et lutter contre les inégalités de santé avec des programmes accessibles à tous. "Chaque euro investi dans la prévention rapporte en coûts de santé évités et en productivité retrouvée."Denise Cahill présente Cork, ville irlandaise de 200.000 habitants, comme un modèle à suivre. Membre du réseau des "villes saines" de l'OMS depuis 2012, Cork ne se contente pas de soigner les symptômes. La ville attaque les causes profondes: inégalités sociales, urbanisme pollué, malbouffe omniprésente. Des projets comme "Feed the City" et le Solidarity Garden reconnectent les citoyens à une alimentation saine et durable. L'engagement est collectif et structuré: consultations publiques, jury citoyen et participation à des initiatives européennes comme FEAST Living Lab. Pour Brenez, Williams et Cahill, le message est clair: la prévention n'est pas une option, c'est une urgence nationale. Il est temps de miser sur une Belgique plus saine et un système de santé plus durable. Le coût de l'inaction? Des vies perdues et un système à bout de souffle.