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Le coeur de l'élevage de moutons et vaches se trouve au sud de Dublin dans la région de Kilkenny, chef-lieu de comté.Une ville importante (enfin importante, façon de parler dans un pays qui compte moins de cinq millions d'habitants, dont un quart dans et autour de la capitale), de pierres grises posées au milieu d'un vert profond, qui s'est bâti autour d'un château normand (comprenez viking) dont la devise, en français s'il vous plaît, inscrite sur le blason est " Je me trouve ".Dominée par ce château serti d'un parc immense et public, la ville charmante en son centre présente une ribambelle de maisons anciennes de différentes époques qui se tiennent chaud, encerclant la cathédrale St Canice d'un gothique flamboyant et très Îles Britanniques.Des pubs, notamment l'un impressionnant The left bank situé dans le bâtiment fin 19e d'un ancien établissement bancaire évidemment - hauts plafonds sur deux étages, s'échappent souvent les notes d'une chanson traditionnelle, interprétée par un groupe local, faisant perduré la tradition musicale irlandaise qui n'est pas un vain cliché.Dans ce coeur de ville, The Butcher, création de l'éleveur de bovins Mark Williams voici quatre ans, lequel maîtrise toute la chaîne de production depuis sa ferme située à une dizaine de kilomètres, et y compris désormais la vente dans ce restaurant lumineux, contemporain (les lampes sont accrochées... a des crochets de boucherie) ; il propose une viande absolument délicieuse que l'on peut déguster en petite (200), moyenne (400 ribeye bone cow-boy) ou grande quantité 800 gr (ribeye bone tomahawk) de Hereford, Galloway ou d'Aberdeen Angus. Le tout dans une ambiance décontractée et chaleureuse (enfin, il y a une tête de boeuf empaillée qui vous regarde, bonjour la culpabilité), sans que l'addition ne soit trop vache.Dans la campagne environnante Ballykeefe est à la fois exploitation agricole, élevage et... distillerie, une tradition perdue il y a deux cents ans, mais dont on retrouve les traces en Irlande dès 1326. Morgan produit en interne, son orge qu'il utilise également comme fourrage pour les jeunes boeufs, ce qui donne le goût à cette viande de qualité. Côté distillerie, il produit une vodka, un whiskey irlandais blanc ou vieilli en tonneaux de bourbon four rose trois années durant, et bien sûr un gin (invention d'origine belgo-hollandaise) qui lui ne doit rester que quatre jours et demi en cuve.Roulant vers la côte plus au sud, en direction de la baie de Dungarvan, le paysage se fait plus bosselé, voire un peu montagneux, mais toujours aussi vert. Une verdure qui laisse finalement la place à cette baie magnifique avec au fond un petit port de plaisance. C'est dans cette immense hanse aux marées importantes, que s'est développée une activité d'ostréiculture désormais florissante : achetés en France, les petites huîtres sont élevées durant au moins trois ans, par la famille Harty notamment, à l'initiative de cette pratique, et puis récoltées en fonction de la grosseur : les plus grosses, âgées de douze ans peuvent faire jusque 500 grammes ! Elles se révèlent absolument délicieuses, mais ne se trouvent pas encore dans le commerce en Belgique et sont principalement exportées vers l'Asie ou le Canada.En Irlande, 80% des terres cultivables sont constituées de pâturages, ce qui signifie que, bien que la population ne soit que de 4.7 millions de personnes, le pays peut nourrir 25 millions de personnes. L'élevage et l'abattage de boeuf et moutons se fait désormais chez APB qui se fournit auprès de 35.000 éleveurs dans une optique de réduction de l'empreinte carbone, travaillant sur le recyclage des abats en carburant pour le biodiesel, la collecte des huiles de restaurant clients en Irlande dans le même but, la réduction de l'utilisation de l'eau, le développement de parcs éoliens pour l'électricité ou encore l'usage de carton recyclable pour l'emballage. Ceci passe également par un plus grand respect de l'animal, fournisseur de plus de 400 produits dans le cas de l'agneau.Une visite chez un éleveur mixte boeuf agneau dans le somptueux paysage du comté de Wicklow, véritable jardin de l'Irlande, démontre le pourquoi de la qualité de la viande irlandaise. Vu le climat tempéré, les moutons sont au prés tout l'année. Des prés si étendus, qu'après avoir brouté ensemble (ovins et bovins) trois jours, la pâture est laissée en jachère pendant trois semaines ensuite, le temps de reprendre vigueur et longueur. Les agneaux y naissent en mars, et ne passent pas l'hiver, puisqu'ils sont abattus après neuf mois et les bovins le sont après 22 mois.La qualité de l'herbe est révélée par la présence de plantain, proche de la chicorée et riche en oméga 3, et de trèfles, riches en oligo-éléments, ce qui influe sur le bétail, nourri en ensilage et foin pour les bovins les trois mois de l'année où ils restent à l'étable.Si la viande irlandaise a ce goût et cette tendresse, c'est à un ensemble d'éléments qu'elle le doit et surtout à cette qualité d'herbe de ce pays émeraude où le vert dure...