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Aux confins des frontières de la Birmanie, de la Thaïlande et de la Chine, un petit village laotien perdu dans la jungle et situé au milieu du fameux triangle d'or : Laosan est un jeune père dont la vie est rythmée par les deux prises d'opium de quatre grammes minimum qu'il s'octroie par jour. La culture du pavot qui constitue la seule source de richesse de cette communauté akha, en cause également la perte, puisqu'elle plonge les hommes jeunes et valides dans un état de somnolence et d'hébétude qui leur ôtent tout désir. Seules les femmes, on ne sait si la consommation d'opium leur est interdite, font vivre la communauté, s'oc-cupant de la famille, des enfants et des travaux aux champs.Laosan en est conscient qui, tout en tirant sur son calumet de bambou, avoue avoir choisi une femme dure à la tâche plutôt que jolie, avant de prendre en charge la besogne, qu'accro, il est désormais incapable d'effectuer.Le documentaire de notre compatriote Nicolas Graux qui se veut aussi en creux un beau portrait de femmes - battues par des maris pourtant à priori indolents et drogués, rêvant d'un autre avenir, mères courages se sacrifient pour le bien de leurs enfants -, possède ce côté hypnotique comme l'opium, rappelle par son style forcément réaliste L'odeur de la papaye verte ou Cyclo du Vietnamien Tran Anh Hung, adopte exprès le même rythme ralenti, cette torpeur que ces producteurs consommateurs d'opium, cernés par cette jungle luxuriante, détrempée par une pluie incessante, qui semble ne jamais voir le soleil, à l'image des femmes de cette communauté qui guettent en vain une éclaircie dans leur vie. Soutenu par le programme européen Eurotox, et alors que la production mondiale de pavot ne fait qu'augmenter notamment en Afghanistan, ce documentaire hypnotisant doit notamment sa réussite à la capacité du réalisateur à se faire oublier, comme s'il s'était lui-même fondu dans cette jungle profonde...