Le 56e cycle de perfectionnement en sciences hospitalières de l'UCLouvain a pris fin vendredi dernier. Au menu de cette dernière matinée de présentations: les besoins de santé à l'aube de 2030.
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Parler des enjeux de soins de santé de demain est toujours un exercice particulier. Le contexte de crises successives de 2022 vient ajouter de la complexité dans un paysage qui n'en manquait pas, entre le vieillissement de la population et la pénurie de personnel soignant. Devant un auditoire essentiellement hospitalier, Fanny Dubois, sociologue, aide-soignante et surtout présidente de la Fédération des maisons-médiales, a démarré la matinée en prônant un dialogue d'ouverture pour davantage d'intégration des soins et de collaboration entre les lignes de soins. "La pandémie a été un laboratoire de ce que peuvent devenir les soins de santé demain. Notre système de soins est un bon système curatif, mais un piètre système de prévention. Pour pallier cela, il faut travailler davantage l'éducation à la santé et la santé communautaire, notamment avec les institutions hospitalières."La sociologue a également plébiscité l'échelonnement. "L'échelonnement est important. Il ne faut pas obliger chaque patient à avoir un médecin traitant attitré. Mais il faut un juste équilibre. Car la surconsommation et la sous-consommation des soins coûtent à la société. Proxisanté va encourager les équipes pluridisciplinaires de première ligne à accompagner les patients qui en ont le plus besoin avant qu'ils n'arrivent aux urgences."Stéphane Le Grand, directeur chez Antares Consulting a également abordé la santé communautaire et l'espace que doivent prendre les hôpitaux en dehors les murs. Après avoir présenté trois concepts qui ont orienté les politiques hospitalières depuis les années 70 (efficience, soins appropriés et recherche de valeur), Stéphane Le Grand constate que les hôpitaux sont passés d'une réflexion "à la prestation" à une logique davantage centrée sur le patient. "Cela permet de retrouver le sens initial de la mission de soins dans les hôpitaux. Développer ce sens, c'est travailler sur les bassins de soins. Les réseaux constituent à ce titre un outil formidable", estime le directeur. "La réduction de la concurrence entre hôpitaux va mener à une meilleure santé dans les bassins de soins. Mais cela prendra du temps.""Aujourd'hui, la place de l'hôpital en dehors des murs est vide", embraie le consultant. "La santé communautaire est très peu développée en Belgique. Il y a une place à prendre. Demain, l'hôpital traditionnel sera réduit au profit des soins à domicile, du Digital Care, etc. L'hôpital, qui était fortement ancré dans ses murs, doit s'ouvrir à l'extérieur, à une logique de soins intégrés. Il faut réfléchir à comment cette intégration se fait. Sinon, il risque de ne rester que la gériatrie et la médecine interne à l'hôpital."Pour y arriver, le consultant estime qu'il faut bien sûr continuer à réaliser des actes techniques complexes, mais qu'il faut également s'intéresser aux problèmes de santé qui touchent le plus large de la population, comme la BPCO et le diabète. "Pour cela, il faut connaître sa population", exprime Stéphane Le Grand, avant de faire un peu d'autopromotion. "Nous avons réalisé une analyse de segmentation pour un hôpital suisse. Il en est sorti sept groupes de patients différents." À sa question de savoir combien d'hôpitaux présents ont réalisé une telle analyse de leur population, la salle a répondu par le silence: aucun hôpital présent n'a fait d'analyse de segmentation. Des initiatives existent pourtant pour repenser l'hôpital. En Belgique francophone, Stéphane Le Grand a cité l'initiative développée par le GHDC autour de la santé positive, un concept originaire des Pays-Bas plaçant le patient au centre de six dimensions constituantes de la santé. Une manière de penser les soins différemment, de manière plus intégrée.