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Omicron se répand-t-il dans le monde développé d'autant plus vite qu'il est inoffensif? ""Ce variant" évolue si rapidement qu'il laisse très peu de temps pour préparer une quelconque réponse. Les décisions doivent donc être prises dans une grande incertitude", explique Graham Medley, modélisateur des maladies infectieuses à la London School of Hygiene & Tropical Medicine, qui conseille le gouvernement britannique. Le nombre d'infections par Omicron peut doubler en moins de deux jours, ce qui est nettement plus rapide que les variantes précédentes du Sars-CoV-2, pointe Nature, "et plus proche de ce que les responsables de la santé publique attendraient du virus de la grippe, plus bénin". "Nous n'avions jamais vu une telle vitesse auparavant, et cela signifie qu'on ne pouvait pas l'éviter par la vaccination", estime Christina Pagel, analyste de données sur les soins de santé à l'University College London. "Même si l'on pouvait vacciner tout le monde, il faudrait encore deux semaines pour que le vaccin fasse effet, et à ce moment-là, on est en plein dedans." Cela place les décideurs politiques et les chercheurs qui les conseillent dans une position peu enviable, souligne Nature. "C'est une situation où soit vous mettez des restrictions très, très tôt, soit vous ne faites rien", dit Pagel. "Mais si vous attendez de voir ce qui se passe, alors il est trop tard."De fait, de nombreux pays scandinaves (Danemark, Suède) ont levé toutes ou parties des restrictions début février étant donné que les chiffres d'hospitalisation et surtout les séjours aux soins intensifs restent stables ou diminuent. En pleine campagne présidentielle, la France a également annoncé la levée d'une série de restrictions, bien qu'on peut avoir le sentiment qu'Emmanuel Macron veut apparaître en sauveur après avoir été le bourreau des Français. Les hommes politiques - qui sont des hommes comme les autres - ont senti à quel point la population est excédée des relatives privations de liberté et qu'il faut lâcher du lest - au Canada, Justin Trudeau a reculé devant les manifestations de camionneurs et leurs redoutables véhicules. Une grève de ce type pourrait paralyser n'importe quel pays européen, la France en tête qui a déjà connu cela. Si on en revient à l'aspect purement scientifique, "la probabilité que l'infection conduise quelqu'un à l'hôpital est absolument un paramètre clé. Mais nous sommes en train de l'estimer dans une population qui n'est évidemment pas naïve", explique Mark Woolhouse, épidémiologiste spécialisé dans les maladies infectieuses à l'Université d'Édimbourg, qui conseille également le gouvernement britannique. "Lorsque vous faites ce genre d'estimations, formellement, vous devriez vraiment les refaire pour chaque population qui vous intéresse. Et cela s'applique partout."Par ailleurs, les vaccins sont-ils vraiment inefficaces contre Omicron? Chacun d'entre nous a des proches infectés par Omicron malgré trois doses vaccinales. "Pas nécessairement", selon le Pr Woolhouse. "Les vaccins à virus inactivé pourraient induire une immunité plus large qui réagirait à un plus grand nombre de souches, car ils susciteront des réponses immunitaires contre des protéines virales autres que le pic, qui est particulièrement variable. C'est une question très intéressante mais je n'ai tout simplement pas encore vu d'analyse formelle à ce sujet."Maintenant, la question la plus importante: est-ce la fin de la pandémie? Omicron serait-il en quelque sorte le chant du Cygne du virus? "Ce ne sera pas la dernière variante, et la prochaine aura donc ses propres caractéristiques", affirme M. Medley. Il est quasi certain que le Covid-19 deviendra inévitablement une maladie endémique. Mais le concept d'endémie n'est pas univoque et varie selon les chercheurs: "Je pense que l'on s'attend à ce que le comportement général s'oriente d'une manière ou d'une autre vers une situation où l'immunité de la population serait telle que l'on ne verrait plus d'épidémies très meurtrières", explique Sebastian Funk, épidémiologiste à la London School of Hygiene & Tropical Medicine. "La transition vers l'endémicité, c'est-à-dire le fait de "vivre avec le virus" sans restrictions ni protections, est difficile à modéliser avec précision. C'est en partie parce que même les meilleurs modèles de maladie ont du mal à faire des prévisions raisonnables au-delà de quelques semaines. C'est aussi parce que l'endémicité reflète un jugement sur le nombre de décès que les sociétés sont prêtes à tolérer pendant que la population mondiale acquiert progressivement une immunité."Pour Woolhouse , "le Covid-19 ne deviendra véritablement endémique que lorsque la plupart des adultes seront protégés contre les infections graves parce qu'ils ont été exposés plusieurs fois au virus dans leur enfance et qu'ils ont donc développé une immunité naturelle. Cela prendra des décennies, ce qui signifie que de nombreuses personnes âgées aujourd'hui (qui n'ont pas été exposées dans leur enfance) resteront vulnérables et pourraient avoir besoin de vaccinations continues"."Il n'y a aucune garantie que la prochaine variante sera plus bénigne", souligne Julian Tang, virologue consultant à l'Infirmerie royale de Leicester, "mais c'est ce qui semble se produire jusqu'à présent. Ce virus est de plus en plus bénin à chaque mutation", conclut-il en phase avec l'OMS Europe qui, contrairement à la maison-mère basée à Genève qui craint l'avènement d'un variant plus virulent après Omicron, a estimé jeudi dernier que l'Europe est dans une situation de "cessez-le-feu" qui pourrait mener à la fin de la pandémie de Covid-19.