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Sur une île perdue des Hébrides, Lewis, située au nord de l'Écosse, le Belge Phil est victime d'un AVC. De retour de l'hôpital, souffrant d'une amnésie temporaire, il ne reconnaît personne: ni Peter et son fils Brian, ni l'aïeul Angus et toujours patron de l'exploitation agricole et familiale pour laquelle le convalescent travaille. Millie, (vieille) fille du patriarche dont Phil ne se souvient plus non plus, devient son référent médical. Très vite, Millie et l'accidenté se rapprochent très fortement: c'est que, d'après celle-ci, ils auraient été amants avant l'accident... Filmé avec délicatesse, Nobody Has To Know filme les tourments et détours d'un amour naissant, décrit avec naturalisme une petite communauté protestante d'une île perdue en évoquant des thèmes comme la culpabilité, la religion presbytérienne stricte qui imprègne la vie et les paysages de l'île, la filiation, et un certain racisme vis-à-vis de tout ce qui ne fait pas partie au départ du monde îlien. Bouli Lanners est un peintre - à la Caspar Friedrich, à la Gustave Courbet dans un enterrement Ornans -, et fait de cette relation de couple un ménage à trois entre Millie, Phil et... Lewis. Il magnifie également l'actrice Michelle Fairley (vue dans Game of thrones) dont on sent qu'elle est un peu sa Marthe Keller écossaise... même si elle est irlandaise, filmée elle aussi dans tout son naturel, sa jeune vieillesse magnifiée, au coeur de cette histoire d'amour inespérée pour son personnage, et qui la déride. Grâce à sa dégaine à la Hemingway, Bouli Lanners est tout autant physiquement présent et bien secondé par les rôles secondaires (même Clovis Cornillac en frère inquiet est bon), notamment le jeune Andrew Still qui joue un Brian en lutte muette avec Angus, son paternel (Cal MacAnich). Un film délicat qui évoque la beauté âpre de l'île et la mer, de celle chevillée à l'âge d'il et surtout... elle.