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L'Inami a analysé trois types de prestations: chirurgie, médecine interne et psychiatrie. De quoi permettre une estimation du temps nécessaire pour rattraper le retard de soins qu'a engendré la pandémie. La lecture des graphiques n'est en premier lieu guère surprenante: chaque vague s'accompagne d'une baisse d'activité considérable dans les hôpitaux, tandis que les périodes sans vague sont propices aux rattrapages, avec un pic constaté de janvier à mars 2021 inclus. On constate également que les vagues ont de moins en moins d'impacts sur les retards des soins. Plus avant dans les chiffres, un fait surprend: les soins non essentiels ont moins diminué que les soins essentiels ou mixtes, et ce pendant le premier pic et le troisième pic de la crise. "Cette tendance souligne la nécessité d'établir des critères de priorité nationaux", prévient l'Inami. L'Institut a ensuite passé différentes disciplines au crible. La plupart des disciplines enregistrent un retard accumulé dans les prestations représentant entre 10 et 15% de la production annuelle. C'est surtout la chirurgie vasculaire (28%) et la chirurgie otorhinolaryngologique (ORL, 40%) qui présentent un retard important et qui n'affichent encore aucune tendance au rattrapage. La chirurgie thoracique enregistre quant à elle le retard le plus faible (7%). Passant en revue chaque discipline, on remarque quelques phénomènes étonnants. L'important rattrapage des circoncisions, par exemple, "ne correspond pas à ce que l'on s'attend au vu des priorités médicales établies", relève l'Inami. C'est également le cas du nombre d'interventions de bypass gastrique qui n'a pas diminué lors de la troisième vague, "ce qui est illogique au vu des priorités médicales établies. Le volume de prestations pour ces interventions est même de 9% supérieur à ce qu'il était en période pré-Covid. Il y a lieu d'étudier plus minutieusement les priorités établies à ce niveau."D'autres opérations ont par contre nettement diminué en raison de leur surutilisation en période pré-Covid. C'est le cas des méniscectomies en orthopédie par exemple (-32%). "Cela correspond aux prévisions étant donné qu'une tendance à la "surutilisation" a dans une large mesure été observée ici. Ces interventions ont pour la majeure partie été pratiquées chez des personnes âgées, ce qui n'est pas conforme aux directives scientifiques en la matière. L'Inami a récemment mené une action de sensibilisation à ce sujet", indiquent les auteurs du rapport. La médecine interne connaît également d'importants retards. C'est en pneumologie (21%) et en gériatrie (20%) que l'on enregistre les retards les plus importants et il n'y a toujours pas d'amélioration en vue. Le retard accumulé au niveau des examens d'évaluation et les consultations générales en gériatrie a même atteint 30%, ce qui a pu être partiellement comblé par le recours à la télémédecine. "La hausse de ces retards semble progressive et non liée aux vagues de Covid-19", signale l'Inami, pointant donc un problème davantage structurel que conjoncturel. "La charge de travail élevée qui pèse sur les gériatres et les pneumologues et leurs assistants se poursuivra donc pendant un certain temps encore."Les autres spécialités s'en sortent heureusement mieux. En gastro-entérologie et en neurologie, les retards diminuent. En cardiologie, le retard est pour ainsi dire rattrapé. L'Inami a ici examiné des prestations récurrentes qui sont liées au contexte hospitalier. Le retard en soins cumulé par rapport à la période pré-Covid a atteint un pic en novembre 2020. Durant ce mois, le retard en soins estimé s'est élevé à 11% dans les hôpitaux aigus et à 10% dans les hôpitaux psychiatriques. On peut observer un mouvement de rattrapage à partir de décembre mais qui stagne depuis le début de la troisième vague. Le retard en soins cumulé fin mai s'élevait à 8% dans les hôpitaux aigus et à 6% dans les hôpitaux psychiatriques. En outre, l'Inami attire l'attention sur les retards croissants au niveau des consultations psychiatriques à la demande du médecin traitant dans les hôpitaux aigus. Il y a eu un important rattrapage début 2021. Le retard le plus important se trouve au niveau des interventions non essentielles, qui comportent encore une part de surutilisation. L'Inami table sur un scénario consistant à travailler 5% au-dessus de la capacité normale pour estimer les temps de rattrapage. Selon ce scénario "réaliste", les temps de rattrapage pour les prestations chirurgicales essentielles et mixtes sont estimés à 14 mois (1,17 an) et 15 mois (1,24 an) respectivement, et à quatre ans et 7 mois (4,55 ans) pour les prestations non essentielles. "Pour les interventions non essentielles, il s'agit d'un scénario "worst case" dans lequel, entre autres, toute "surutilisation" serait compensée. Ce n'est évidemment pas l'objectif", précise l'institut. L'Inami conclut d'ailleurs sur les constats tirés à l'international. "Des priorités de rattrapage sont essentielles, des capacités supplémentaires sont nécessaires et une efficacité accrue peut renforcer en partie l'augmentation de la capacité. Les gains d'efficience consistent principalement à ne pas rattraper une partie des interventions où la "surutilisation" est connue."