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Sujet banal s'il en est, les syncopes sur hypotension orthostatique n'en font pas moins paniquer les patients et défient parfois les médecins, notamment aux urgences. Dans la Revue médicale de Liège, une équipe du CHU de Liège 1 s'est penchée sur les caractéristiques cliniques, le diagnostic et la prise en charge de ce type de syncope tels que recommandés par la Société Européenne de Cardiologie (ESC) 2. On estime que l'hypotension orthostatique touche 7% de la population générale et 16% des plus de 65 ans. " Sa prévalence augmente non seulement avec l'âge, mais aussi avec l'institutionnalisation, les traitements antihypertenseurs et la polypathologie. Avec ou sans symptômes d'accompagnement, c'est un facteur de risque de morbidité et de mortalité cardio-vasculaire et globale (chute, infarctus du myocarde, AVC) ", précisent les auteurs liégeois. Les médicaments (vasodilatateurs, diurétiques, phénothiazine, anti-dépresseurs...) sont la cause la plus fréquente de ce symptôme. " Certains patients sont surtraités ", note la Dr Nathalie Antole (département de cardiologie, service du Pr P. Lancellotti, CHU Liège ). " Les personnes âgées qui prennent des diurétiques et qui s'hydratent moins, peuvent être en hypovolémie. Elles seront alors plus à risque d'être hypotendues et de faire de l'hypotension orthostatique." " Les syncopes secondaires à une hypotension orthostatique surviennent durant ou après le passage en position debout, en cas de station debout prolongée ou après un exercice physique, en période postprandiale, lors d'un changement de posologie de traitement hypotenseur, ou en présence d'une dysautonomie (dans le cadre de l'hypotension orthostatique neurogène) ", font observer les auteurs de l'article. Pour la Société européenne de cardiologie, les chutes inexpliquées de l'adulte doivent être considérées comme des syncopes. Elle recommande de " rechercher une hypotension orthostatique en cas de syncope chez les patients hypertendus traités (inhibiteurs du système rénine-angiotensine, diurétiques, bêtabloquants), les plus de 65 ans, les patients diabétiques, insuffisants rénaux ou avec une maladie de Parkinson (ou autres dysautonomies primaires), les sujets avec troubles cognitifs, les patients dénutris, déshydratés ou anémiques." " Il est relativement aisé et intéressant de prendre la tension de base, classiquement, mais aussi quand il y a des symptômes évocateurs : l'anamnèse est très importante pour voir les caractéristiques des malaises décrits. Cela permet déjà d'orienter le diagnostic. En cas de suspicion d'hypotension orthostatique, on prend la tension en position couchée, puis debout, immédiatement et à 3 minutes ", souligne Nathalie Antole. Le diagnostic est retenu si la baisse tensionnelle est enregistrée dans les trois minutes. "L'absence d'accélération réflexe de la fréquence cardiaque parle en faveur d'une atteinte du système nerveux autonome central ou périphérique, alors qu'une accélération exagérée (> 10 pulsations/minute) évoque plutôt l'existence d'une déshydratation/hypovolémie", indiquent les auteurs. La diminution des symptômes et la prévention des chutes et des syncopes sont au coeur du traitement de l'hypotension orthostatique. Ceci passe donc d'abord par " la sensibilisation des patients aux risques potentiels de certains facteurs favorisants (changement brusque de posture) ou causals (traitements médicamenteux), tout en conseillant, au cas par cas, une adaptation thérapeutique, une augmentation des apports en sel (10g/j) et de liquide (2 à 3l/par j) ou le port de bas de contention ", détaillent les auteurs. " Si les traitements sont en cause, on cherche ceux que l'on pourrait arrêter ou alléger. On peut aussi réaliser un Holter de 24 heures pour faire la part des choses avec l'hypertension blouse blanche ", ajoute la Dr Antole. " En cas d'hypotension orthostatique ", continue-t-elle , " il est important de donner au patient des conseils relatifs à l'hydratation, à l'alimentation (un peu plus salée), de se relever prudemment... Ensuite, on explique les mesures à prendre en cas de prodromes : s'allonger si possible, manoeuvres de contraction musculaires isométriques pas très compliquées (croiser les jambes et les contracter, presser les mains l'une contre l'autre...). Le but est d'éjecter le sang dans le secteur vasculaire pour augmenter la tension. En cas d'insuffisance veineuse, le port de bas de contention permet de faire augmenter le volume sanguin global et de diminuer le risque de faire trop chuter la tension au lever. On peut aussi dormir la tête surélevée (10°) pour prévenir la polyurie nocturne, maintenir une distribution plus favorable des liquides dans l'organisme et améliorer l'éventuelle HTA nocturne de décubitus." Ces petites mesures permettent parfois de passer le cap et d'éviter le traitement médicamenteux. " Si cela ne suffit pas et qu'il n'y a pas d'hypertension associée, on peut avoir recours à des médicaments qui vont augmenter la tension, soit en vasoconstrictant les vaisseaux, soit en stimulant la rétention rénale de sodium (fludrocortisone)." " C'est un sujet parfois banalisé, mais facile à dépister ", conclut la Dr Nathalie Antole . éLe test de tension coucher/debout prend un peu de temps en consultation mais, en moins de cinq minutes, il permet de faire la différence entre les syncopes due à une hypotension orthostatique, vasovagales ou d'origine cardiaque, d'orienter le diagnostic, et parfois d'éviter des explorations importantes."