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Un élément déterminant des modalités financières est le caractère conventionné - totalement ou partiellement - ou non conventionné du prestataire. La première catégorie pratiquera des tarifs correspondant aux tarifs de la nomenclature alors que la deuxième catégorie est libre de pratiquer les tarifs de son choix, de sorte qu'en plus du ticket modérateur, le patient prendra à sa charge un honoraire "supplémentaire". Tant la loi sur les droits du patient que la loi sur l'assurance obligatoire imposent un devoir d'information aux dispensateurs de soins, dans un souci de protection du patient. Si l'objectif est louable et la règle générale claire, cette obligation d'information pose différentes questions pratiques: - Sur qui pèse l'obligation d'information? - Quand doit-elle avoir lieu? - Qu'en est-il lorsque le professionnel de la santé exerce au sein d'une structure de soins? - Quel peut être l'outil utilisé. Dans quelle mesure un simple renvoi vers un dépliant est suffisant? Le devoir d'information s'applique aux praticiens de l'art de guérir (soit les praticiens de l'art médical et dentaire), les kinésithérapeutes, les praticiens de l'art infirmier, les auxiliaires paramédicaux, les aides-soignants, les établissements hospitaliers, les établissements de rééducation fonctionnelle et de réadaptation professionnelle et les autres services et institutions. Notons que les pharmaciens ne sont pas soumis à cette obligation. L'obligation vise donc non seulement le prestataire mais aussi les institutions. L'information doit avoir lieu en amont des prestations. Les informations partagées doivent être exposées de manière claire afin que le patient puisse émettre son consentement libre et éclairé à la prestation. Les informations fournies doivent préciser si le dispensateur de soins est ou non conventionné et selon quelles modalités. Ainsi, le patient doit savoir quels jours et heures le dispensateur de soins n'est pas conventionné. Si un médecin reçoit à son cabinet privé à mi-temps de manière non-conventionnée et à mi-temps de manière conventionnée, il doit afficher au sein de son cabinet quels sont les jours et les heures pour lesquels il n'exerce pas de manière conventionnée. En 2021, l'obligation d'information s'est offert un lifting. Le législateur a étendu l'objet de l'obligation d'information aux " tarifs qu'ils pratiquent pour les prestations remboursables les plus courantes dans leur discipline". La réglementation ne définit toutefois pas cette notion de prestations les plus courantes. Les travaux préparatoires indiquent qu'il appartiendra à l'Inami de préciser la portée de cette notion. La nouvelle obligation ne s'arrête pas là. Outre la mention des tarifs des prestations les plus courantes, il appartiendra au dispensateur d'indiquer la part de l'intervention de l'assurance, la quote-part personnelle et, le cas échéant, le montant maximum du supplément pratiqué. Les dispensateurs de soins qui ont conclu des accords prévoyant un paiement forfaitaire des prestations (il s'agit des prestataires exerçant au sein d'une maison médicale) doivent informer en outre les bénéficiaires du coût des soins qui sont dispensés dans le cadre du paiement forfaitaire. Dès lors que les prestations sont facturées au forfait et non à l'acte, il n'y a pas de tarif à indiquer mais il faut mentionner ce qui est couvert par le forfait. Notons également que le législateur, dans une loi du 23 mai 2013, impose des obligations particulières d'information pour les prestations de chirurgie esthétique. La réglementation impose, au minimum, un affichage clair et précis dans les lieux de consultation. Les patients doivent pouvoir obtenir les informations sans être obligés d'entamer une démarche spécifique. À cet égard, la Cour de cassation a jugé le 6 septembre 2021 qu'une brochure d'information qui indique la liste des médecins conventionnés et disponible au bureau d'accueil de la réception ou sur un site internet n'est pas suffisant pour respecter le droit d'information du patient. Le dispensateur de soins ne peut se limiter à renvoyer vers une autre source d'information. Ceci confirme que le patient doit pouvoir avoir accès à ces informations sans devoir entreprendre de démarches particulières. Ces affiches doivent apporter une information claire pour le patient et doivent être exhaustives quant au contenu. À l'occasion de la modification législative d'octobre 2021, l'Inami a été chargé de créer des modèles types de ces affiches pour chaque profession concernée et de les publier au Moniteur belge. Les nouvelles obligations d'affichage n'entreront d'ailleurs en vigueur que le jour de la publication de ces modèles d'affiche type pour chaque secteur concerné. Le dossier est actuellement sur la table de l'Inami. Sous réserve du modèle encore à adopter, le principe est clair, c'est celui de la communication par voie d'affichage. Bien évidemment cela n'interdit pas aux prestataires de diffuser l'information aussi par d'autres canaux, comme les canaux informatiques, en plus de l'affichage. Reste, la question des dispensateurs de soins exerçant à domicile. Elle n'a pas été tranchée par le législateur qui a préféré laisser la problématique aux bons soins de l'Inami. Notons que l'affichage des tarifs ne libère pas les dispensateurs de soins de leur obligation de communication à l'Inami de leur volonté de ne pas être conventionné. En effet, la loi indique qu'un dispensateur de soins qui affiche valablement qu'il est non-conventionné mais qui ne prévient pas l'Inami de son non-conventionnement, sera réputé être conventionné. Lorsqu'un dispensateur de soins exerce seul "à son compte", il est évident qu'il est le seul responsable de l'affichage des tarifs qu'il pratique. Par contre, pour le prestataire de soins exerçant au sein d'une structure, les choses sont plus complexes. La loi permet aux prestataires de soins pratiquant dans un même lieu de communautariser l'affichage des informations afin que celles-ci soient centralisées. Soulignons toutefois que ceci n'est possible que si l'ensemble des informations requises sont exposées et que l'affiche est accessible à l'entièreté de la patientèle. Ainsi, des médecins de spécialités différentes peuvent apposer une seule affiche dans la salle d'attente commune, pour autant que cette affiche expose les tarifs des prestations remboursables les plus courantes de chaque médecin et les autres informations requises. L'obligation pèse en réalité sur le dispensateur lui-même (même s'il peut le communautariser). Chacun des prestataires de soins doit veiller à la complétude et la bonne accessibilité de l'affiche le concernant, même lorsque celle-ci est mise en place en commun au sein d'une structure de soins. Le cas des hôpitaux mérite une analyse particulière. L'article 30 de la loi sur les hôpitaux stipule que chaque hôpital, dans la limite de ses possibilités légales, doit respecter les dispositions de la loi sur les droits des patients concernant les aspects médicaux, infirmiers et autres professionnels de la santé dans ses relations légales avec le patient. Bien que les hôpitaux (tout comme les structures d'exercice) ne sont pas directement concernés par l'obligation d'affichage, la Cour de cassation a jugé qu'en application de l'article 30 précité ils sont aussi responsables de l'obligation d'affichage des tarifs, au sein de l'institution. Dans l'arrêt précité, la Cour de cassation expose que l'hôpital doit "préalablement l'intervention d'un médecin travaillant pour lui (...) fournir au patient, de sa propre initiative et en vue de recueillir son consentement, des informations sur le statut du médecin, sur l'existence ou non d'une autorisation d'exercer, ainsi que sur les conséquences financières de son intervention". Il nous semble qu'une telle obligation est particulièrement lourde pour l'hôpital, surtout s'il faut considérer qu'elle s'appliquerait aussi pour les prestations de pure consultation qui sont réalisées en dehors de l'activité hospitalière au sens strict. Se pose également la question suivante: si un hôpital s'affranchit de l'obligation d'affichage des tarifs, est-ce que les dispensateurs de soins y exerçant répondent ainsi à leur obligation? Notre réponse se veut pragmatique. Certes la réglementation prévoit que les dispensateurs de soins peuvent communautariser l'affichage des tarifs pratiqués par chacun d'eux. Toutefois, on imagine mal un hôpital comptant un nombre important de dispensateurs de soins, afficher pour chacun d'eux leurs tarifs respectifs, pour leurs prestations les plus fréquentes, et préciser dans quelle mesure ceux-ci sont conventionnés. On relève à cet égard que l'arrêt est intervenu avant la modification législative qui a étendu l'obligation d'information aux tarifs. S'il peut être concevable de mentionner pour tous les médecins de l'institution le statut conventionné ou non, cela devient beaucoup plus difficile de mentionner les tarifs de tous les prestataires. C'est en toute hypothèse sur le prestataire que pèse l'obligation finale. S'il a recours à l'affichage de sa structure d'exercice (comme celui mis en place par l'hôpital), il lui appartient de s'assurer que celui-ci répond, pour sa pratique, aux exigences légales. Si le prestataire de soins est non-conventionné et qu'il ne respecte pas l'obligation d'information dans toutes ses modalités, celui est obligé de se soumettre aux prix indiqués par l'accord. De plus, les dispensateurs de soins qui ne se soumettent pas à l'obligation d'affichage encourent une amende de 125 euros.