...

Au fil des recherches, l'espoir de pouvoir, un jour, guérir le diabète s'est ainsi transformé d'une chimère en une possibilité mais à un rythme de réplication encore trop lent pour aboutir, aujourd'hui, à une réalité tangible grâce à l'accélération du processus de réplication cellulaire. Mais, restons réalistes, si l'horizon se dégage, le chemin est encore long avant de voir disparaître le diabète de type 1 et 2.Dans le diabète de type 1, la masse des cellules bêta du pancréas productrices de l'insuline est réduite de plus de 90% et de près de 50% en cas de diabète de type 2.Pour remédier à ce manque de cellules et dans l'espoir de pouvoir guérir ces patients, les chercheurs se sont lancés dans la voie du replacement via des transplantation du pancréas ou d'îlots de cellules pancréatiques mais ces procédures nécessitent des donneurs, rares, ce qui fait que seuls quelques milliers de patients diabétiques peuvent en bénéficier alors qu'ils sont plus de 400 millions dans le monde. Sans oublier que ces procédures nécessitent la mise sous immunosuppresseurs à vie. Autre voie récente, le recours à des cellules souches mais cette technique demeure toujours très expérimentale et est, de plus, très coûteuse pour en envisager l'emploi à large échelle. Devant ce constat, plusieurs groupes de scientifiques ont alors envisagé le problème sous un angle différent axé sur des solutions permettant au corps humain de produire par lui-même des cellules bêta pancréatiques.Cette approche différente est au centre des travaux menés par l'équipe du Dr Andrew Steward à la Faculté de Médecine Icahn, Hôpital Mount Sinaï, New-York. En 2015, cette équipe publiait, dans la revue Nature Medicine, les résultats d'une première étude expérimentale montrant que l'administration d'un inhibiteur spécifique du DYRK1A, l'harmine, induisait un taux de réplication de 2% par jour des cellules bêta. Intéressant mais bien insuffisant dans la perspective d'une restauration ad integrum de la masse cellulaire bêta. De plus, l'harmine est extrait des racines d'une plante d'Amazonie connue pour induire de puissants effets hallucinogènes. S'il était évident qu'il fallait progresser dans cette voie intéressante, il était aussi urgent d'identifier des substances à action plus rapides sur la prolifération cellulaire, plus spécifiques des cellules bêta du pancréas et surtout plus sures. Ainsi, d'autres équipes américaines ont combiné inhibiteurs de DYRK1A et inhibiteurs de TGFbêtaSF, une famille de protéines dotées de multiples mécanismes biologiques axés sur la croissance et la différenciation cellulaire ainsi que sur l'homéostase et l'immunité, avec pour résultats un taux de croissance de 8% par jour mais, revers de la médaille, avec un très faible niveau de spécificité pour les cellules bêta du pancréas.La nouvelle étape, qui fait l'objet de la présente publication, part d'une étude mené dans le cadre d'une thèse soutenue par le Dr Courtney Ackeifi, une assistante du Dr Steward, qui explorait, in vitro, un large spectre de substances pharmacologiques qui, associées à l'harmine, amélioreraient son efficacité sur la régénération cellulaire ainsi que sa spécificité aux cellules bêta du pancréas. La solution a été trouvée en combinant n'importe quel agoniste du GLP-1 (dont la spécificité pour les cellules bêta est bien connue) avec n'importe quel inhibiteur de DYRK1A (pas d'effet de classe donc). Cette combinaison induit un effet synergique qui permet d'obtenir un taux de prolifération de l'ordre de 5 à 6% par jour et qui est spécifique des cellules bêta. Cet effet est observé tant sur les cellules bêta issues d'individus normaux que de patients atteints de diabète de type 2. In vivo, on observe une augmentation de la prolifération cellulaire, de la sécrétion en insuline ainsi qu'une amélioration du contrôle glycémique lorsque des cellules bêta humaines sont transplantées sur des souris diabétiques. Enfin, on n'observe aucun effet secondaire sérieux chez ces souris au cours d'un suivi court de 7 jours. Pour les investigateurs, pareil taux de réplication devrait permettre de restaurer la masse des cellules bêta dans un délai de 2 ou 3 ans. La prochaine étape consistera à évaluer la durée de vie des cellules ainsi produites, tant in vitro que in vivo, ainsi que le profil d'innocuité, les doses et le schéma d'administration idéal. Comme on le voit, l'impensable est devenu possible mais le chemin est encore long avant de débuter les études chez l'homme.