L'année dernière, le Parlement européen décidait d'interdire la vente de nouveaux véhicules au diesel ou à l'essence à l'horizon 2035. Une mesure qui fait partie du fameux Green Deal. Mais qu'en est-il aujourd'hui?
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En amont des élections européennes de juin, Manfred Weber, le président allemand des chrétiens démocrates au Parlement européen, a annoncé qu'il ne soutenait plus le Green Deal. Un virage politique à 360°. Le Green Deal porte certes la signature du social-démocrate-vert Timmermans, mais il a en fait été créé à la demande de la chrétienne-démocrate Angela Merkel, chancelière allemande jusqu'il y a deux ans. Celle-ci avait soutenu les constructeurs automobiles allemands contre vents et marées pendant de nombreuses années, pour leur tourner finalement le dos en 2015, quand le public a découvert que Volkswagen trafiquait le logiciel de ses véhicules diesel pour fausser leur taux d'émission de CO2. Sans le soutien de leur puissant allié, BMW, Mercedes et Volkswagen se sont retrouvés particulièrement fragilisés et démunis face à la transition des moteurs à combustion vers les moteurs électriques. En matière d'innovation technologique, ils ont rapidement perdu leur position de leadership, au profit de Tesla et d'une poignée d'autres constructeurs sud-coréens et chinois, à tel point que l'avenir de l'ensemble de l'industrie automobile allemande semble compromis. En outre, les normes et objectifs liés aux émissions de CO2 toujours plus stricts ont fait exploser le prix des nouveaux véhicules à combustion classique, les réservant donc aux plus riches. Dans le même temps, l'électrification du parc automobile peine à garder la cadence annoncée, et ce pour une raison bien connue: pour le consommateur moyen, un véhicule électrique reste financièrement difficile à aborder. Leur autonomie est en outre limitée et le développement de l'infrastructure de recharge laisse encore à désirer. Il s'avère aussi aujourd'hui qu'un véhicule électrique perd beaucoup plus de valeur que son équivalent essence ou diesel, du fait de la courte durée de vie des batteries et du coût élevé du remplacement des cellules électriques. Quant aux frais d'entretien et de réparation, les constructeurs les ont clairement minimisés. Enfin, force est de constater que les voitures électriques en circulation souffrent de bien des maux. Notons tout de même que le développement de batteries plus performantes et durables est en cours et que la masse produite fera sans nul doute baisser leur prix à la pièce. L'Europe connaît actuellement un retour à la hausse des ventes de véhicules hybrides rechargeables. Ces véhicules ont été et sont toujours décrits par les marques comme le meilleur des deux mondes, car ils combinent la conduite électrique et une grande autonomie. Malheureusement, leur apport à l'écologie est minime. Ils ont été commercialisés par les marques allemandes pour masquer leur retard technologique en matière d'électrification face à Tesla. Les derniers hybrides rechargeables ont une autonomie purement électrique de 100 kilomètres et atteignent des valeurs d'émissions WLTP inférieures à 20 g/km, ce qui leur donne droit à des incitations fiscales. En réalité, leur empreinte écologique est peu favorable. En effet, un véhicule hybride rechargeable contient deux moteurs et deux batteries, pèse 300 à 350 kg de plus qu'une voiture à essence "normale" ou qu'un véhicule hybride à recharge automatique. Si le conducteur ne recharge pas son hybride rechargeable après chaque trajet, le bilan environnemental est encore plus négatif. Le chef du PPE Manfred Weber se trouve donc en position compliquée et, dans les faits, le Green Deal a plutôt des allures de China Deal. À l'approche des élections allemandes et européennes, M. Weber opte pour la fuite en avant et préconise des corrections radicales au Green Deal: "Je suis favorable à la levée de l'interdiction sur la vente de nouveaux véhicules à combustion après 2035." Par-là, l'intéressé tente de mettre le parti chrétien-démocrate à l'abri, parfaitement conscient que la chancelière Merkel constitue pourtant l'une des initiatrices du Green Deal. Une fois de plus, on assiste à des petits jeux politiques qui témoignent d'un manque de vision et de courage politique, une absence de volonté de soutenir le renouveau de la construction automobile européenne et de regagner la confiance des électeurs. Contrairement à Angela Merkel, Manfred Weber semble à l'écoute des doléances des patrons de l'industrie automobile allemande. Ces dernières semaines, BMW et Volkswagen ont demandé à plusieurs reprises une révision du Green Deal. Les réactions des autres formations politiques du Parlement européen sont à surveiller.