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"A ujourd'hui, nous clôturons un chapitre épineux qui s'est éternisé pendant plus de 25 ans", se félicitait vendredi dernier le ministre Fédéral de la Santé, Frank Vendenbroucke. Même son de cloche du côté de Valérie Glatigny, ministre communautaire de l'Enseignement supérieur. Jean-Claude Marcourt, son prédécesseur, n'était pas arrivé à un compromis avec Maggie De Block. "Il est toujours nécessaire de prendre en compte la spécificité des besoins en praticiens de la santé de la Wallonie et de Bruxelles, en sachant que, d'une part, la réalité sociologique des étudiants francophones n'est pas la même que celle de la Flandre et, d'autre part, que les facultés francophones accueillent un nombre important d'étudiants français, des étudiants qui repartent dans la grande majorité des cas exercer leur métier en France", pointe le président du Parlement wallon dans les colonnes du Soir. "L'accord d'aujourd'hui ne répond toujours pas à la carence de médecins en Wallonie."Les étudiants francophones sont du même avis que l'ancien ministre PS et "regrettent amèrement le projet d'accord entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et le Gouvernement fédéral de mettre en place un concours qui n'arrangera ni la situation désastreuse de la médecine en Communauté française, ni les inégalités d'accès aux études". Et d'ajouter. "Les majorités politiques ont décidé la mise en place d'un concours qui ne fera qu'empirer les effets d'un système de quota basé sur des théories économiques douteuses ne permettant pas de répondre à la demande toujours plus importante en soins de santé." Côté syndical, la nouvelle est par contre très bien accueillie. Au GBO, on félicite "l'intelligence et la prise en considération de l'intérêt supérieur, à savoir celui de la santé publique, de l'accès aux soins, des médecins en formation ou à former et des médecins en activité sur le terrain. Bravo et merci aux deux ministres de nous sortir par le haut de plus de 30 ans de la saga surréaliste des numéros Inami!"Le GBO regrette toutefois le principe du concours. "Il est un outil de sélection sociale négative s'il est proposé à l'entrée des études. Par ailleurs, il n'y a pas d'outil scientifiquement validé pour garantir, avant même qu'ils n'aient commencé à étudier, une sélection efficace de futurs médecins, avec toutes les qualités scientifiques et humaines requises."L'Absym, de son côté, estime que l'essentiel est la qualité de la formation. Le vrai plafond est la capacité de formation du système de santé, estime le Dr Gilbert Bejjani, président de l'Absym-Bruxelles. Il souligne que la Commission de planification objective désormais les besoins et que le ministre Vandenbroucke repart d'une page blanche, ce qui est tout bénéfice pour la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le Dr Bejjani reconnaît que par le passé, on a mal valorisé certaines spécialités cliniques. Mais la situation actuelle est différente: nous vivons sous liberté européenne de circulation. "Tout le monde peut se déplacer. Il n'y a pas un "concours européen" [de médecine], on peut faire médecine où on veut comme aux États-Unis où on sait très bien qu'il y a des universités plus réputées que d'autres. C'est la même chose en Europe. Nous ne savons pas quel pays forme mieux les médecins... Je pense que la Belgique est assez bien classée en matière de qualité de la formation. L'Absym rappelle simplement que la qualité de la formation est le facteur limitant: on ne peut pas former indéfiniment des médecins. Et l'absence totale de contingentement débouche sur des situations assez tristes dans lesquelles l'étudiant ne parvient pas à recevoir un agrément pour exercer."Le concours n'est pas la panacée car il manque de subtilité, estime enfin le Dr Bejjani. "Le quota est fixé, on ne peut le modifier. Certains le réussiront mais échoueront durant les études. Que feront-ils? Avec l'examen, on peut moduler les exigences demandées aux candidats médecins en fonction du nombre de numéros Inami."Le Dr Christophe Barbut, président du Collège de médecine générale (CMG), estime quant à lui que cet accord pose des bases pour aborder enfin des questions de fond. "La Commission fédérale de planification entre dans son rythme de croisière. Nous allons pouvoir nous attaquer aux questions de fond. Certaines ont été réglées avec l'accord de vendredi dernier, à l'instar de la dette de surplus de quotas et l'augmentation du nombre de médecins généralistes. Maintenant, il faut que l'offre s'adapte à un métier en pleine évolution. La médecine générale a changé. Il faut donc élargir le calcul et ne pas se contenter d'une règle de trois améliorée: la population vieillit, les maladies chroniques vont augmenter en conséquence et les médecins travaillent différemment. Un calcul basé sur ces éléments pour obtenir un nombre d'ETP nécessaires avec une marge d'erreur ne suffit pas pour fixer le nombre de médecins à former, quelle que soit la spécialité. Il y aura une inflation de la demande d'ETP de médecins qui sera ingérable. Il faut donc que cela entre dans un cadre plus large d'organisation des soins de santé."Cet accord est donc un premier pas, mais il faut continuer à travailler. "Avec cet accord, on arrête de régresser. On oublie les dettes, on a des accords de principe qui indiquent formellement que la médecine de première ligne est une priorité et on place un concours à l'entrée. Ce sont, selon moi, des bonnes bases. Mais nous ne nous sommes pas encore concertés au niveau du collège pour vous donner la position officielle du CMG à ce sujet."