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à découvrir derrière Perpignan et la plage de sable fin de Canet-en-Rousillon, les Pyrénées Orientales constituent, loin de la foule des baigneurs, un paradis de merveilles naturelles et historiques ; l'on peut y accéder via le Train Jaune, micheline aux allures de tortillard (30 à l'heure de moyenne) qui sillonne entre vallées et massifs, entre tunnels et précipices, et offre des vues majestueuses sur le relief pyrénéen. Ce TER d'un genre particulier que les habitants groupés en association défendent devant la volonté de la SNCF de le privatiser, n'est pas qu'un simple train touristique, dans un pays dont les routes sont parfois coupées à la froide saison par la neige ou par un éboulement, comme ce fut le cas il y a trois hivers. La région a, voici deux ans à peine, débloqué 60 millions pour sauver et réhabiliter cette ligne magique. Ce train peut se prendre à Villefranche-de-Confluent à une bonne demi-heure de Perpignan seulement: le train grimpe ensuite dans la montagne, desservant quelques villages, notamment Fontpédrouse, jusque Latour-de-Carol à 1.232 mètres d'altitude sur un dénivelé de plus de 800 mètres. L'un des arrêts de cette ligne enchanteresse (entre massif de pins à crochets et sommets arides ou s'accrochent justement encore l'été quelques névés) se nomme Mont-Louis, ville crée ex nihilo par la volonté de Louis XIV lorsqu'en 1659, faisant la paix avec l'Espagne à la fin de la guerre de Trente Ans, il hérite du Roussillon. Dans cette région catalane, le Royaume de France va se protéger de menaces extérieures et intérieures par l'entremise de constructions d'architecture militaire, oeuvres de Vauban, comme celle de Villefranche-de-Confluent notamment. Elle est classée patrimoine universel de l'Unesco comme celle de Mont-Dauphin dans les Alpes, et dont Mont-Louis est la soeur jumelle. Sauf que cette dernière a été occupée par les militaires depuis sa fondation en 1679 jusqu'à aujourd'hui: l'armée française l'utilise comme centre de formation et accueille d'autres partenaires de l'Otan. Le site, remarquablement préservé, se visite cependant et permet d'admirer l'architecture typique, austère - en étoile et éperons - voulue par Vauban pour résister au canon - il est vrai que l'Espagne n'est qu'à 20 minutes en voiture, mais pas d'époque. Une seule fois, à la Révolution, les Espagnols eurent l'idée de la prendre, mais furent à leur tour pris par surprise par un certain général Dagobert qui, préalablement, attaqua leur campement. Si, durant la Seconde Guerre mondiale, la région fut relativement préservée de l'ouragan des combats, au cours de la guerre d'Espagne, la colonne Durruti y fit halte, dans la foulée d'un million de réfugiés qui passèrent la frontière pour fuir le franquisme. Au bas de la citadelle, une petite ville mit du temps à prendre vie (ces Catalans fiers de leur langue et culture voyaient d'un mauvais oeil le rattachement au Royaume de France), mais finit par se développer jusqu'à compter 900 habitants. Un incendie au début du 18e permit de donner cohérence au bâti de pierre et de lauze, et ce, jusqu'à aujourd'hui, même si cette "ville" ne compte plus que 100 habitants pour 2.500 militaires dans la citadelle. Mont-Louis s'enorgueillit également de posséder le premier four solaire mis au point par l'ingénieur Félix Trombe en 1949, qui précéda celui de Font-Romeu - projet plus imposant du même concepteur, et qui sert de lieu d'expérimentation. Ce four n'utilisant que les rayons du soleil concentrés par un système de miroir (grand héliostat et concentrateur convexe de 860 petits miroirs) et qui produit céramique et bijoux, peut porter en quelques heures des pièces jusqu'à une température de 4.000 degrés: ceci sans pollution ni consommation d'énergie fossile, avec laquelle le temps de cuisson passe du simple au triple. L'on en découvre le fonctionnement en suivant un Jamy local, qui effectue quelques expériences en expliquant le principe du four. Désormais dirigé par un ingénieur spécialisé en énergie solaire qui se veut l'héritier du concepteur, ce musée privé développe des initiatives de fours solaires notamment à usage domestique (pour la cuisine) au Sénégal et au Maroc. Ce qui permet de réduire le labeur des femmes et enfants - qui dans le cas du four traditionnel se chargent de la collecte du bois plutôt que d'aller à l'école, et la déforestation due à cette pratique (cette technologie permet d'éviter un déboisement de 100 ha par village). Il y eut même une centrale électrique solaire dans la région, la Cerdagne, du nom de Thémis: voulue par Giscard, le projet test fut fermé par Mitterrand qui ne jurait que par le nucléaire (le site a été réhabilité en 2004 pour devenir un centre de recherche solaire). Devant la montée d'une conscience écologique, l'idée a été reprise à Llo, toujours dans les Pyrénées Orientales, où une centrale de 10 mégawatts créée en 2019 alimente actuellement près de 100.000 habitants en électricité. Bref, il n'y pas que le train qui soit électrique dans cette vallée...