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Chaque année, le Conseil supérieur de la santé (CSS) actualise ses recommandations sur la vaccination contre la grippe saisonnière. Aujourd'hui, il insiste sur l'importance de se faire vacciner pour se protéger mais aussi pour soulager les hôpitaux et la première ligne l'hiver prochain, si la saison grippale devait coïncider avec un pic de Covid-19. Les priorités restent les mêmes, à savoir vacciner contre la grippe saisonnière trois groupes cibles : les personnes à risque de complications (femmes enceintes, patients souffrant d'une affection chronique, plus de 65 ans, personnes en institution, enfants de plus de six mois sous thérapie à l'aspirine au long cours) ; le personnel du secteur de la santé ; et les personnes vivant sous le même toit que des personnes à risque ou d'enfants de moins de six mois. " Indépendamment du Covid-19, la vaccination contre la grippe garde toute son importance. Chaque année, 700 à 1.000 personnes meurent de cette affection en Belgique, jusqu'à 2.000 à 3.000 quand le vaccin ne correspond pas tout-à-fait aux virus circulants. Cette année, la saison de la grippe a été interrompue dans certains pays parce que les gens ont été confinés. En Belgique, nous avons connu une saison de grippe normale ", commente le Dr Yves Van Laethem, expert au CSS et infectiologue au CHU Saint-Pierre (Bruxelles). Le deuxième argument repose sur l'éventuelle saisonnalité du Sras-CoV-2 : " Rien n'empêche de penser que, comme tout virus respiratoire, il réapparaisse dans nos régions en saison hivernale. Est-ce que ce sera en octobre-novembre-décembre, avant la grippe, ou en décembre-janvier-février, en même tant que la grippe ? On n'en sait rien "." En tant que Conseil supérieur de la santé, notre rôle est de dire qu'il y a des raisons de santé un peu indirectes, un peu altruistes, qui permettraient de soutenir le système, si par malchance les deux épidémies coexistaient. C'est dans ce sens là que va l'avis du CSS cette année ", commente-t-il. Le CSS rappelle ainsi l'importance de la vaccination du personnel soignant pour protéger indirectement les patients mais aussi pour assurer leur propre protection et leur disponibilité en cas de nouvelle vague du Covid-19. " En Belgique, on atteint péniblement 30% en moyenne (15-20% à 60-70%, selon les institutions). Ensuite, on réitère le fait qu'il faut se faire vacciner si on a plus de 65 ans et si on a des pathologies sous-jacentes, parce que si ces personnes font la grippe, elles risquent d'être hospitalisées et donc d'occuper des lits. Or on sait que chez les patients chroniques, le taux de vaccination n'est pas bon non plus (30-40%) ", rappelle le Dr Van Laethem. C'est pour les mêmes raisons que le CSS indique qu'il est également souhaitable de mettre l'accent sur la vaccination des 50-65 ans contre la grippe saisonnière. " Auparavant, on n'insistait guère sur cette catégorie d'âge qui fait des grippes qui conduisent parfois à l'hôpital, rarement en SI, mais qui fait plus de surinfections bactériennes et qui risque donc de demander du travail à la première ligne "." Nous aimerions donc conscientiser ce groupe qui ne se vaccine pas bien (20-25%). Tout en sachant qu'il faudrait aussi disposer d'assez de vaccins. Le ministère est au courant, j'espère qu'il a essayé d'en garder suffisamment pour la Belgique. En Europe, certains États ont demandé plus de doses, il y aura donc peut-être des discussions sur la répartition des vaccins entre les pays européens ", tempère-t-il. En France, l'Académie nationale de médecine a rendu un avis recommandant d'associer la vaccination antigrippale et la vaccination antipneumococcique chez les plus de 65 ans ; de rendre obligatoire la vaccination antigrippale pour tous les soignants et les personnels sociaux en contact avec des personnes vulnérables ; et d'inscrire l'obligation pour les médecins de proposer cette vaccination à toutes les personnes consultantes. En Belgique, le CSS va rendre en juin un avis sur le vaccin pneumocoque chez l'adulte. " Le pneumocoque ne joue pas un rôle évident" par rapport au Covid, estime Yves Van Laethem. Il n'y a pas beaucoup d'articles sur la surinfection bactérienne dans cette infection, il n'y a donc pas lieu de vacciner contre le pneumocoque en raison du Covid, il faut vacciner pour lui-même. D'autant plus que chez nous, le vaccin contre le pneumocoque a un coût qui n'est pas négligeable. A nouveau, si vous avez une infection à pneumocoque et que vous devez être hospitalisé, vous allez occuper un lit ".De même, l'expert du CSS ne plaide pas pour obliger le personnel soignant à se faire vacciner : " Nous avons toujours décidé, sauf raison majeure, de ne pas rendre ce vaccin obligatoire."Enfin, faut-il obliger les médecins à proposer cette vaccination à toutes les personnes en consultation ? " Je n'en vois pas vraiment l'utilité. Si on avait des millions de doses de vaccin, on pourrait faire ce qu'on veut mais, ici, je pense que la demande potentielle va déjà augmenter, si en plus il faut le proposer aux plus jeunes, je ne sais pas comment on pourra y répondre. C'est un voeu pieux, un peu à l'américaine où l'on préconise de vacciner toutes les personnes de plus de six mois. Je n'ai rien contre le principe de la vaccination globale, c'est une méthode simple, mais de facto non réalisable pour l'instant."Dans l'état actuel des choses, le CSS a par ailleurs estimé qu'il n'était pas de son ressort de dire à qu'il fallait donner un ordre de priorité pour les groupes à vacciner contre la grippe.