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La dysménorrhée est une plainte fréquente chez les adolescentes, avec une prévalence estimée à 70-93%. C'est la principale cause d'absence à l'école et à d'autres activités. Environ 20 à 40% des adolescentes indiquent qu'il arrive qu'elles n'aillent pas à l'école en raison de douleurs abdominales menstruelles. Dans 40% des cas, il y a un effet défavorable sur les résultats scolaires et la concentration. Les adolescentes souffrant de dysménorrhée sévère ont une moins bonne qualité de vie, ainsi qu'un risque accru de dépression et d'anxiété. Lors de la consultation, il est important, selon les auteurs, d'interroger la jeune fille à la fois individuellement et avec ses parents, car l'environnement proche est souvent déterminant pour la communication au sujet de la douleur ainsi que sa perception. Une anamnèse soigneuse des antidouleurs déjà utilisés est nécessaire. Une étude montre que 70 % des adolescentes utilisent des médicaments en vente libre pour les douleurs menstruelles, mais que 31 % seulement prennent la dose recommandée. La dysménorrhée primaire est due aux cycles anovulatoires. Cette forme se manifeste généralement dans les six à douze premiers mois suivant la ménarche. La douleur est due à de fortes contractions utérines, lesquelles sont provoquées par des taux élevés de prostaglandines provenant de l'endomètre hypertrophique. La douleur commence le plus souvent la veille des menstruations et persiste pendant les deux premiers jours suivant le début des saignements. Les taux élevés de prostaglandines peuvent provoquer toute une série d'autres symptômes, tels que céphalées, nausées, ballonnement abdominal et diarrhées. Le traitement de première ligne comprend des AINS. Il est préférable de commencer par des doses élevées, puis de diminuer la dose au cours des jours suivants. Si les AINS correctement dosés n'aident pas ou en cas de désir de contraception, la contraception hormonale combinée offre une alternative, que ce soit par voie orale, transdermique ou intravaginale. Ce traitement améliore la dysménorrhée, principalement parce qu'il limite la croissance de l'endomètre. La contraception hormonale combinée peut être administrée en toute sécurité selon un schéma cyclique ou continu. Les préparations purement progestatives constituent une alternative si les traitements combinés ne sont pas indiqués. Cela s'applique également aux dispositifs intra-utérins. Il faut recommander l'arrêt du tabac, car le tabac aggrave la dysménorrhée. Des douleurs menstruelles sévères qui persistent ou apparaissent pour la première fois un an après la ménarche indiquent une dysménorrhée secondaire. La vigilance est certainement de mise si la douleur s'intensifie progressivement et/ou adopte un caractère acyclique. L'apparition de saignements irréguliers et/ou abondants est également inquiétante. L'endométriose est la principale cause de dysménorrhée secondaire, après l'adénomyose utérine et les anomalies obstructives. Si les douleurs menstruelles deviennent telles que la jeune fille doit régulièrement s'absenter de l'école ou ne peut plus prendre part à ses activités normales, il faut penser à l'endométriose. Les adolescentes souffrant d'endométriose se plaignent généralement de douleurs pelviennes généralisées ainsi que des symptômes extra-utérins énumérés ci-dessus, qui sont dus à une production élevée de prostaglandines. Une plainte typique est une douleur qui survient pendant la défécation, mais qui s'estompe ou disparaît ensuite. L'examen de référence pour le diagnostic est une biopsie. Toutefois, une laparoscopie à visée purement diagnostique n'est pas recommandée. L'échographie n'est pas vraiment fiable pour exclure une endométriose, car des lésions superficielles peuvent passer inaperçues. L'IRM n'offre pas une bonne détection des lésions débutantes, de sorte que cet examen n'est également pas indiqué chez les adolescentes. La première étape est donc une tentative de traitement par contraceptifs hormonaux combinés ou préparations progestatives pures. Dans l'ensemble, le traitement contraceptif améliore la situation chez environ deux tiers des patientes. En cas d'endométriose, les AINS n'ont pas d'avantage clair par rapport au placebo. Les contraceptifs hormonaux combinés sont une option attrayante, surtout parce qu'ils ont peu d'effets indésirables. Si l'adolescente continue à se plaindre de douleurs avec une préparation cyclique, il est possible de passer à une pilule avec un schéma d'administration continu. Les contraceptifs contenant uniquement des progestatifs (oraux, intramusculaires ou intravaginaux) combattent la douleur plus efficacement (taux de succès de 80 à 100 %), non seulement parce qu'ils contrecarrent l'inflammation, mais aussi la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, laquelle jouerait également un rôle dans l'apparition de la douleur due à l'endométriose. Toutefois, les progestatifs purs entraînent un peu plus d'effets indésirables, tels que saignements imprévisibles, mastodynies, prise de poids et sautes d'humeur. La préparation intramusculaire dépôt d'acétate de médroxyprogestérone (DMPA) et le stérilet au lévonorgestrel (LNG) sont plus efficaces pour supprimer les menstruations que les formes orales. Ces deux options peuvent être utilisées en toute sécurité chez les adolescentes. La pose d'un stérilet au LNG peut être douloureuse chez les adolescentes. On signale aussi des crampes et des saignements imprévisibles, qui diminuent après trois mois. Au bout de deux ans d'utilisation, le DMPA provoque une diminution réversible de la densité osseuse, mais il n'y a aucune raison de supposer que le risque d'ostéoporose ou de fractures augmente. Deux ans après l'arrêt du traitement, la densité osseuse est à nouveau identique à celle que l'on mesure chez les femmes qui n'ont jamais utilisé ce produit. Les jeunes femmes attachent sans doute plus d'importance au contrôle des symptômes qu'à la diminution de la densité osseuse. Il est conseillé aux femmes traitées par DMPA de prendre des suppléments de calcium et de vitamine D. Il existe encore d'autres classes de médicaments pour le traitement de l'endométriose. Ils sont moins souvent utilisés (chez les adolescentes), soit parce qu'ils sont encore insuffisamment documentés, soit parce qu'ils ont des effets indésirables. Les analogues de la GnRH, par exemple, permettent de réduire la douleur chez les femmes adultes dans 80 % des cas, comme le DMPA et le stérilet au LNG. Cependant, l'administration de ces médicaments paralyse l'axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. La GnRH stimule l'hypophyse, parce que la sécrétion de cette hormone est pulsatile. L'administration continue d'analogues de la GnRH a un effet inhibiteur sur l'axe. La disparition de la sécrétion hormonale suite à l'utilisation d'analogues de la GnRH provoque les symptômes typiques de la ménopause. Chez les adolescentes, on se soucie surtout de l'impact sur la densité osseuse. C'est pourquoi les analogues de la GnRH n'arrivent qu'en deuxième position dans ce groupe d'âge, après les traitements hormonaux. En cas d'endométriose confirmée chirurgicalement, on recommande de ne pas utiliser d'analogues de la GnRH avant 18 ans, âge auquel la croissance osseuse est en grande partie terminée. La chirurgie est envisagée si le traitement médical n'a pas donné le résultat souhaité au bout de trois à six mois. L'intervention doit être confiée à un chirurgien expérimenté dans le traitement de l'endométriose chez les adolescentes, car l'aspect des lésions est souvent différent comparativement aux femmes adultes. Il n'y a actuellement aucune preuve que la chirurgie ralentisse la progression de la maladie chez les adolescentes ni qu'elle prévienne les problèmes de fertilité. Après l'intervention, il faut recommander à la patiente de poursuivre le traitement hormonal, afin d'éviter la dysménorrhée et les récidives.