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Chez plus de 90% des patients victimes d'un infarctus du myocarde, la coronarographie révélera une sténose manifeste (> 50%) dans au moins une artère coronaire. Chez les autres, cette atteinte est par contre absente ; on parle alors de MINOCA ( myocardial infarction with nonobstructive coronary arteries, infarctus du myocarde sans obstruction coronarienne). Les patients qui en souffrent se présentent avec une douleur thoracique et un taux de troponine accru ; des anomalies du segment ST sont généralement présentes à l'ECG. Pour distinguer clairement les deux cas de figure, l'infarctus "classique" est qualifié de CAD-AMI ( coronary artery disease acute myocardial infarction, infarctus aigu du myocarde associé à une coronaropathie). Les causes majeures de MINOCA sont l'endommagement/la rupture d'une plaque d'athérome et le spasme coronarien, mais la littérature mentionne aussi la thrombose et l'embolie coronariennes, ainsi que la dysfonction microvasculaire. La dissection spontanée d'une artère coronaire est une cause beaucoup plus rare. Les patients victimes d'un MINOCA sont généralement un peu plus jeunes que ceux qui ont subi un infarctus classique, et plus souvent de sexe féminin. Une atteinte du myocarde sans obstruction manifeste des artères coronaires débouche parfois sur un diagnostic que l'on ne peut pas qualifier d'infarctus à proprement parler, comme par exemple une myocardite ou un syndrome de Takotsubo - une dysfonction transitoire et en principe réversible du myocarde qui se manifeste souvent après un choc émotionnel (on parle aussi de "syndrome du coeur brisé"). Au cours de la phase aiguë, le MINOCA est donc considéré comme une hypothèse de travail, sachant que le diagnostic d'infarctus pourrait être écarté par la suite du processus diagnostique. Certaines publications mentionnent aussi parmi les causes du MINOCA des phénomènes non cardiaques comme l'embolie pulmonaire. Pour la pose du diagnostic, des directives comme celles de l' American Heart Association(1) accordent une place centrale à l'IRM cardiaque (avec rehaussement tardif après injection de gadolinium), parce que cet examen permet d'exclure une myocardite, un syndrome de Takotsubo et une cardiomyopathie et de confirmer un infarctus du myocarde. Les investigateurs de l'étude HARP, présentée lors du congrès virtuel de l'AHA dans le courant du mois de novembre, ont combiné l'IRM cardiaque avec la tomographie en cohérence optique (TCO), une technique basée sur la réflexion des ondes lumineuses qui permet de visualiser les structures en profondeur, comme une sorte de vue en coupe. La TCO est considérée comme la meilleure technique d'imagerie disponible pour la rupture de plaque et la dissection spontanée d'une artère coronaire, et on la préfère dans ce contexte à l'échographie intravasculaire.(2) Elle permet aussi de diagnostiquer les spasmes coronariens. L'étude HARP a inclus un peu plus de 300 femmes victimes d'un MINOCA, chez qui la combinaison de l'IRM cardiaque et de la TCO a permis de dévoiler la pathologie sous-jacente dans 85% des cas. Les diagnostics posés étaient ceux d'infarctus du myocarde (64%), de myocardite (15%), de syndrome de Takotsubo (3%) et de cardiomyopathie non ischémique (3%). Aucune cause n'a pu être retrouvée dans les 15% de cas restants. La majorité des patientes victimes d'un infarctus du myocarde présentaient une plaque endommagée ; un spasme vasculaire n'a été retrouvé que chez une minorité d'entre elles. Utilisées ensemble, les deux techniques d'imagerie permettaient d'obtenir des performances significativement meilleures que chacune séparément. (3) Pour le traitement du MINOCA, les médecins puisent dans l'arsenal disponible pour le CAD-AMI. Des travaux plus poussés seraient toutefois souhaitables pour déterminer les modalités de prise en charge optimales.