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Oh, cela peut être les vestiges d'un cimetière juif au bord d'un talus d'arbres, d'un pont métallique dont l'extrémité est mangée par la forêt, de l'intérieur d'une maison lépreuse dont les fantômes des habitants ont tiré le rideau. Cadavres de voitures, essaim de vieux pneus, bouche d'incendie pimpante perdue au milieu de falaises jurassiques, navires échoués dans l'herbe, hangar disloqué par la main invisible du vent, épave saisie par la rouille comme elle l'aurait été par la lave... toutes ses photos sont emplies de mélancolie (le squelette d'un toboggan au milieu d'une forêt juvénile), d'ironie (les tombes d'un cimetière mangées par les buildings tout proches), d'humour (la statue d'un iguanodon empêchée de fuir par un mur de parpaing) et de sagesse (quoi que fasse l'homme, le temps et la nature dévore ses réalisations : une caravane mangée par une dune de sable). Albums de vestiges humains magnifiés souvent plutôt que moqué par le cadre naturel qui les entoure et les cerne, cet album, bien que principalement réalisé en France (quelques clichés proviennent du sud de l'Espagne), et pour une bonne partie dans les Bouches-du-Rhône, rappelle dans ses prises de vue la sidération des bateaux sur la mer d'Aral, surpris par la disparition de l'eau. Ici, ces fantômes d'objets, de véhicules ou de bâtiments s'étonnent et s'exclament dans un dernier cri muet : il n'y a plus âme qui vive !