Le journal du Médecin : Alors que la Commission spéciale covid de la Région wallonne est en plein travail et publie ses débats sur le Net, où en est la commission de la Chambre sur la même thématique ?

Mathieu Bihet : Tout d'abord, je souhaiterai préciser que nous aurions souhaité une commission interparlementaire qui aurait pu examiner la gestion de cette crise sous toutes ses coutures et non pas par morceaux comme c'est le cas actuellement.

S'agissant de la commission fédérale, elle s'est déjà réunie plusieurs fois pour, notamment, présenter les rapports des experts ou entendre le responsable des relations internationales du SPF Santé. En effet, nous commençons par la vue la plus macro possible et depuis l'origine même de la crise : la Chine. Nos travaux débutent par l'analyse de l'harmonisation internationale des mesures de lutte contre le Covid-19 et la communication internationale.

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Ses travaux seront-ils retransmis sur le site de la Chambre ? Comment les citoyens pourront-ils suivre les débats et les conclusions ?

Les travaux de la commission spéciale Covid sont publics et retransmis en direct sur le site de la Chambre. De plus, les tribunes sont ouvertes au public mais il existe quelques restrictions liées au Covid. Dès ce vendredi 18 septembre, nous avons donc commencer le travail dit " de fond " et nous recevrons les représentants de différentes institutions (OMS, Sciensano, Commission européenne, etc). Les conclusions seront reprises dans un rapport complet qui contiendra des recommandations visant à améliorer la gestion d'une telle crise. Ce rapport sera présenté, débattu et voté au Parlement.

Les thématiques que vous allez aborder figurent sur le site de la Chambre (1) : Pouvez-vous être un peu plus explicite notamment quant au sujet " Achat, production et distribution du matériel de protection et de test, des médicaments et du traçage " ?

Il s'agit d'analyser l'état des stocks de matériel durant la crise, les possibles pénuries de matériel, les causes de celles-ci et les réactions que les autorités politiques et sanitaires ont eu dans un contexte de crise sanitaire mondiale. Nous aborderons aussi les contrats d'achats de matériel (masques, équipements de protection, qui a acheté du matériel, pourquoi, etc..) En gros, il s'agit d'examiner, dans le cadre d'un cluster distinct, le coeur de la gestion de crise sur le plan matériel et opérationnel.

Comment aborder des sujets dont les compétences sont partagées entre Fédéral et Régions ?

Les compétences sont d'attribution mais elles sont enchevêtrées. Afin de savoir qui est compétent pour chacune des matières, la Commission spéciale Covid a demandé aux services juridiques de la Chambre une note pour connaître avec certitude l'attribution de ces compétences. Cependant, il y a évidemment eu des coopérations entre les entités fédérées (responsables par exemple pour le suivi de contacts - contact tracing ) afin d'avoir une politique cohérente et coordonnée sur l'ensemble du territoire. Notre souhait initial, comme je le dis plus haut, pour voir clair dans cet enchevêtrement était de mettre sur pied une commission interparlementaire unique, qui aurait reçu la compétence pour tout analyser.

Cependant, il y a des éléments qui, à l'occasion de cette crise ont été liés de facto, je pense notamment à la compétence fédérale de la Défense et la compétence régionale de gestion des maisons de repos : les militaires sont venus en appui dans les maisons de repos.

La liste des experts a-t-elle finalement été fixée ? Quels seront leurs domaines de compétence ? Disposez-vous déjà de noms ?

Pour l'heure, nous avons trois experts désignés sur quatre. Les profils sont complémentaires et diversifiés : un épidémiologiste (Y. Coppierters), une infectiologue (L. Belkhir) et une experte en gestion et communication de crise (F. Laams). Nous demeurons dans l'attente d'un quatrième profil. Il n'y a pas de nom pour l'instant, tous les candidats soumis jusqu'aujourd'hui ayant refusé la mission.

Ils ont comme fonction de présenter un rapport préliminaire, méthodologique et de suggérer, par exemple, des auditions. Ils nous accompagneront tout au long de la tenue des travaux (la commission a été installé pour plusieurs mois).

Quelles responsabilités, erreurs éventuelles, seront-elles pointées ? La ministre de la Santé publique, en particulier, est-elle attendue en séance ?

L'objectif clair de cette commission est d'analyser tous les pans, sans exception, de la gestion. La commission doit analyser toutes les phases de la crise afin de faire ressortir les éléments ou les moments où cela a pu coincer. L'objectif final est de tirer des enseignements pour améliorer la gestion de la crise en Belgique (il s'agira en effet d'aboutir sur des recommandations). Beaucoup de personnes seront entendues par la commission : des ministres, les responsables d'administration publique, des scientifiques, les membres de comités qui conseillent et accompagnent le conseil national de sécurité etc. Alors oui, madame De Block sera entendue en sa qualité de ministre de la Santé publique et nul doute que de nombreuses questions lui seront adressées.

Mathieu Bihet (MR) lors de la session du 4 septembre., BELGA
Mathieu Bihet (MR) lors de la session du 4 septembre. © BELGA

L'enjeu est aussi d'analyser les décisions prises à la lumière des circonstances et des connaissances scientifiques du moment ; d'analyser par exemple les difficultés d'obtenir du matériel à l'aune de la pénurie mondiale de matériel au moment où nous, au même titre que les pays voisins par exemple, en avions besoin.

Des structures publiques vont également être passées à la loupe ainsi que les processus décisionnels internes à la Belgique que beaucoup décrivent comme trop lourds, trop bureaucratiques et qui ne tiennent pas assez compte du " terrain ".

Les députés feront-ils leur introspection également (le Parlement aurait pu faire mieux dans certains cas) ?

Dans l'examen du rôle de chacun, il conviendra de s'interroger effectivement sur le rôle que le Parlement a joué ou aurait dû jouer. Cependant, les commissions permanentes et, singulièrement, celle de la Santé se sont réunis durant la crise et les vacances pour justement suivre l'évolution de la gestion de la crise.

En tant que très jeune député (29 ans je crois), pensez-vous que les jeunes, presqu'immunisés par le virus Sras-Cov-2, ont été solidaires de leurs aînés ou se sont-ils sentis au contraire, intouchables et, comme certains le disent, irréponsables ?

S'agissant des jeunes (et très jeunes), les explications et connaissances scientifiques ont évolué en cours de crise notamment sur la possible transmission du virus par eux. Je veux rappeler aussi que des jeunes se sont portés volontaires pour leurs aînés (les courses, du travail de volontariat dans des structures d'accueil, etc.). D'autres n'ont toutefois pas nécessairement eu le comportement qu'on attendait d'eux. Mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'un problème de génération. J'ai également vu des plus âgés faire n'importe quoi pendant le confinement et pendant le déconfinement. Il y a des irresponsables dans toutes les catégories d'âge car je pense qu'il s'agit, avant toute chose, d'une question de responsabilité individuelle et de conscience civique.

(1) Préparation à une possible crise sanitaire à grande échelle (pré-corona), Fonctionnement, encadrement et financement du secteur des soins et du personnel soignant, Harmonisation à l'international et communication, Achat, production et distribution du matériel de protection et de test, des médicaments et du traçage, Coordination intra-belge de l'approche, de la communication et du confinement.

Composition

- N-VA : Kathleen Depoorter, Frieda Gijbels, Yngvild Ingels/Peter De Roover, Joy Donné, Wim Van der Donckt.

- Ecolo-Groen : Kristof Calvo, Barbara Creemers, Laurence Hennuy/Georges Gilkinet, Julie Chanson, Evita Willaert.

- PS : Eliane Tillieux, Patrick Prévot, Hervé Rigot/Ahmed Laaouej, Hugues Bayet, Éric Thiébaut.

- Vlaams Belang : Barbara Pas, Dominiek Sneppe/Ellen Samyn, Marijke Dillen.

- MR : Mathieu Bihet, Michel De Maegd/Nathalie Gilson, Emmanuel Burton.

- CD&V : Nawal Farih/Sammy Mahdi.

- PTP-PVDA : Sofie Merckx/Raoul Hedebouw.

- Open Vld : Robby De Caluwé/Bram Delvaux.

- sp.a : Karin Jiroflée /Jan Bertels.

Président : Robby De Caluwé (CD&V)

Vice-présidents : Laurence Hennuy (Ecolo-Groen) et Kathleen Depoorter (N-VA).

Rapporteurs : Patrick Prévot (PS), Barbara Pas (VB), Mathieu Bihet (MR) et Nawal Farih (CD&V).

Le journal du Médecin : Alors que la Commission spéciale covid de la Région wallonne est en plein travail et publie ses débats sur le Net, où en est la commission de la Chambre sur la même thématique ? Mathieu Bihet : Tout d'abord, je souhaiterai préciser que nous aurions souhaité une commission interparlementaire qui aurait pu examiner la gestion de cette crise sous toutes ses coutures et non pas par morceaux comme c'est le cas actuellement. S'agissant de la commission fédérale, elle s'est déjà réunie plusieurs fois pour, notamment, présenter les rapports des experts ou entendre le responsable des relations internationales du SPF Santé. En effet, nous commençons par la vue la plus macro possible et depuis l'origine même de la crise : la Chine. Nos travaux débutent par l'analyse de l'harmonisation internationale des mesures de lutte contre le Covid-19 et la communication internationale. Ses travaux seront-ils retransmis sur le site de la Chambre ? Comment les citoyens pourront-ils suivre les débats et les conclusions ? Les travaux de la commission spéciale Covid sont publics et retransmis en direct sur le site de la Chambre. De plus, les tribunes sont ouvertes au public mais il existe quelques restrictions liées au Covid. Dès ce vendredi 18 septembre, nous avons donc commencer le travail dit " de fond " et nous recevrons les représentants de différentes institutions (OMS, Sciensano, Commission européenne, etc). Les conclusions seront reprises dans un rapport complet qui contiendra des recommandations visant à améliorer la gestion d'une telle crise. Ce rapport sera présenté, débattu et voté au Parlement. Les thématiques que vous allez aborder figurent sur le site de la Chambre (1) : Pouvez-vous être un peu plus explicite notamment quant au sujet " Achat, production et distribution du matériel de protection et de test, des médicaments et du traçage " ? Il s'agit d'analyser l'état des stocks de matériel durant la crise, les possibles pénuries de matériel, les causes de celles-ci et les réactions que les autorités politiques et sanitaires ont eu dans un contexte de crise sanitaire mondiale. Nous aborderons aussi les contrats d'achats de matériel (masques, équipements de protection, qui a acheté du matériel, pourquoi, etc..) En gros, il s'agit d'examiner, dans le cadre d'un cluster distinct, le coeur de la gestion de crise sur le plan matériel et opérationnel. Comment aborder des sujets dont les compétences sont partagées entre Fédéral et Régions ? Les compétences sont d'attribution mais elles sont enchevêtrées. Afin de savoir qui est compétent pour chacune des matières, la Commission spéciale Covid a demandé aux services juridiques de la Chambre une note pour connaître avec certitude l'attribution de ces compétences. Cependant, il y a évidemment eu des coopérations entre les entités fédérées (responsables par exemple pour le suivi de contacts - contact tracing ) afin d'avoir une politique cohérente et coordonnée sur l'ensemble du territoire. Notre souhait initial, comme je le dis plus haut, pour voir clair dans cet enchevêtrement était de mettre sur pied une commission interparlementaire unique, qui aurait reçu la compétence pour tout analyser. Cependant, il y a des éléments qui, à l'occasion de cette crise ont été liés de facto, je pense notamment à la compétence fédérale de la Défense et la compétence régionale de gestion des maisons de repos : les militaires sont venus en appui dans les maisons de repos. La liste des experts a-t-elle finalement été fixée ? Quels seront leurs domaines de compétence ? Disposez-vous déjà de noms ? Pour l'heure, nous avons trois experts désignés sur quatre. Les profils sont complémentaires et diversifiés : un épidémiologiste (Y. Coppierters), une infectiologue (L. Belkhir) et une experte en gestion et communication de crise (F. Laams). Nous demeurons dans l'attente d'un quatrième profil. Il n'y a pas de nom pour l'instant, tous les candidats soumis jusqu'aujourd'hui ayant refusé la mission. Ils ont comme fonction de présenter un rapport préliminaire, méthodologique et de suggérer, par exemple, des auditions. Ils nous accompagneront tout au long de la tenue des travaux (la commission a été installé pour plusieurs mois). Quelles responsabilités, erreurs éventuelles, seront-elles pointées ? La ministre de la Santé publique, en particulier, est-elle attendue en séance ? L'objectif clair de cette commission est d'analyser tous les pans, sans exception, de la gestion. La commission doit analyser toutes les phases de la crise afin de faire ressortir les éléments ou les moments où cela a pu coincer. L'objectif final est de tirer des enseignements pour améliorer la gestion de la crise en Belgique (il s'agira en effet d'aboutir sur des recommandations). Beaucoup de personnes seront entendues par la commission : des ministres, les responsables d'administration publique, des scientifiques, les membres de comités qui conseillent et accompagnent le conseil national de sécurité etc. Alors oui, madame De Block sera entendue en sa qualité de ministre de la Santé publique et nul doute que de nombreuses questions lui seront adressées. L'enjeu est aussi d'analyser les décisions prises à la lumière des circonstances et des connaissances scientifiques du moment ; d'analyser par exemple les difficultés d'obtenir du matériel à l'aune de la pénurie mondiale de matériel au moment où nous, au même titre que les pays voisins par exemple, en avions besoin. Des structures publiques vont également être passées à la loupe ainsi que les processus décisionnels internes à la Belgique que beaucoup décrivent comme trop lourds, trop bureaucratiques et qui ne tiennent pas assez compte du " terrain ". Les députés feront-ils leur introspection également (le Parlement aurait pu faire mieux dans certains cas) ? Dans l'examen du rôle de chacun, il conviendra de s'interroger effectivement sur le rôle que le Parlement a joué ou aurait dû jouer. Cependant, les commissions permanentes et, singulièrement, celle de la Santé se sont réunis durant la crise et les vacances pour justement suivre l'évolution de la gestion de la crise. En tant que très jeune député (29 ans je crois), pensez-vous que les jeunes, presqu'immunisés par le virus Sras-Cov-2, ont été solidaires de leurs aînés ou se sont-ils sentis au contraire, intouchables et, comme certains le disent, irréponsables ? S'agissant des jeunes (et très jeunes), les explications et connaissances scientifiques ont évolué en cours de crise notamment sur la possible transmission du virus par eux. Je veux rappeler aussi que des jeunes se sont portés volontaires pour leurs aînés (les courses, du travail de volontariat dans des structures d'accueil, etc.). D'autres n'ont toutefois pas nécessairement eu le comportement qu'on attendait d'eux. Mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'un problème de génération. J'ai également vu des plus âgés faire n'importe quoi pendant le confinement et pendant le déconfinement. Il y a des irresponsables dans toutes les catégories d'âge car je pense qu'il s'agit, avant toute chose, d'une question de responsabilité individuelle et de conscience civique.