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En mai 2020, Sciensano notait déjà que "le pourcentage de personnes (18 ans et plus) qui restent assises plus de huit heures par jour (56,1%) avait plus que doublé par rapport à l'enquête de santé de 2018 (23,4%)". Sur base des données disponibles fin 2021, on constate que les Belges jouissent en général d'une bonne santé, mais qu'il reste encore des points d'attention comme le tabagisme, la nutrition, la consommation d'alcool, le surpoids et... l'activité physique : "En 2018, seulement 30% de la population adulte suivaient la recommandation de l'OMS qui préconise une activité physique d'intensité modérée d'au moins 150 minutes par semaine, en dehors du contexte du travail. Seulement 20% des garçons et 13% des filles de 11 à 18 ans ont suivi la recommandation pour les jeunes (60 minutes AP/j)". Or, le lien entre activité physique et maladies cardiovasculaires, cancers, diabète etc. est de plus en plus documenté. Les conseils pour inciter à contrer les effets délétères de la sédentarité se sont multipliés ces derniers mois placés sous le sceau du télétravail (réduire le temps quotidien en position assise, se lever une minute toutes les heures ou cinq à dix minutes toutes les 90 minutes et marcher...). Ceci s'ajoutant aux recommandations générales: 30 minutes d'activité cardiorespiratoire (monter les escaliers, marcher à bonne allure...) cinq fois par semaine, renforcement musculaire une à deux fois par semaine (porter une charge lourde, natation, aérobic...) et exercices d'assouplissement (gymnastique, danse, yoga) deux à trois fois par semaine. Ceci est d'autant plus important pour les patients souffrant d'une maladie chronique puisque l'activité physique fait partie intégrante de leur prise en charge. Or, nombreux sont ceux qui abandonnent les programmes d'activité physique adaptée (APA) qui leur sont de plus en plus souvent proposés en fédération Wallonie-Bruxelles. Comment motiver ces patients et soutenir leur engagement dans un style de vie plus actif? " L'ensemble de la prise en charge doit être orienté vers le patient, le but est de le placer au centre de son changement et de l'orienter dans un processus d'action autodéterminé. L'entretien motivationnel est un outil efficace permettant d'identifier les portes d'entrée vers la mise en place du comportement souhaité, orienté vers la satisfaction des trois besoins psychologiques fondamentaux: le besoin de compétence, d'autonomie et d'appartenance sociale", expliquent Alexandre Mouton et François Bodson du département des Sciences de la motricité de l'université de Liège, dans la Revue médicale de Liège. Ces auteurs reprennent le modèle développé par Massart B. et al. autorisant une transition progressive du patient vers un statut de participant-acteur de sa prise en charge physique. Dans l'idéal, l'intégration à une structure en APA suivra une prescription médicale indiquant l'AP comme un moyen thérapeutique. " À partir de ce moment, l'individu n'est plus considéré comme un 'patient', mais comme un 'participant à un programme de reconditionnement physique'. Ceci a pour objectif de démédicaliser progressivement le processus de prise en charge, permettant à la personne de ressentir le passage du milieu médical au milieu associatif ou sportif, ce qui lui permet un ancrage plus pérenne au sein de son environnement direct. À cette étape, le patient intègre en général un programme spécifique intermédiaire, encadré par un éducateur physique formé en APA, sur une durée minimale de trois mois à raison d'une séance par semaine. Ce type de programme est en plein développement en fédération Wallonie-Bruxelles (par exemple "Sport sur ordonnance", "Activité physique sur prescription", "Citoyen sportif")", précisent-ils en ajoutant " qu'il est préférable que chaque programme d'APA s'entoure d'associations sportives locales afin de proposer des solutions de pratique à long terme". Les médecins généralistes sont bien sûr au premier rang pour promouvoir ce type de programmes institutionnels: " Il a été démontré que les conseils des médecins ont un impact majeur et supérieur aux conseils des médias et autres." Cependant, les auteurs relèvent quelques freins à ces prescriptions: le manque de temps en consultation, le désintérêt concernant l'AP, les caractéristiques personnelles des médecins (ceux en surpoids prescriraient moins d'AP, les jeunes et les femmes en prescrivent plus), le manque de protocoles et d'outils adéquats. " Cette situation tend à prouver qu'il est nécessaire d'armer les professionnels de santé afin qu'ils soient mis en position de prescrire l'AP le plus efficacement possible. La promotion de l'APA n'est pas uniquement sous la responsabilité des médecins traitants. En effet, l'ensemble des acteurs intervenant dans la prise en charge du malade chronique (kiné, infirmier, médecin spécialiste, ergothérapeute...) doit être conscient de l'existence de ce genre de programme ainsi que de ses bénéfices. (...) Néanmoins, le principal acteur de ce changement de comportement reste le malade chronique." D'où l'importance de l'entretien motivationnel, de l'écoute active, de l'empathie du thérapeute ainsi que de la fixation d'objectifs individualisés, en identifiant les freins perçus par le patient. " Convaincre de s'engager dans un programme est une grande étape, y participer et s'y tenir reste le plus compliqué!", estiment les auteurs qui donnent quelques pistes pour maintenir la motivation pendant le programme d'APA et après (pratique en groupe, rôle de l'encadrant, feed-back sur la progression, fixation d'objectifs, opportunités de pratique en dehors du programme...). En bref, faire en sorte que l'activité physique soit ressentie comme un plaisir et une nécessité et non comme une obligation.