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Dans le cadre du cancer du sein, la chimiothérapie n'est pas administrée de manière systématique car toutes les femmes n'en tirent pas un bénéfice en raison d'un pronostic naturellement favorable. Le choix du praticien se base sur des critères clinico-pathologiques: âge de la patiente, taille et agressivité de la tumeur, envahissement ganglionnaire et la décision d'administrer ou non une chimiothérapie adjuvante varie entre les centres d'oncologie. Proposer une nouvelle méthode simple, peu coûteuse et facilement utilisable dans tous les centres d'oncologie comme outil d'aide à la décision thérapeutique basé sur l'IA, c'est le défi que Gustave Roussy et Owkin ont voulu relever. L'étude rétrospective Race AI a été présentée récemment en session orale de l'Esmo (Société européenne d'oncologie médicale) 1. Elle a été menée sur une cohorte de 1.400 patientes prises en charge à Gustave Roussy entre 2005 et 2013 pour un cancer du sein hormonosensible (HR+, HER2-) et localisé. Ces femmes ont été traitées par chirurgie, radiothérapie, hormonothérapie, et parfois chimiothérapie afin de diminuer le risque de rechute. L'objectif de cette étude est d'établir un score de risque de rechute grâce à l'IA en combinant l'analyse de lames d'histologie colorées et numérisées obtenues après biopsie de la tumeur, et de données cliniques, de traitement et de suivi. Utilisées au quotidien dans les départements de pathologie par les anatomo-pathologistes, les lames possèdent une information très riche et déterminante pour la prise en charge du cancer. À l'instar d'un scanner de bureau qui digitalise un texte, un scanner de lames, équipement courant dans les laboratoires, numérise les informations morphologiques présentes sur la lame. Race AI montre que l'IA peut prédire de manière fiable avec une AUC de 81% quelles sont les patientes qui sont le plus à risque de rechute métastatique dans les cinq prochaines années. Il s'agit d'une des premières preuves de concept qu'une IA peut identifier des paramètres associés à la rechute que le cerveau humain n'avait pu détecter. "Gagner du temps sur les étapes qu'une machine peut tout à fait gérer en complément de l'oeil de l'expert, c'est là tout l'intérêt de l'IA au coeur du dépistage du cancer du sein" étaye le Dr Ceugnart. "Et cela permet de libérer du temps aux spécialistes pour qu'ils se concentrent sur les tâches plus complexes du dépistage."Les résultats de l'étude ouvrent de solides perspectives et devront être validés de manière prospective sur une cohorte indépendante comportant plus de patientes. In fine, l'objectif est de fournir une information fiable aux cliniciens afin qu'ils puissent orienter les patientes identifiées à haut risque vers de nouvelles thérapies innovantes, d'éviter aux malades à faible risque une chimiothérapie inutile et dès lors de limiter les impacts sur la vie personnelle, professionnelle et sociale.