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Un jeune homme de 27 ans a été hospitalisé à Pékin, après être rentré saoul chez lui et être tombé en syncope, suite à un repas riche en sucre. L'homme n'avait pourtant pas bu une goutte d'alcool et reconnaissait avoir déjà vécu ce genre de crises plusieurs fois. Certains médecins ont alors avancé qu'il avait peut-être bu en cachette, mais sa mère lui avait déjà fait passer un test d'alcoolémie à plusieurs reprises, dans des circonstances où elle savait avec certitude que son fils n'avait rien bu. Elle avait alors décelé de très hautes concentrations d'alcool dans son sang.Les médecins n'allaient pas rester sans réponse. La littérature scientifique faisait état de quelques cas rares de syndrome d'auto-brasserie. Des gens s'étaient retrouvés saouls suite à des repas riches en hydrates de carbone, avec une explosion de saccharomyces cerevisiae à la clé, une levure qui transforme les hydrates de carbone en alcool. Les antimycotiques n'avaient été d'aucune aide chez le patient chinois. Les médecins souhaitaient constater le processus de leurs propres yeux et ont donc servi à l'intéressé une repas riche en sucre. Le taux de sucre a grimpé à 400 mg par décilitre, l'équivalent de 15 verres de whisky à 40°. Une biopsie du fois a permis de diagnostiquer une maladie du foie gras non alcoolique (NAFLD), passée au stade de stéatohépatite non alcoolique (Nash). Ce trouble peut évoluer en cirrhose.Comme les bactéries peuvent produire de l'alcool, les médecins ont étudié 14 échantillons de selles du patient, prélevés à différents moments. Ils ont ainsi découvert une prolifération de Klebsiella pneumoniae. La bactérie représentait même 20% de la flore intestinale, c'est-à-dire 900 fois les valeurs habituelles. Une partie de cette population fabriquaient intensivement de l'alcool à partir des hydrates de carbone.En étudiant quelques dizaines de patients atteints de NAFLD, les chercheurs ont constaté une présence accrue de klebsiella pneumoniae produisant de l'alcool dans 61% des cas, contre 6% dans une population de contrôle. Une expérience sur des souris a en outre montré que l'administration de klebsiella pneumoniae provoquait des lésions hépatiques comparables à celles occasionnées par l'alcool. Pour couronner le tout, ils ont servi des repas riches en sucre aux patients et ont vu leur taux d'alcool monter en flèche.Cela vaudrait la peine de savoir si ce phénomène touche aussi d'autres populations de patients atteints de NAFLD. Ne fut-ce que parce que la prolifération peut être facilement décelée par un simple test oral de tolérance au glucose et que le trouble se soigne par antibiotiques et grâce un régime adapté. C'est d'ailleurs la voie thérapeutique choisie pour le patient chinois, chez qui le trouble a fortement reculé après le traitement.Son cas est très extrême, mais il est possible que certaines personnes développent une version plus " soft " de production intestinale d'alcool qui pourrait favoriser l'apparition de NAFLD. Des commentaires dans la presse médicale rappelaient que la NAFLD constituait une maladie multifactorielle fortement liée à l'obésité et au diabète. De plus, la flore intestinale est ethniquement influencée. Il importe donc de vérifier la pertinence des résultats par l'étude d'une population plus large.