Le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) a définitivement approuvé le 27 avril un projet de décret instaurant un "Conseil des hôpitaux universitaires" en FWB. Renaud Mazy, administrateur délégué des Cliniques universitaires Saint-Luc, déflore ses missions et son utilité.
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Le journal du Médecin: Quelles seront les missions principales de ce Conseil? Renaud Mazy: Il nous semble opportun de disposer aujourd'hui d'un organe qui puisse regrouper l'ensemble des hôpitaux académiques francophones du pays étant donné l'évolution des besoins dans les matières du secteur hospitalier qui relèvent de la FWB et le haut degré de technicité de ces dossiers. Plus concrètement, ce Conseil sera appelé à formuler des avis sur les modalités de financement des hôpitaux académiques en ce qui concerne les matières qui relèvent de la compétence de la FWB: le prix d'hébergement, les appareillages des services médico-techniques lourds, les plans de construction, l'agrément des hôpitaux et l'agrément des réseaux cliniques locorégionaux auxquels les hôpitaux académiques appartiennent, etc.. Les membres de ce Conseil pourront également être amenés, à la demande du Gouvernement, d'offrir une mission de conseil plus large relative au fonctionnement, au financement et aux missions d'enseignement et de recherche des hôpitaux universitaires. Ne craignez-vous pas que ce soit une usine à gaz? À ce jour, seule la Chab (Conférence des hôpitaux académiques de Belgique) permet aujourd'hui de rassembler les sept hôpitaux universitaires du pays (Erasme, CUSL, Liège, Gand, Anvers, UZ Brussel et la KU Leuven). Néanmoins, elle n'est que très peu représentée dans les organes officiels de concertation (à l'exception, depuis cette année, d'une représentation effective au sein de la CPNMH - Commission paritaire nationale médecins-hôpitaux). De plus, les hôpitaux néerlandophones et francophones sont également soumis à une répartition des compétences qui, malheureusement, reste hétérogène. En effet, la 6e Réforme de l'État a opéré un important transfert de compétences en matière de santé et de politique hospitalière vers les Communautés. La Fédération Wallonie-Bruxelles a également transféré une partie de ces nouvelles compétences à la Région wallonne et à la Commission communautaire française, sauf pour ce qui concerne les hôpitaux universitaires, en-dehors du contrôle des agréments. Le résultat nous amène à une organisation de la politique de santé singulièrement complexe et asymétrique au niveau de la Belgique. Non seulement au vu de l'organisation des compétences communautaires sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale d'une part, et d'une répartition différente entre les institutions francophones d'autre part... alors que la compétence communautaire flamande n'est exercée que par une seule entité fédérée. À ce titre, en qualité d'hôpital académique dont le siège est par ailleurs établi sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, nous ne pouvons qu'accueillir favorablement la proposition de la ministre Glatigny de constituer un nouvel organe d'avis spécifique aux hôpitaux académiques francophones et qui permettra, de surcroît, d'améliorer la lisibilité et la cohérence au niveau de la politique hospitalière francophone d'une part, tout en garantissant la prise en compte de l'évolution des besoins propres au secteur d'autre part. La composition de ce Conseil "veillera à intégrer les différents acteurs en lien avec les hôpitaux universitaires, tant les membres des institutions, les fédérations hospitalières, les organismes assureurs et les doyens des facultés de médecine ayant un cursus complet en Fédération Wallonie-Bruxelles". Quelle place dans ce conseil pour les médecins hospitaliers et les conseils médicaux? La présence médicale au sein de ce Conseil sera assurée par les différents hôpitaux concernés. Chaque hôpital aura en effet la liberté de proposer trois membres de son institution, en veillant à une répartition équilibrée entre le gestionnaire hospitalier, le département médical et le département infirmier ou paramédical, en plus de la présidence du Conseil assurée par un membre proposé par l'Académie royale de Médecine. La FWB est compétente en matière d'agrément des hôpitaux universitaires et de financement de leurs investissements en infrastructures et matériel. Dans le cadre du concept des paquets de compétence homogène, trouvez-vous souhaitable pour plus d'efficacité de régionaliser d'autres prérogatives relevant des hôpitaux ou au contraire de refédéraliser les compétences régionalisées? Chacun se prépare en effet à voir une 7e réforme de l'État aboutir. Chacun aura également pu observer à l'occasion de la crise sanitaire les nombreuses difficultés ou incohérences qui continuent de persister dans l'organisation des soins, singulièrement à Bruxelles vu la complexité institutionnelle qui y règne et où pas moins de six ministres s'y partagent la compétence santé. Qu'il s'agisse d'un scénario de refédéralisation ou de régionalisation, il faudra à tout le moins que le résultat aboutisse à plus de cohérence, de lisibilité et d'efficacité dans l'organisation de la politique de santé, particulièrement du côté francophone (...) Je suis d'avis que la régionalisation, à l'occasion de la 6e Réforme de l'État, avait déjà été poussée à son paroxysme et n'a pas permis d'aboutir à plus d'efficacité au moment de la gestion de la crise sanitaire. Comment l'augmenter davantage sans remettre en question les principes de subsidiarité et de solidarité au niveau fédéral? Si c'est l'option qui, à regret, doit être choisie, je plaiderais alors pour que le transfert aux Régions n'entraîne, en aucune manière, le démantèlement de notre sécurité sociale. À défaut de quoi, nous nous dirigerions vers une institutionnalisation d'un système de santé à deux vitesses et déboucherions sur une situation inextricable pour Bruxelles (...) Il pourrait être sain de penser à une refédéralisation complète [des] compétences pour [les hôpitaux universitaires] spécifiquement.