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Ce fut étonnamment simple, selon les propres dires des chercheurs de l'Université de Californie à Berkeley.Pour inverser la cécité chez des souris rendues aveugles par une rétinite pigmentaire, ils ont injecté un adénovirus associé (AAV) dans le corps vitré de l'oeil des rongeurs. Conçu pour cibler les cellules ganglionnaires de la rétine, ce vecteur avait été chargé d'un gène humain "réparateur" correspondant à un récepteur photosensible, l'opsine verte. Normalement, ce pigment visuel n'est exprimé que par les cellules photoréceptrices coniques et les rend sensibles à la lumière vert-jaune. Lorsqu'il est transporté par le virus inactivé dans des cellules ganglionnaires et intégré, ces cellules commencent à en fabriquer elles-mêmes, prenant ainsi le relais des cellules photosensibles, normalement responsables de cette production, mais détruites par la rétinite pigmentaire.Au total, 90% des cellules ganglionnaires rétiniennes sont redevenues sensibles à la lumière, et capables d'envoyer des signaux visuels au cerveau. Au bout d'un mois, les souris avaient retrouvé une vision presque normale et un comportement proche de souris normales. Elles parvenaient à franchir les obstacles aussi facilement que des congénères n'ayant pas de problème de vision et elles réussissaient même à voir les mouvements, à distinguer les changements de luminosité et à percevoir les détails fins, comme les lettres, sur un iPad.Les chercheurs veulent maintenant effectuer la même expérimentation sur les humains, et tenter de rendre la vue à des personnes malvoyantes ou aveugles lors d'essais cliniques. Mais ils devront faire face à quelques défis de taille. Rien ne permet de prétendre que des personnes réagiront de la même manière que des souris. En effet, l'oeil humain est beaucoup plus volumineux, il contient des milliers de fois plus de cellules ganglionnaires, il est moins sensible et la vision est différente de celle des souris, beaucoup plus adaptée à la vision nocturne. Il faudra donc sûrement des quantités beaucoup plus importantes de matériel de thérapie génique.Cependant, l'équipe de l'UC Berkeley a mis au point les moyens d'améliorer l'administration virale de gène et espère pouvoir prochainement délivrer la thérapie à un pourcentage plus élevé de cellules ganglionnaires. Elle travaille également à la mise au point de variantes pour restaurer la vision des couleurs, accroître l'acuité et améliorer l'adaptation visuelle.Quoiqu'il soit, le premier essai clinique destiné à établir si ce procédé testé avec succès sur les souris est transposable à l'Homme devrait avoir lieu d'ici trois ans. Une vraie lueur d'espoir pour tous les patients qui ont perdu la vue à cause de la dégénérescence rétinienne.(référence : Nature Communications, 15 mars 2019, doi : 10.1038/s41467-019-09124-x)