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Les mécanismes sous-jacents de la maladie de Crohn (MC) sont complexes et multifactoriels. On pense qu'il s'agit d'une interaction entre une prédisposition génétique et des facteurs environnementaux (tabagisme, stress, alimentation, infections), entraînant un dérèglement du système immunitaire. Les personnes ayant des antécédents familiaux de la maladie sont plus susceptibles de développer elles-mêmes la maladie de Crohn. Aujourd'hui, cependant, on ne sait pas exactement qui est plus ou moins à risque de développer la MC. Il existe déjà des scores de risque pour la MC mais, jusqu'il y a peu, aucun modèle ne prenait en compte les différents "déclencheurs" connus et les biomarqueurs (précliniques) de la maladie. Le projet CCC-GEM [1] a voulu changer les choses [2]. Les chercheurs ont mis au point une "stratification du risque multimodale et intégrative" pour les parents sains de premier degré (PSPD) de patients atteints de la MC. Le score de risque prend en compte les données démographiques, les biomarqueurs de l'inflammation intestinale et les caractéristiques du microbiote fécal, et calcule le risque futur de maladie de Crohn sur cette base. Le score de risque a déjà été testé et validé dans deux cohortes différentes.Plus précisément, on a utilisé des marqueurs sanguins (calprotectine fécale), des marqueurs urinaires (RLM [3 ]) et des marqueurs fécaux (profil microbiotique et fonction microbiotique) provenant de 2.619 PSPD afin d'affiner la prédisposition héréditaire. La population a été suivie pendant près de sept ans, environ 60 personnes ont développé la MC au cours de cette période. Les taux élevés de calprotectine fécale et de RLM se sont finalement avérés être les marqueurs les plus influents dans le modèle de risque de la MC, mais le type de microbiote intestinal joue également un rôle clair dans le processus de la maladie. Le modèle de risque doit évidemment être validé davantage, mais si nous pouvions estimer avec précision le risque de MC, il s'agirait potentiellement d'un premier pas vers la prévention primaire chez les PSPD à haut risque. En outre, on pourrait envisager des thérapies ciblées basées sur des biomarqueurs spécifiques. Toutefois, il reste à déterminer dans quelle mesure des personnes en bonne santé et asymptomatiques sont prêtes à subir des interventions thérapeutiques pour une maladie qu'elles ne développeront peut-être jamais. Notes : [1] Crohn's and Colitis Canada-Genetic, Environmental, Microbial Research Consortium [2] Lee S-H, et al. Development and Validation of an Integrative Risk Score for Future Risk of Crohn's Disease in Healthy First-Degree Relatives. Gastroenterology (2025), Vol 168, Issue 1, 150 - 153.e4 [3] Lorsque la perméabilité de l'intestin est augmentée et que la barrière intestinale est donc affaiblie, le ratio lactulose/mannitol (RLM) est élevé dans l'urine.