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Alors que la pandémie n'a toujours pas pu être endiguée, les scientifiques continuent de chercher à mieux comprendre pourquoi deux patients présentant les mêmes comorbidités développent soit un Covid sévère, voire en décède, soit des symptômes plus légers. Autrement dit, ils se demandent ce qui cause les cas les plus graves. Une équipe de l'Université de l'Arizona, en collaboration avec l'Université Stony Brook et la Wake Forest School of Medicine, aurait identifié un mécanisme moléculaire clé. L'explication tiendrait dans une enzyme baptisée sPLA2-IIA, pour phospholipase A2 sécrétée de type IIA.Le rôle de cette enzyme essentielle fait l'objet d'études depuis un demi-siècle et c'est probablement le membre le plus étudié de la famille des phospholipases. Charles McCall la qualifie de "déchiqueteur" pour sa prévalence connue dans les événements inflammatoires graves, tels que la septicémie bactérienne, ainsi que le choc hémorragique et cardiaque.Des études antérieures ont montré que l'enzyme détruit la membrane cellulaire de la bactérie lors d'une infection bactérienne, mais qu'à forte concentration, elle "racle" également la membrane des cellules des organes, contribuant ainsi à la défaillance et à la mort de plusieurs organes.Lorsqu'elle circule à des niveaux élevés dans le sang, elle s'attaque à des graisses spécifiques présentes sur la surface externe de la membrane des microbes. Les recherches ont également mis en évidence l'ascendance génétique de sPLA2-IIA similaire avec une enzyme active dans le venin de serpent à sonnettes. "Comme le venin traversant le corps, elle a la capacité de se lier aux récepteurs aux jonctions neuromusculaires et potentiellement de désactiver la fonction de ces muscles," a déclaré Floyd Chilton.Cette fois, les scientifiques ont collecté des échantillons de plasma stockés et se sont attelés à l'analyse des dossiers médicaux et à la recherche des données cliniques essentielles de 127 patients Covid-19 hospitalisés entre janvier et juillet 2020. Une deuxième cohorte indépendante comprenait un mélange de 154 échantillons collectés entre janvier et novembre 2020.Alors que chez la plupart des individus en bonne santé, les concentrations en sPLA2-IIA dans le sang oscillent autour d'un demi-nanogramme par millilitre (ng/ml), selon l'étude, la Covid-19 s'est avérée mortelle chez 63% des patients ayant une forme sévère et des niveaux de sPLA2-IIA égaux ou supérieurs à 10 ng/ml. C'est encore cinq fois plus que chez les patients qui ont survécu à des formes graves de la maladie.Pour les auteurs, la sPLA2-IIA pourrait être le facteur le plus important permettant de prédire quels patients atteints de Covid-19 sévère finissent par succomber au virus et elle constituerait dès lors une nouvelle cible thérapeutique."Parce que les inhibiteurs de la sPLA2-IIA existent déjà, notre étude soutient l'utilisation de ces inhibiteurs chez les patients présentant un niveau élevé de sPLA2-IIA pour réduire, voire prévenir, la mortalité due à la Covid-19," assure le Pr Maurizio Del Poeta.D'autres études et surtout des essais cliniques devront être menés pour le confirmer.(référence : Journal of Clinical Investigation, 24 août 2021, doi : 10.1172/JCI149236)