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L'aspect de l'ECG montrant une repolarisation précoce a été décrit dès 1936. Il est caractérisé par une élévation du point J d'au moins 0,1 mV dans au moins deux dérivations. La forme prise par l'onde est un empâtement ou un crochetage de la partie terminale du QRS. Cet aspect était considéré comme normal même jusque dans les années 50-60 où elle était comprise comme une particularité juvénile du segment ST. Cela n'inquiétait pas jusqu'en 1984 où l'on rapporte un lien entre les ondes J et la mort subite. En 2007, la première étude cas-témoins apparaît. Depuis l'on parle plus volontiers de syndrome de repolarisation précoce. En 2009, Tikkanen et ses collègues1 montrent qu'une élévation du point J de plus de 0,1 mV multiplie le risque relatif de décès cardiovasculaire par 1,3 (p=0,02) et par 3,03 si l'onde atteint plus de 0,2 mV (p=0,001). Le risque relatif d'un décès dû à une arythmie est augmenté de 300 % ! Et ce syndrome pourrait être plus insidieux encore qu'on ne croit et identifier le sujet à risque reste une gageure, car si l'apparition de l'onde J est fréquente, le décès par mort subite chez le sujet jeune demeure, heureusement, une rareté. Il n'y a pas de stratégie validée pour évaluer le risque d'un individu. Rester au courant ! Cependant, un certain nombre de facteurs ont été mis en avant par Nicolas Derval. Ainsi, 39 % des patients présentant un arrêt cardiaque ont présenté une histoire de syncope et la prévalence de syncope chez les patients présentant une repolarisation précoce par rapport aux sujets normaux est de 18,5 % vs 2 % (p<0,005). L'histoire familiale joue également un rôle puisque 16 % des cas sont liés dans la parenté proche à une mort subite prématurée, avant 45 ans. L'amplitude de l'onde J dont on a déjà parlé doit inquiéter ainsi que sa morphologie. L'aspect crocheté de l'onde J à la partie terminale du complexe QRS semblerait plus fréquent lors des repolarisations précoces malignes, mais cela reste à confirmer dans de larges études. Dans aucun cas, une syncope survenant en association avec une repolarisation précoce n'est un événement anodin. Il doit donc faire l'objet d'une attention particulière. Du côté de la prévention, deux aspects sont à prendre en considération : la prévention primaire et la prévention secondaire. Dans le deuxième cas, celle-ci réside simplement dans l'implantation d'un défibrillateur implantable, sauf contre-indications majeures. La prévention primaire en revanche reste beaucoup plus compliquée, car rien n'indique a priori que le patient est à risque. Difficile de conclure sur un tel sujet alors que beaucoup d'études manquent encore et que l'on sent bien que la question du risque de développer une telle maladie n'est pas totalement élucidée, tant s'en faut... En attendant d'avoir des recommandations claires, il faudra se fier à son flair de clinicien...Référence :