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Contrairement à l'exposition historique dédiée à John Cockerill, celle consacrée à la médecine par le CHU de Liège a opté pour une approche plus esthétique.La leçon d'anatomie. 500 ans d'histoire de la médecine, compte quatre parties, la première s'attachant à illustrer la présence de la médecine dans l'art ancien ou contemporain.Un Arracheur de dents peint par Van Honthorst en 1627 et prêté par le Louvre y est notamment mis en regard des dents en feutre de la jeune artiste Elodie Antoine, l'une parmi les nombreux plasticiens liégeois présents dans l'expo. Un charlatan, toile de Léon Philippet de la fin 19e siècle, fait face au Massage, érotisant comme souvent chez Rops, aux Mauvais médecins d'Ensor et à de fantastiques caricatures de médecins signées Boilly (1825) et dignes d'un Hogarth.Deux toiles réalistes et hospitalières de Chicotot prêtées par le musée de l'Assistance publique de la ville de Paris sont, autre exemple, placées à côté d'une pointe sèche de Sofie Vangor : un morceau de peau humaine portant un tatouage, celui de deux chirurgiens recousant. L'espiègle Marcel Mariën signe un buste féminin aux couleurs mondrianesques, intitulé La Vénus Amersfoort, tandis que Nathalie Noël lui emboîte le pas en proposant une mosaïque de neuf photographies représentant baxter, seringue, sparadrap, compresse... ironiquement intitulée Une époque formidable.Dans cette exposition qui réunit installations, photographies, peintures et sculptures, trône notamment une photo d'Andres Serrano, un pied " saisi " à la morgue, dont la composition rappelle le Titien.Un peu sanguinolent, certes, mais moins que l'installation de Laurence Dervaux qui au " coeur " de l'expo, présente 750 réceptacles montrant la quantité de sang pompé par l'organe central humain en 1h28, temps qui lui a été nécessaire pour remplir tous ces récipients.Dans cette expo qui se veut " une autre manière de réfléchir à notre condition humaine ", selon les mots de la commissaire Marie-Hélène Joiret -à qui l'on doit une expo remarquable et remarquée intitulée L'art de l'irrévérence voici six ans-, une autre section met en parallèle des photographies scientifiques au microscope et des oeuvres contemporaines. Le lien n'est certes pas toujours évident, mais fonctionne à merveille dans le cas des " dessins " d'Alechinsky, du crâne imaginé par Werner Moron ou du mobile Ponctuation de Pol Bury.Le cabinet de curiosités montre surtout l'art au service de la science et est introduit par une copie de la célèbre Leçon d'anatomie du docteur Tulp de Rembrandt venue du musée Flaubert et d'Histoire de la médecine de Rouen. Autres parties prenantes, l'Hôpital Notre-Dame à la Rose de Lessines et bien sûr, le musée de la médecine de l'ULB.Entre les planches et études anatomiques, notamment de l'école de Michel-Ange, ou une main écorchée en cire du 19e siècle, l'illustration par Jacques Lizène de la vasectomie qu'il a volontairement subie. Pas loin du " petit maître liégeois ", un autre concitoyen tout aussi iconoclaste : Jacques Charlier qui signe une peinture cérébrale...Wim Delvoye propose des radiographies qui le " montrent " notamment léchant le derrière d'un cochon, tandis que La mise au tombeau de Delvaux rappelle la passion du peintre pour la collection Spiztner dont La leçon d'anatomie expose d'ailleurs une cire.L'exposition se conclut sur les lambris imaginés par 11 artistes parmi lesquels Sol Lewitt, Jo Delahaut, Daniel Buren, Marthe Wéry ou Olivier Debré, qui furent chargés d'intégrer des oeuvres d'art au bâtiment du CHU, selon la volonté de Charles Van Den Hove, son concepteur, également présent en tant qu'artiste. L'architecte a ainsi jeté des ponts entre le bel art de guérir et les beaux-arts.