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Située au sud d'Anvers, la commune de Heist-op-den-Berg compte 42.000 habitants. Les hôpitaux les plus proches sont ceux de Lier, de Bonheiden et de Herentals. Une trotte donc, ce qui explique pourquoi les ambulances interviennent plus lentement (en moyenne) que dans le reste de la Belgique. Trop lentement même, dans le cas d'un arrêt cardiaque. " Les cinq premières minutes sont cruciales ", explique le Pr Patrick Van de Voorde, de l'UGent. Avec son équipe, notre homme se penche depuis un moment sur l'utilisation des drones dans les cas de malaise cardiaque1. " Les chances de survie sont largement supérieures quand la réanimation et l'utilisation du DAE (défibrillateur automatique externe) ont lieu dans ce laps de temps. "La condition est toutefois qu'un tel appareil soit disponible dans les environs, avec une personne capable d'utiliser le DAE qui plus est. Quid du potentiel du drone ? " Il décolle rapidement, vole à grande vitesse et accède à de nombreux endroits. Il peut donc atteindre la destination voulue dans les temps. En outre, il permet une communication visuelle bidirectionnelle. L'urgentiste dans l'ambulance peut donc déjà donner des indications au passant/accompagnant. "À Heist-op-den-Berg, le drone serait piloté par l'équipe d'intervention de Heist (HIT) qui compte deux ambulances et est gérée par le service local des pompiers. En matière de drone DAE, l'équipe s'est inspirée des réflexions du think tank Living Tomorrow, qui a soutenu, en collaboration avec la TU Delft et l'Université de Gand, le projet de fin d'étude d'un étudiant belge, auteur d'un prototype de drone ambulance.La commune de Heist et la HIT passent aujourd'hui à la deuxième phase, en s'associant au chercheur postdoctorant Bart Theys (de la KU Leuven), chargé de développer un nouveau prototype adapté aux besoins de la commune. Après une première version en 2014, son équipe a déjà conçu trois générations successives de drones hybrides, chacun volant plus vite et plus loin que le précédent. "Nous avons mis en place une méthodologie nous permettant de fabriquer des prototypes de manière rapide et efficace, compte tenu de la distance à parcourir, de la charge à transporter et de la vitesse d'intervention requise ", explique Bart Theys.Plusieurs hôpitaux s'étaient déjà montrés intéressés par les drones VertiKUL, entres autres pour le transport d'échantillons. Les discussions avec l'UZ Leuven et l'AZ Delta sont toujours en cours, comme nous l'indique Bart Theys. Des chercheurs suédois ont également témoigné leur intérêt.Il reste de nombreux défis à relever pour intégrer cette technologie dans le quotidien, reconnait Bart Theys. " Il faut, tout d'abord, faire voler le drone si vite qu'il puisse atteindre la victime dans les plus brefs délais. " À Stockholm, le renommé Institut Karolinska a effectué des tests avec un drone capable de transporter un défibrillateur2. Le drone arrivait en moyenne 16 minutes plus tôt que l'ambulance, pour une distance d'environ trois kilomètres.Deuxièmement, il faut prendre en compte les frais importants de développement pour passer du prototype à un système sûr et fiable. C'est pourquoi les parties concernées étudient la possibilité de bénéficier de subsides flamands ou européens. Une collaboration avec un producteur de drones ou d'appareils de DAE constitue également une option. Mais tout cela prendra du temps. C'est pourquoi, les parties concernées travaillent actuellement à un proof-of-concept, une démonstration en quelque sorte.De surcroît, il faut aussi s'attaquer à la question juridique. Les drones DAE ne pourront pas traverser le ciel du jour au lendemain. " Pour l'instant, les drones ne peuvent pas sortir du champ de vision du pilote ou transporter des paquets. En outre, ils ne peuvent pas voler au-dessus des villes, des grands axes, des personnes et des animaux. "La question est de savoir si le drone DAE relève lui aussi de cette législation, poursuit Theys. " Si le drone est utilisé dans un cas d'urgence, par des services de secours, cela en fait un véhicule officiel. Au-delà de ça, il y a encore bien d'autres règles à respecter, comme la sécurité de l'espace aérien. " La législation ne changera pas sans action concrète, affirme notre homme." Le drone DAE constitue un projet prometteur ", conclut le Pr Van de Voorde, " mais il importe de ne pas aller trop vite en besogne et de définir dans un premier temps les conditions auxquelles doivent satisfaire les drones DAE, avant de passer aux essais sur le terrain. "1. P. Van de Voorde, S. Gautama, A. Momont, C.M. Ionescu, P. De Paepe, N. Fraeyman (2017). The drone ambulance [A-UAS] : golden bullet or just a blank ? Resuscitation, 116 : 46-48.2. A. Claesson, A. Bäckman, M. Ringh et al. (2017) Time to Delivery of an Automated External Defibrillator Using a Drone for Simulated Out-of-Hospital Cardiac Arrests vs Emergency Medical Services. JAMA, 317(22) : 2332-2334.