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Le Papilio machaon ne fait pas partie des centaines de variantes du papillomavirus. C'est le nom scientifique du grand porte-queue (ou Machaon), un papillon qui a fait de la carotte sa principale plante-hôte.Il y a plus de 50 ans, le docteur Bacart n'avait de connaissance de la médecine que le bisou magique. C'est en culottes courtes, et dans le potager d'un habitant du village, qu'il tombe amoureux d'un des plus grands lépidoptères d'Europe.Alors que certains se seraient bornés à les attraper et à les mettre sous verre, il s'est mis à les cultiver. " Depuis ce moment-là, je sème des carottes pour élever mes chenilles. Je les chouchoute dans un lieu protégé à température de terre. Les cocons sont ainsi préservés de leurs prédateurs que sont les souris et les guêpes."C'est dans le bois du Laerbeek en région bruxelloise que se trouve son exploitation. " Quand la chenille est mûre, je capture les cocons dans mon potager ou dans celui des voisins ", nous avoue-t-il. Il récolte une trentaine de chrysalides de la sorte chaque année." Il y a 28 ans, l'extrême droite renaissait. Mon cabinet était un des rares où toutes les populations se rencontraient. Je voulais montrer qu'on savait vivre avec tout le monde." C'est en ces termes que le Dr Bacart trouve la genèse de son engagement politique. Il fait alors renaître de ses cendres le parti Ecolo qu'il pousse aux élections et se fait élire. Une fonction qu'il assuma durant six ans. " Je ne me suis pas représenté aux élections qui suivirent car cette fonction est particulièrement chronophage. C'est en outre très difficile à gérer lorsque l'on est médecin. Les patients viennent vous trouver pour vos deux fonctions. Pour soigner leur lumbago mais aussi pour les aider à acquérir un logement social ", nous confirme-t-il, la mine boudeuse.Après 20 années de pause, Catherine Moureaux (PS) lui propose de rejoindre sa liste, ce qu'il accepte finalement. Il déploie ses ailes dans la fraîcheur d'un matin, quelques mois avant les élections d'octobre 2018. Placé à la 14e place, il obtient plus de 600 voix. Un chouia trop peu pour prétendre à un échevinat." Lorsque je suis arrivé à Bruxelles, j'ai cherché un endroit où m'installer. J'ai papillonné en vélo dans les rues de Saint-Gilles et Molenbeek pour voir où se trouvaient les plaques de médecins. Il n'y en avait pas place de la Duchesse et c'est là que je me suis posé ". Une place qui change et où une forme de gentrification s'observe. " Il y a dix ans, les gens y habitaient le temps de pouvoir vivre ailleurs. C'est moins le cas maintenant ". Depuis peu, Patrick Bacart a obtenu une maison de quartier à deux pas de son cabinet, chaussée de Ninove. Différentes associations y occupent des locaux. Il nous vante celle animée bénévolement " par un vieux cuistot ". Une cuisine qui se veut locale et d'ailleurs mais mitonnée avec des produits issus du marché du mardi et qui fait se rencontrer des habitants différents.Contacté récemment par le CPAS de la commune, le Dr Bacart consulte également gratuitement dans un entrepôt où résident des sans-abri.Sa secrétaire lui parla de la Guinée et lui donna envie d'y aller. Par écologie et dans un souci d'économiser les frais, il n'y va plus régulièrement mais il garde des contacts assidus. " Je ne compte plus le nombre de camions chargés de matériel que j'y ai envoyés ", nous affirme-t-il. " Le soir, avant que les poubelles ne passent sur la place, je récolte les seaux de sauce du fritkot. En Guinée, ces contenants ont de la valeur." De même, il envoie des pots de confiture remplis de médicaments qui permettent ensuite aux Guinéens de les remplir de gelée de mangue. Sur place, il n'a jamais exercé sauf à de rares exceptions. Son aide consiste en l'envoi de matériel et de médicaments, " histoire de ne pas créer un besoin sans possibilité de suivi et pour ne pas déstabiliser mes collègues locaux. "" Le pouvoir fédéral a rendu impossible la récolte d'échantillons auprès des pharmacies en prétextant la chaîne du froid ", regrette le docteur Bacart. Il en comprend la logique lorsqu'il s'agit de vaccins ou de médicaments spécifiques mais lorsque le paracétamol, par exemple, subit les mêmes contraintes, cela lui reste au travers de la gorge. " Que nous dit notre serment ? Nous devons aider les gens mais on nous interdit de leur donner des échantillons ", nous dit-il, passablement remonté contre la politique de Maggie De Block. Et de rajouter que face à cela, " beaucoup de médecins passent outre les recommandations ". Son réseau est principalement alimenté par les dons de patients acquis à la cause. L'effet papillon en quelque sorte.