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En Belgique, les troubles mentaux sont la cause principale de demande de prestations pour environ un tiers des 260.000 bénéficiaires de l'assurance invalidité et pour une proportion importante des 160.000 bénéficiaires de l'allocation d'invalidité.La première publication de l'OCDE sur le sujet remonte à janvier 2012. Répondant au doux nom de " Mal-être au travail ? Mythes et réalité sur la santé mentale et l'emploi ", ce rapport recensait les principaux enjeux stratégiques auxquels les pays sont confrontés. Suite à cette première analyse, l'Organisation de Coopération et de Développement Economique a décidé d'approfondir ses recherches en se focalisant sur 9 pays aux profils similaires : Australie, Autriche, Danemark, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse et Belgique. C'est notre pays qui a " l'honneur " d'ouvrir la série de neuf études, l'OCDE analysant en profondeur l'approche belge sur des sujets tels que la transition de l'école à l'emploi, le lieu de travail, les organismes fournissant des services aux demandeurs d'emploi, l'entrée dans le régime d'invalidité permanente et la pertinence du système de santé. Il était présenté mardi au siège de l'Inami, en présence d'Yves Leterme, secrétaire général adjoint de l'OCDE, lors d'un colloque qui rassemblait Inami, services régionaux (VDAB, Forem, Actiris) pouvoirs publics, monde académique et mutualités.Une très bonne baseUn premier constat pour l'OCDE : la Belgique a beaucoup de potentiel pour lutter contre la mauvaise santé mentale au travail. L'Organisation pointe les trois atouts majeurs de notre pays : une législation sociale progressiste qui met l'accent sur la prévention ; des personnes souffrantes percevant des indemnités de chômage plutôt qu'une pension d'invalidité, ce qui les laisse en contact avec le monde du travail et facilite la réintégration ; et enfin, un régime intégré de prestations de maladie et d'invalidité, idéal pour assurer le suivi des maladies, la rapidité des interventions et l'efficacité des mécanismes de retour au travail. Il n'y aura donc pas de révolution majeure à opérer pour faire face au problème.Un tableau a priori positif, qui ne doit pas faire oublier les lacunes du système : une prévention parfois défaillante et un modus operandi qui reste très passif et réactif, des moyens financiers trop réduits alloués par les employeurs à la prévention, des soins qui se focalisent encore trop sur " l'intra-muros ", des séances de psychothérapie non remboursées,...Les lignes ont déjà bougéComme l'ont souligné les dirigeants de l'Inami et d'autres acteurs des secteurs concernés, de nombreuses initiatives ont vu le jour depuis janvier 2012 et la publication du premier rapport ainsi que durant la rédaction de la présente étude.La réforme des soins de santé mentale est en marche, et le SPF Santé et l'Inami collaborent depuis 3 ans au projet " Back to work ", qui propose un accompagnement ciblé des personnes de retour au travail après une absence de longue durée.L'organisme assureur opère également une réforme de sa " tradition " : tout son processus d'évaluation médicale est en cours de réévaluation. Donner plus de temps aux dossiers et axer la réforme sur les capacités de remise au travail en sont les maîtres-mots." La suppression de l'autorisation préalable du médecin conseil pour une reprise partielle du travail ou l'augmentation des plafonds de cumul des revenus professionnels/indemnités ", sont d'autres exemples des avancées réalisées, a tenu à souligner Jo de Cock, l'Administrateur général de l'Inami, qui plaide également pour une communication accrue entre médecins-conseil, médecins du travail et MG, ces derniers étant presque systématiquement ceux qui déclarent en premier l'incapacité de travail.Du côté des mutualités, on a également fait son mea culpa : leur manque de réactivité est à mettre sur le compte d'une "culture qui, depuis 50 ans, nous borne à constater l'incapacité", a déclaré le Dr Bronckaers de l'Union des mutualités libérales. Il a toutefois souligné la difficulté à trouver des médecins prêts à se spécialiser dans le domaine de l'assurance ainsi que les contraintes légales, qui veulent par exemple que pour être indemnisé, il faut avoir cessé toute activité professionnelle. La méfiance sociale vis-à-vis d'une fraude potentielle est également très difficile à combattre, a-t-il ajouté.Le colloque s'est terminé sur une allocution du secrétaire d'Etat aux Affaires sociales Philippe Courard, qui a déclaré être en relation avec la ministre de l'Emploi Monica De Coninck afin de revoir le statut d'incapacité ainsi que la façon de travailler des médecins-conseil.Des ramifications multiples comme on le voit, et une urgence à traiter le dossier : aujourd'hui, quatre travailleurs sur cinq reconnaissent une baisse de productivité en raison de leur état de santé mentale.